Fyctia

Marine regarda sa patiente attentivement. Sa décision avait été prise dès sa rencontre avec la jeune femme, elle avait vu en elle, une personne en profonde détresse.

- Je vais partir cinq minutes aux toilettes , à mon retour ne soyez plus là. Partez vous réfugier auprès d'amis , de la famille , tenter de recommencer votre vie ailleurs peu importe où , mais ne revenez jamais auprès de lui. Dans la poche de ma blouse vous trouvez un porte monnaie avec une centaine d'euros. Prenez le premier train , ou le premier autocar qui passe et fuyez. Ce genre d'homme ne reculera devant rien pour vous retrouver. Et n'oubliez jamais de rester loin des radars, des réseaux sociaux , ne faites pas parler de vous, ne vous faites pas faire remarquer.

Marine Lapeyre se leva de son fauteuil, laissant en évidence sa blouse et s'approcha de la porte.

- Pourquoi faites vous cela pour moi? Pourquoi êtes- vous si gentille avec moi? Je ne suis qu’une patiente parmi tant d'autres, Interrogea Charlotte

- Il y a quelques années. une femme dans la même situation que vous est venu me voir, j’ai suivie le protocole à la lettre. Deux semaines plus tard, alors qu’elle avait portée plainte auprès des autorités avec la ferme intention de ne plus se laisser faire par sa conjointe , on l’a retrouvée morte chez elle, tabassée si violemment qu’on pouvait à peine la reconnaître. Ceci n’était pas un cas isolé, des centaines de femmes et d’hommes sont dans la même situation, alors je me suis promis d’agir au lieu d’obéir et d’offrir quand la situation le permet une chance de reprendre sa vie en mains. Alors ne me faites pas regretter mon choix et vivez.

A son retour des toilettes quelques minutes plus tard, Charlotte s’était envolée et l’argent avait disparu de son porte monnaie. Un mot écrit à la va vite était posé sur son bureau. Un simple merci qui voulait tout dire pour Marine. Elle avait réussi sa mission, elle avait protégé une innocente et lui avait permis de retrouver la liberté et c’était une belle victoire pour sa journée.

*

Assise dans le train, la tête penchée sur la vitre, Charlotte regardait le paysage défiler sous ses yeux et la ville de Lyon et ses souvenirs s'éloigner. Il y a cinq ans, elle avait pris le chemin inverse pour commencer une nouvelle vie, respirer de nouveau et oublier le traumatisme de la mort de son frère jumeau et de tout ce qui s’est écoulé par la suite. Aujourd’hui elle revenait sur ses pas dans l’espoir de renouer avec ce passé, demander asile et protection pour ainsi renaître et avancer.