Fyctia
16. Pancakes 1/4
- Samedi 02 décembre — CASSIE
Une heure déjà que j’ai les yeux grands ouverts sur mon plafond, j’observe les étoiles phosphorescentes que j’y ai collées avec l’aide d’Eliott et Cole quand nous avons emménagé dans l’appartement. D’ailleurs, je crois qu’ils ne veulent plus entendre parler de ces satanées étoiles depuis. Moi, ça me fait juste rire. Enfin… d’habitude, parce que là, je les fixe, les compte, me demande si les événements de la veille sont bien réels et me souviens des exclamations d’Ashley quand j’ai crocheté son bras et que je l’ai embarqué à ma suite.
« Qu’est-ce que tu fais, putain ? Je m’éclate-là ! S’il te plaît, Stella, laisse-moi m’amuser encore un peu. Tu n’es pas cool ! Au moins, elle, elle n’a pas peur de se coller à moi. Oups, je ne me sens pas très bien. Pourquoi tu as deux nez ? Des si petits nez tout mignons que j’ai envie de croquer. Eh ! Mais tu m’attires où comme ça ? Je ne veux pas partir ! Et mon verre ? Tu en as fait quoi ? Je te préviens, je ne bouge plus d’ici tant que tu ne m’auras pas répondu, avait-il conclus en plantant ses pieds dans le sol. »
Merde, Ash, tu es vraiment un gamin quand tu bois. Je souffle en passant une main sur ma figure. Ah ! Et dire qu’il est sur notre canapé ! Qu’est-ce qu’il m’a pris, sérieux ? Je n’ai pas réfléchi, et agi sans me poser de questions. Cette fille avait son cul et tout son corps appuyé sur lui. Je ne peux empêcher un gloussement de m’échapper quand je repense au moment où le corps d’Ashley s’est séparé de cette sangsue.
C’était épique ! La sulfureuse Anna a poussé un petit cri surpris avant d’atterrir sur le sol. Ash ne l’a même pas remarqué. Par contre, Éric qui m’avait suivi a eu du mal à en croire ses yeux. Il aurait pourtant dû se douter que je ne blaguais pas quand j’ai annoncé vouloir récupérer Ash. Et l’emmener chez moi par la même occasion. Une superbe idée encore une fois ! Magnifique.
D’ailleurs, si je me souviens bien, j’ai été dans l’obligation de faire demi-tour devant la porte de sortie à cause des supplications de Crève-cœur. Bordel ! Tout ça pour quoi ? Remonter à l’étage et prendre Rodolf ! Non, mais Rodolf ! Comment m’a-t-il dit ça pour que je cède ?
« Cassiiiiie ! Je ne veux pas laisser mon ami tout seul. Le pauvre, il est avec ses copines les bouteilles mais elles ne vont pas lui parler. Moi, je veux lui parler.
— Qui ? ai-je demandé sceptique.
— Beh… RODOLF ! Mon renne, mon gentil petit renne au nez rouge. Il va être si triste sans moi. S’il te plaiiiiit, on ne doit pas le laisser de côté ! Tu as promis. »
Sérieusement !
Pas croyable et pourtant ça lui ressemble. En tous cas, à ce moment précis, il m’a fait penser à l’adolescent que j’ai connu. Fragile, torturé et surtout enfantin quand il a un coup dans le nez. Donc… nous sommes remontés et sous le rire puissant du barman, Joe, nous avons pris le calendrier de l’avent avec nous. Il doit encore être sur l’îlot central de la cuisine à l’heure actuelle. Enfin, si mon cher Crève-cœur n’y a pas touché.
D’ailleurs, si je tends l’oreille, je perçois déjà des mouvements dans le couloir. Surement Eliott. C’est toujours le premier à se lever, ou presque. Et je ne crois pas me tromper si je dis que dans moins d’une seconde il va entrer dans ma chambre avec un air de comploteur. Je me redresse, m’accoude sur le dessus de la couette et écoute. D’abord les bruits de la salle de bain, puis ses pas qui remontent le couloir. Un, deux…
— Tu es réveillée ?
