Fyctia
Chapitre 6 - Partie 2
Elle agitait maintenant l’arme dans tous les sens, sans savoir la manier, mais parvint tout de même à un résultat. Les lames de ce type, imprégnées de magie, pouvaient trancher les êtres immatériels comme s’ils étaient faits de chair et de sang. Nous n’en avions qu’une, logique…
Je parvins pour ma part à me débarrasser du dernier monstre qui écorchait mon flanc en projetant une bourrasque incandescente dans sa direction. Je remarquai au même moment qu’Auris était acculé par trois ennemis alors que les autres combattants restaient aux prises des leurs, de plus en plus épuisés et couverts d’entailles. Ils restaient déterminés mais ne tiendraient plus longtemps à ce rythme. La plupart d’entre eux titubaient et peinaient à soulever leurs épées ou utiliser leurs pouvoirs, leurs visages marqués par la douleur et l’atrocité du moment.
Gwen était à présent la cible des manifestations et elles ne tardèrent pas à la désarmer. Je me précipitai vers elle, esquivai un coup de griffe en glissant au sol et ramassai l’épée dans la foulée. Une fois mise en sécurité derrière moi, je commençai à faire danser ma lame avec précision, tranchant chaque monstre dans une chorégraphie macabre.
— Reste bien collée à moi ! intimai-je à la guérisseuse.
Tant que je sentais son corps contre le mien et qu’elle suivait mes déplacements, tout irait bien. Elle était la seule ici à pouvoir remettre tout le monde sur pieds. Elle était donc ma priorité, mais j’avais déjà la seconde en ligne de mire.
Je nous frayai donc un chemin jusqu’à Auris qui combattait encore vaillamment malgré les balafres qui barraient son torse et son visage, une épée enflammée à la main et un genou à terre. L’air tournoyait violemment autour de lui mais ne faisait que ralentir les apparitions. Quand l’une d’elles trouva une faille dans sa défense et s’y engouffra dans un cri inhumain, j’utilisai mon pouvoir et créai in extremis une barrière de feu et d’air tout autour de lui. Les Spectres s’écrasèrent contre celle-ci et se dissipèrent aussitôt, laissant Auris figé de surprise.
— Tu vas bien ? m’enquis-je rapidement, essoufflée.
— J’en sais rien. On s’occupera de ça plus tard ! répondit-il en reprenant ses esprits.
J’approuvai d’un hochement de tête, l’aidai à se remettre debout, puis nous repartîmes tous les trois dans la mêlée. Nous nous assurions que Gwen reste à l’abri entre nous, à défaut de pouvoir la cacher quelque part. Au bout de plusieurs longues minutes, le dernier être fantomatique fut éparpillé en une volute blanche par Emerik et Zoryn, puis le calme retomba lourdement sur le camp. La température avait également repris plusieurs degrés en un instant et nous nous regardions tous avec effarement, épuisés et ensanglantés.
— Est-ce qu’il y a des blessés graves ? demanda Gwen sans attendre.
Astor désigna un garde inanimé au sol à l’entrée d’une tente — celui qui avait accompagné la guérisseuse — puis Pax, allongé un peu plus loin. La guérisseuse se dirigea aussitôt vers eux pour les examiner, et je pinçai les lèvres en songeant qu’elle aurait eu bien besoin que quelqu’un s’occupe d’elle également. Malheureusement, elle ne pouvait pas utiliser son don sur elle-même. Mais moi, je pouvais la guérir. Excepté Auris et Gwen, je ne savais pas si quelqu’un avait remarqué mes prouesses. J’en doutais fort, vu le chaos durant l’attaque.
— Il est mort, annonça Gwen aux côtés du garde étendu.
Elle vérifia ensuite l’état de Pax. Il était encore en vie mais son état était critique et allait mobiliser beaucoup d’énergie. Elle ne pourrait pas s’en occuper sans aide.
— Auris, aide-moi à le porter dans une tente, ordonnai-je à mon ami. Les autres, vérifiez la gravité de vos blessures. Gwen nous soignera dans l’ordre.
Ce n’était clairement pas à moi de commander ici, mais comme la confusion régnait encore, les autres obéirent sans discuter. Ils avaient pour la plupart été attaqués par surprise et sans savoir à quoi ils avaient affaire. Seul Astor était au courant de la menace qui planait mais à mon avis, il n’avait pas réellement cru qu’elle existait. Moi non plus, du reste. Une nouvelle erreur de jugement qui n’était pas resté sans conséquence.
Une fois Pax installé sur une couchette, Gwen commença à diffuser son don en lui. Je posai pour ma part une main sur l’épaule de la guérisseuse et me concentrai pour copier son pouvoir. Ses plaies se refermèrent plus rapidement que celles de Pax, mais je ne savais pas si c’était parce qu’elles étaient plus superficielles ou si la puissance de ma magie était supérieure à la sienne.
— Tu m’expliques ? souffla Auris près de moi, son ton calme trahissant sa contrariété.
J’acquiesçai sans le regarder.
— Il n’y a pas grand-chose à dire. Tu as vu ce que je pouvais faire. J’ai copié les dons présents dans le camp et les ai utilisés. Comme maintenant.
Il resta silencieux un instant sans que Gwen ne se mêle à la discussion.
— Tu connais cette capacité depuis longtemps ?
— Quelques années…
Il me fixa intensément, la peine et l’incompréhension se lisant sur son visage. Moi, je me sentais de plus en plus mal.
— Pourquoi ne m’en as-tu jamais parlé ?
— Je… Je ne sais pas… C’est compliqué, je ne voulais pas…
— Tu n’avais pas confiance en moi, me coupa-t-il, et ce n’était pas une question.
Je soupirai.
— Auris, j’ai confiance en toi, affirmai-je sincèrement. J’avais peur d’en parler et d’être encore plus bizarre que je ne le suis déjà. Tu aurais pu hurler au monstre.
Mon trait d’humour ne le fit pas rire.
— Tu sais très bien que c’est faux. C’est pour ça que j’ai survécu dans la forêt ?
Je secouai la tête.
— Non. Ça c’est… récent. Je n’ai pas d’explication.
Il m’observa durement quelques instants encore mais sembla ravaler sa colère car son regard s’adoucit. Il caressa ensuite furtivement ma joue, un contact bref mais qui me fit vibrer.
— Tu peux me faire confiance, tu es tout sauf un monstre, Nyx. Tu es encore plus exceptionnelle que je le pensais et ton secret sera bien gardé.
Mon cœur se serra stupidement dans ma poitrine et j’entrouvris la bouche, sans toutefois pouvoir prononcer un mot.
— Pax va se réveiller d’ici quelques minutes, nous informa Gwen. Je vous conseille de poursuivre à l’abri des oreilles indiscrètes un peu plus tard. Maintenant, pose tes fesses que je puisse te soigner. Je suis guérie, tu peux arrêter de gaspiller ton énergie. Tu l’utiliseras sur ton ami pendant que je m’occuperai des autres.
Elle me lança un regard entendu puis ajouta à voix basse :
— Tu sais, Nyx, je ne suis pas stupide, je n’ai jamais cru aux bobards de Kester.
Je souris faiblement et obtempérai sans discuter. Je ne savais pas précisément quand la situation avait commencé à m’échapper. Probablement ce fameux jour, dans la forêt, mais malgré tout… Je ne regrettais rien. Accorder ma confiance n’était pas naturel chez moi et j’y étais maintenant forcée, mais c’était peut-être un mal pour un bien.
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