Fyctia

Janvier 2011…

Vingt-trois heures.

Il n’est pas tard pourtant j’ai l’impression que cette soirée va être la plus longue de ma vie.

Max et Paola semblent être heureux. Leurs regards parlant pour eux. Lui qui avait plutôt tendance à collectionner les filles paraît satisfait et comblé.

Je voulais profiter de ce moment entre hommes pour lui parler d’Anna mais je ne peux pas. Je n’avais pas prévu que nous ne serions pas seuls. A la place nous parlons de leur rencontre. Dans le bar où nous sommes sur le point de retrouver les autres. Rencontre assez banale contrairement à ce que je pensais.

Les entendre parler me rend nerveux. J’aimerais pouvoir être aussi transparent avec celui que je considère comme un frère, mais bizarrement je ne suis plus très sûr de moi. Je n’arrive pas à anticiper sa réaction concernant Anna. Et le fait que Paola soit là ne m’aide pas.

Elle connaît mes travers. Elle sait beaucoup de choses sur moi. Inavouables devant mon ami.

Finalement je laisse tomber. Je reste là, à les écouter. M’enfermant un peu plus à chaque minute. Redoutant le moment où je réussirais enfin à parler.

La seule chose positive est que mon érection me fout la paix. Me donnant espoir pour le reste de la soirée. Si déjà j’arrive à m’en sortir de ce côté-là, la nuit ne sera pas totalement perdue.

*****

La musique s’entend déjà de l’extérieur lorsque nous arrivons au bar. La nuit est glaciale mais nous entrons rapidement. En cette saison peu de gens aiment attendre dehors.

Je ne connais pas cet endroit. Plutôt habitué à rester proche de chez moi, je m’aventure rarement en dehors de la ville. Préférant mon quartier pour éviter de trop grandes tentations.

La salle est pleine. Le bar est noir de monde alors que les danseurs remplissent la piste. Les tables sont installées en cercle, un escalier au fond menant à une mezzanine ouverte, surplombant la salle. L’ambiance est plutôt festive. J’entends des rires par-dessus la musique alors que Max nous emmène vers l’étage.

Il semble y avoir ses habitudes. Une table reculée dans un coin nous attend avec un panneau « privé ». Nous sommes les premiers à arriver. Je propose aussitôt d’aller chercher nos verres en espérant pouvoir m’absenter quelques minutes. J’ai besoin d’une pause. Les voir collés l’un à l’autre m’emmerde. Anna me manque.

Je m’aperçois qu’encore un fois je pense à elle sans arrière-pensée. Je voudrais tout simplement être avec elle. Mais plus les jours passent plus je me sens faiblir. Sa présence devient vitale. J’ai la sensation qu’elle m’empêche de m’enfoncer davantage alors que mon manque s’intensifie.

Pourtant Anna ne me dit jamais non. Elle ne me repousse pas. Mais je sais que j’ai besoin de plus. Que mon corps a besoin de plus. Même si j’essaie de me persuader qu’il ne faut pas.

Se frayer un chemin pour atteindre le comptoir est un vrai défi. Mais je finis quand-même par rejoindre le bar. Je passe ma commande et me retourne vers la salle en attendant. La plupart des femmes dansent pendant que les hommes les observent avec envie. Lorgnant leurs courbes ondulant sur la musique. Certains ne sont vraiment pas discrets. Ricanant entre potes en les bouffant du regard. Je sais que mon jugement ne vaut rien mais j’espère ne pas ressembler à ça quand le manque se fait ressentir.

Je balaie la pièce du regard en essayant de ne pas m’attarder sur le corps des femmes. Mon esprit m’a laissé tranquille jusqu’ici et je préférerai qu’il le reste. Pourtant mes yeux sont immédiatement attirés par une brune moulée dans une robe verte. Me rappelant instantanément la couleur de deux yeux qui me font vibrer chaque jour.

Je ne vois que son dos mais ça suffit pour faire affluer mon sang jusqu’à mon bas-ventre. Une dizaine de danseurs me cachent la vue. Mais j’arrive quand-même à apprécier le spectacle. De longs cheveux noirs tombant en cascade sur son dos. Ses bras au-dessus de la tête balançant en rythme. Je ne vois pas le reste de son corps mais j’aperçois deux mains posées sur ses hanches. Un pincement au cœur me cloue sur place alors que je ne vois ni son visage ni celui du mec qui la touche. Mais qu'est-ce que je fous bordel !

Je lutte contre mon corps qui ne veut visiblement pas m’écouter. Je bande déjà comme un con. Essayant de me remémorer les images d’Anna pour me faire revenir à la raison. Sauf que ma queue se fout complètement de ce dont j’ai envie. Pourtant je ne veux pas avoir envie d’elle. Je ne dois pas. Anna est une perle dans ma vie et je ne veux pas tout foutre en l’air.

Je me fais violence et refais face au comptoir pour récupérer ma commande. Je me dirige vers les escaliers sans me retourner. Je ne dois pas la regarder. Je sais que je mets mon corps à l’épreuve mais tant pis. Il le faut. Quitte à finir par me branler dans les chiottes pour me soulager.

Je rejoins notre table où Max et Paola s’embrasse goulûment. Se foutant du monde qui les entoure. Je dépose la bouteille et les verres bruyamment, signalant ma présence. Ce qui les décolle aussitôt dans un sursaut.

-Merde Evan tu nous as fait peur !

-Désolé…mais fallait bien vous décoller ! C’était ça ou un seau d’eau froide !

Max se marre en ouvrant la bouteille alors que Paola me fusille du regard. Je n’y prête pas attention et m’accoude à la balustrade de la mezzanine pendant qu’il nous sert.

Je repère aussitôt mon inconnue. Sauf que le fait d’être en hauteur n’arrange en rien mon érection. J’ai maintenant une vue plongeante sur son décolleté. Une poitrine généreuse mise en valeur par sa robe. Augmentant considérablement mon désir pour elle.

Merde !

Depuis que j’ai découvert que mon esprit était noir je n’ai eu de désir que pour Anna. Aucune autre femme ne m’a jamais procuré ce sentiment. En général c’est purement mécanique, même quand je me branle. Je n’ai aucun désir ni plaisir. Il faut juste que je jouisse. Peu importe de quelle manière. Et avec qui. Sauf depuis Anna.

Mais cette fille fout le bordel dans ma tête.

Et si j’étais définitivement perdu ? Incapable de me raisonner et de ne m’abandonner qu’à une seule femme ?

Mes yeux glissent sur celui qui lui tient toujours les hanches. Je remarque qu’il ne la colle pas, il respecte une certaine distance. On pourrait croire qu’il danse avec sa sœur.

J’écarquille les yeux quand je me rends compte qu’il s’agit de Noah. Il devait nous rejoindre ici il y a plus d’une demi-heure mais visiblement il a préféré s’égarer avant de nous retrouver. Ses yeux se levant vers moi au même moment, je lève la main pour le saluer alors qu’il me fait signe qu’il monte. Je me retourne vers notre table pour aller m’asseoir. Max a servi tous les verres et Paola s’est installée sur ses genoux.

Je détourne le regard alors que Noah fait son apparition. L’inconnue à la robe verte sur ses pas.

Il s’écarte pour saluer Max. Me laissant voir enfin le visage de la femme mystère.

Putain ! Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?