— Trois !
— Quoi ? Non mais je rêve ! Tu m’attendais ?
— Oui. Tu veux un rapport ? Il n’est pas dans mon lit, c’est déjà un bon point, non ? demandé-je en l’invitant à s’asseoir près de moi.
— Ça, j’avais remarqué ! Il est étalé dans une posture peu confortable dans notre canapé. Tu aurais pu le lui déplier quand même, histoire qu’il puisse se reposer convenablement.
Je ris. Non, il ne méritait pas un tel privilège. Surtout qu’il m’a cherchée ! Pourtant, j’avais prévu d’être gentille avec lui. Je l’ai traîné derrière moi, l’ai poussé dans les escaliers pour qu’il arrive à mettre un pied devant l’autre. Avant de lui ouvrir la porte et de le faire entrer le premier dans la coloc. Grave erreur soit dite en passant. D’autant plus qu’il a tenté de s’enfuir à l’instant où j’ai allumé la lumière.
« Non ! Pas ça ! Le monde des lutins, c’est trop. Je veux partir. Laisse-moi passer ! Stella… je n’aime pas Noël ! Merde ! C’est quoi ça ? Des guirlandes ? Des lumières qui dansent partout, des paillettes, des chaussettes ! Mais non ! LAISSE-MOI PARTIR !
— Arrête, tu veux.
Je ferme la porte à double tour avant de suspendre les clés et de pivoter vers le visage d’Ashley affolé. A quoi il joue ? Il déteste vraiment Noël ? A ce point ? Je penche la tête pour l’observer. Oui, apparemment. Sinon, je n’expliquerais pas les larmes qui viennent perler dans ses yeux. Merde, ce type aura ma peau. Mais je ne me démonte pas. L’aide à retirer sa veste et le pousse vers la cuisine. Un bon verre d’eau lui fera du bien. Ensuite, je l’installerai sur le sofa.
Mais il me laisse à peine le temps d’aller lui chercher un oreiller et une couette que je le retrouve planté devant mon sapin, les bras croisés et l’air renfrogné. Qu’est-ce qu’il a encore ? Je m’approche de lui, silencieuse, attends de comprendre ce qu’il trafique. Puis, son corps me cachant ce qui se trouve face à Ash, je le contourne et ne peut qu’hurler :
— Ash ! TU TE FOUS DE MOI ! Putain… tu sais combien de temps on a mis pour accrocher ces étoiles sur le sapin ? Donne-les-moi !
— Nope. Elles sont trop brillantes. J’en ai marre de la lumière. Tout ça, c’est moche ! déclare-t-il en faisant des grands gestes vers le reste de la pièce. »
Oui, il a bien mérité de dormir, plié en deux.
Je glousse sous le regard interrogateur d’Eliott mais je ne prends pas la peine de lui expliquer. Au fond, j’ai envie de garder ses éléments pour moi. Un peu comme de précieux moments que j’attendais de vivre depuis longtemps. Bien que j’aurais largement préférer que Crève-cœur ne soit pas sous l’influence de l’alcool. Mais au moins, il s’est finalement calmé et m’a laissé le pousser sur le canapé.
— Tu sais qu’il en a perdu sa chemise ? C’est toi qui en es à l’origine ?
— Quoi ? Non ! hurlé-je en rougissant malgré moi.
— Bon. Tu viens ? Je crois que tu en as presque oublié qu’on est dimanche. Tu sais ce que ça signifie, me dit mon meilleur ami en souriant tel un enfant avant de se lever et de s’enfuir hors de ma chambre.
J’ai juste le temps d’acquiescer et de jeter la couette loin de moi que déjà le corps d’Eliott s’efface derrière ma porte. Décidément, ils lisent tous en moi comme dans un livre ouvert. Je soupire, sort mes jambes du lit et me force à lever mon corps hors de ce cocon que représente mon lit. Et puis, El a raison, dimanche c’est sacré ! Pendant une minute encore j’hésite, me demande si Ashley est encore endormi dans le salon ou si le bruit de mes deux colocataires a fini par le faire émerger.
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