Fyctia
14. Première case 4/4
Qu’est-ce qu’il insinue par-là ? Sa question ne m’annonce rien qui vaille et pourtant j’ai cette envie folle de me prendre au jeu. Après tout qu’est-ce que je risque ? Rien ! Ou… non, il n’oserait pas quand même ? Bien que ce serait son genre d’avaler tout rond le chocolat sans m’en laisser un seul morceau. Le tout alors qu’il a eu la gentillesse de me demander si j’en voulais un bout.
Merde, Cassie, tu sais qu’il y a une autre gourmandise que tu voudrais goûter. Mais pourquoi faut-il toujours que mon démon intérieur se manifeste dans ce style de situation ? Je grogne et le son rauque qui m’échappe semble attirer le regard affamé d’Ashley. Ses émeraudes analysent mes lèvres, lui faisant mordre les siennes avant qu’une étincelle traverse à nouveau ses billes vertes.
Sa main libre glisse dans ses cheveux. Cette fois, elle ne les tire pas, les ramenant seulement en arrière pour dégager son front. Les nuances de blé de ses mèches sont éclairées par les guirlandes lumineuses qui nous entourent faisant danser sur sa tête de minuscules orbes multicolores. Des étoiles scintillantes qui tentent d’éclairer un soleil en sommeil. Cette idée me fait sourire, et mon cœur lui se gonfle comme porté par un bonheur du passé.
Et le pire, c’est que nous deux ensembles, les yeux dans les yeux, se cherchant, se défiant, ne me donnent que plus envie de me rapprocher de lui. De son corps, de sa présence, de ses lèvres charnues qui m’appellent. Cette bouche dont je suis certaine de pouvoir me souvenir du goût. Le doux goût de la tentation. A la fois amer et sucré. D’ailleurs, les frissons qui parcourent mes doigts quand ils s’avancent à nouveau vers le poignet de Crève-cœur sont la preuve que mon être tout entier le désir.
— Alors petite étoile, tu veux la moitié de cette douceur ? m’interroge encore Ashley avec un sourire rieur.
— Bien sûr ! Qu’est-ce que tu crois ? Que je suis une spectatrice ? Hors de question ! Je ne suis pas venue ici pour rien !
— Pour rien, tu dis ? Et moi alors ?
— Arrête, Ashley, tu m’as très bien comprise.
— Je n’en suis pas certain. Tu ne voudrais pas m’expliquer pourquoi tu es là ? Ah oui ! C’est vrai ! Tu as cru pouvoir me piéger avec Rodolf. Mais tu dois savoir que nous sommes devenus de super-amis ! Nous nous entendons à merveille. Regarde son nez est rouge tellement il s’éclate avec moi.
Non mais je rêve ! Il retourne carrément le calendrier contre moi. Et en plus, il s’éclate avec le renne qui y est dessiné. Moi qui pensais qu’il le détesterait, c’est loupé. J’ai même l’impression qu’il se fout de moi sans s’en cacher. Et le voilà qui discute avec Rodolf sous témoins, profitant de mon silence pour me coller la honte. C’est une blague en fait ! Je claque des doigts devant son nez, plaque ma cuisse à la sienne, pose mes mains sur son torse, tends ma bouche vers son oreille et souffle des mots qui, je le sais, le feront réagir.
— Ne joue pas à ce petit jeu avec moi, Crève-cœur. Je suis bien plus douée de ma langue que toi. Je me souviens encore de l’effet qu’elle te faisait quand elle longeait ton cou pour mordre le lobe de ton oreille. Pour pouvoir ensuite, mieux profiter de la descente pour te tirer un grognement de plaisir. Avant de guider mes lèvres vers les tiennes pour les capturer.
— Méfie-toi, Stella. Je suis meilleur que toi dans ce domaine. J’ai eu onze années pour m’entrainer.
— Super ! Je suis ravie pour toi ! craché-je en tentant de m’éloigner de lui, refroidis par sa remarque.
— Alors quoi ? Tu abandonnes déjà ? Mais dis-moi. Tu ne voulais pas un morceau de ce foutu sapin en chocolat ? Si ! Oh… C’est dommage. Il va falloir que tu viennes le chercher !
Avant que je l’en empêche, il bloque la gourmandise entre ses dents et tourne son visage vers le mien. Nous ne sommes plus qu’à quelques millimètres l’un de l’autre. Le bout de mon nez caresse le sien, mes lèvres sentent la pression du sapin miniature sur elles. Ses pupilles brillantes de lubricité sont perdues dans les miennes, me mettant au défi de m’enfuir. Mais, je suis trop tentée. Trop têtue aussi et je ne le laisserais pas gagner cette partie. Pas cette fois, pas alors que des fourmillements s’emparent de mon bas-ventre et que mon cœur me hurle de plonger tête la première.
Alors dans un grognement, j’entrouvre les lèvres. Me les humecte, hésite puis… c’est le grand saut. Mes dents capturent le chocolat est croque dans le morceau pour en voler la moitié à Ashley. Seulement, j’en veux plus. Plus que ce léger contact, ce doux effleurement entre nos bouches. Alors… je profite du moment de flottement pour avaler le bout microscopique de chocolat, reprendre ma respiration, fermer les yeux et foncer sur lui sous le son chaud de sa voix.
— Putain…
Putain, oui !
Il m’avait tant manqué… Mes lèvres s’emparent des siennes, je me délecte de leur douceur avant de lécher du bout de ma langue les réminiscences du chocolat que nous venons de partager. Ce simple geste sort Ashley de sa torpeur et l’une de ses mains vient se placer derrière ma nuque. Exerçant ainsi une pression plus forte sur ma bouche qui me tire un gémissement que seuls nous entendons.
Son qui semble animer le mâle qui pose sa main encore libre sur ma taille pour ramener mon corps vers lui. Il me maintient dans une bulle, notre bulle. Et vient de sa langue répéter les gestes que j’ai effectué avant lui. Menant à la rencontre de nos deux membres. Ses lèvres s’entrouvrent pour mieux capturer les miennes, ma langue s’enroule autour de la sienne et mon corps s’électrise de lui-même sous cette connexion qui s’établit entre nous.
Des picotements prennent naissance dans le bas de ma nuque pour poursuivre leur chemin le long de mon dos et rejoindre la chaleur de la main d’Ash qui exerce une pression sur ma hanche. Nos bouches se reconnaissent, se retrouvent, s’accaparent l’une de l’autre. Et avant que j’en prenne conscience, je me surprends à mordiller cette lèvre inférieure qu'il a l’habitude de malmener quand il est angoissé.
— Merde… Stella. Je…
Je ne lui laisse pas le temps de parler. Le désir est trop fort et les souvenirs qui me percutent le sont tout autant. Je navigue entre notre rencontre, notre premier baiser, nos premiers rendez-vous, nos soirées films au sous-sol, nos sorties, nos chamailleries et notre première fois. Plus il m’arrime de ses lèvres au goût sucré, plus je m’enivre. J’aimerais que cet instant ne s’arrête jamais. Pourtant… cette extase intense se brise l’instant d’après.
« Vous ne serez que le premier de ses jouets. Un trou dans lequel mon fils peut se vider. Une vulgaire poupée gonflable vivante qu’il a jetée quand je lui en ai donné l’ordre. Vous n’êtes rien de plus qu’une tâche qui part au lavage. Une fille remplaçable. Alors quoi ? Vous voulez un chèque pour le service rendu ? Très bien. Je mets l’ordre à quel nom ? »
— Je… Non. STOP ! hurlé avant de m'enfuir en marmonnant une phrase incompréhensible même pour moi.
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