Fyctia
La conscience révélée.
Tout à coup, j’aperçois à ma droite un groupe de personnes, hommes et femmes nues, scarifiés, ils sont poussés en avant par ces grosses créatures dotées de fouet métallique, armées de pointes pour déchirer leur chair, mais putain, je reconnais les autres créatures, celles sur quatre pattes, puissantes, mais effilées ressemblant à des félins, bâtis pour chasser. Ce sont les effrayantes Dantasques qui me pourchassaient dans le labyrinthe. Cette fois-ci, elles ne semblent pas me prêter attention avec leurs yeux inexpressifs dénués de pupilles et toujours cette horrible mâchoire bardée de longues dents effilées faite pour tuer. Leurs quatre pattes sont terminées par de terribles griffes acérées. Elles mordent et écharpent cruellement les pauvres martyres qui s’effondrent parfois au sol pour y être achevés. Je remarque qu’ils proviennent d’un immense monte-charge qu’un de ces êtres armés referme avec force, avant que la plate-forme ne reparte.
Je referme les yeux, je ne veux plus voir toute cette misère humaine, toute cette cruauté, même si tout cela n’existe pas et n’est que le produit de mon cerveau malade, de mon esprit tourmenté. Ma psychiatre m’a mise en garde. Je ne dois pas être impressionné par ce que je perçois, c’est comme un rêve éveillé, une terreur nocturne. Je refuse de glisser à nouveau dans une dépression. En moi, le désespoir est latent, mais parfois, il atteint des pics et là précisément, c’est le cas. Je ne suis pas croyante, toutes ces idées mises dans nos têtes, ne sont que des fadaises, il n’y a pas de Dieu rédempteur, pas plus que de vierge Marie. Elle était où, lorsque ce porc d’Émile me montait dessus, les nuits, pendant que sa femme dormait ? Putain qu’il était lourd, qu’il puait. Ce salop me faisait mal, et je priais, je priais, mais personne n’est venu, ni Dieu ni Vierge. Seule ma colère pour le hanter. Oh oui, je l’ai tellement souhaité, qu’il l’a fait.
Je ne sais ce qui l’a tué, mais son suicide a été salvateur, oh putain que j’ai ressenti du plaisir de le voir ce jour-là, pendu au bout d’une corde, attachée à la poutre de la grange. La lettre anonyme qu’il avait reçu le dénonçant de ses saloperies l’avait fait basculer dans la folie. D’abord la honte puis la panique, l’affolement pour glisser dans le désespoir et enfin, le plonger dans la folie. Interrompu dans mes souvenirs, je quitte instantanément ce lieu maudit, ce lieu d’horreur et je me retrouve sur une prairie à l’herbe noire, recouverte en partie de cendres. Au loin, une colline sur laquelle est érigé le manoir de l’autre fois, planté de deux tours pointues. J’entends subitement des paroles à voix basse qui me font sursauter.
— Oui, le désespoir puis la folie dans la panique, c’est abject, c’est glorifiant, tu as eu sa peau Rachel, tu n’as pas à avoir honte, aucune culpabilité ne doit t’habiter.
— Non aucune culpabilité ne devra être admise. Tu dois regarder la vérité en face. Ce gros porc n’a eu que ce qu’il méritait. Tu t’es défendue, car personne ne serait arrivé à ton secours.
— Cessez de me parler, je ne suis pas fière de lui avoir souhaité de tout mon cœur, de toute mon âme, de mourir dans la souffrance. Ce n’est pas bien, c’est mal.
— Que sais-tu de ce qui est bien ou mal ? Il était le mal, alors tu as tué le mal par le mal. Ce salop avait déjà agi ainsi avec d’autres petites filles avant toi. Il fallait que ça cesse Rachel. Tu aurais préféré qu’il continue sur toi puis sur les autres ?
— Non bien sûr, mais peut-être, qu’une autre méthode, une autre solution ?
— Ah très bien, c’est comme ça, alors regarde. Allez, ouvre les yeux et regarde le monstre.
Devant moi, l’image se découvre, j’assiste impuissante, aux ébats de mon ancien parent d’accueil, arracher la culotte d’une petite fille. C’est encore une enfant, elle a vécu avant moi chez les Romains, elle pleure, supplie le monstre de la laisser tranquille, de l’épargner.
— Je t’en prie, non Émile, pas ça, non, laisse-moi.
— Mais si, laisse-toi faire, c’est normal, tu dois m’obéir, tu auras des cadeaux, là, voilà tu es une gentille fille.
— Mais aïe ! Émile non, tu me fais mal, arrête.
Ce salop relève les deux jambes de la jeune Francine pendant qu’il fait son affaire avec un va et viens abject pour finir par un gémissement de plaisir bestial. Je ne peux pas voir la suite, je rage, je conspue, je serre le poing pour le frapper. Il est là si prêt, mais il ne me voit pas, il ne m’entend pas. Je crie aux sorcières qui hantent mon espace d’arrêter de me montrer de pareilles horreurs.
— Alors ? Penses-tu toujours que tu aurais dû agir différemment ? Il a créé ta douleur qui a engendré ta peur puis ta colère et sa panique pour aboutir au bout de cette corde. Si tu ne l’avais pas fait, une autre après la petite Francine et toi aurait dû subir la même chose. Ce monstre n’aurait jamais cessé, la lettre était rédemptrice ! Ah Ah Ah.
Les éclats de rire fusent de toute part, je ne les distingue pas encore tout à fait, mais elles commencent à prendre forme. Je vois la scène, il court, tout affolé, il est essoufflé de tant de peur. Je les vois, elles sont cinq, cinq femmes qui flottent, rampent, glissent le long de la toiture et de la suspente pour se réunir en une seule personne hideuse toute déformée par la colère, et c’est moi, oui c’est moi, défigurée de haine et de colère.
Le Émile me supplie, à genoux de l’épargner, mais je lui parle doucement à l’oreille. Alors il va chercher une corde qu’il lance par-dessus la poutre pour l’amarrer solidement, puis monter sur une barrière et se jeter dans le vide. Une grimace de douleur, une tentative de desserrer la corde, des jambes qui pédalent dans le vide. Sa salopette qui se tache entre les jambes, puis c’est fini.
— Ce n’est pas moi, c’est vous qui l’avez tué, en semant dans son esprit la peur et le désespoir. Et vous voulez me faire porter le chapeau. Tout ça ce sont des conneries. Je n’étais pas là ce jour-là. J’étais au pensionnat, ça, j’en suis sûre.
Les cinq formes hideuses éclatent de rire tout en se réunissant puis à nouveau en se dissociant. Elles se ressemblent tout en étant différentes, c’est bizarre. Je les perçois comme étant sournoises, malsaines, sarcastiques.
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Léoneplomb
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Rose Lb
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Jean-Marc-Nicolas.G
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Lyaminh
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chocotean
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Gottesmann Pascal
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