Sandra MALMERA 24 jours, un chocolat 14. Première case 1/4

14. Première case 1/4

Samedi 1er décembreASHLEY


Trente minutes, c’est le temps qu’il a fallu à mes deux compères pour réussir à me dérider. Quinze de plus pour que nous avalions ensemble une bonne bouteille de bière et qu’Éric s’invite à ma soirée sans que je ne sache vraiment comment. Puis encore dix de plus pour qu’il arrive à convaincre Vince de nous accompagner. Comme si j’avais besoin d’eux pour un rendez-vous avec une femme.


Est-ce que j’ai besoin d’eux ?

Pour un rendez-vous avec Stella ?

Oui ! Clairement… mais je préfère ne rien leur dire et leur faire croire que l’idée de s’incruster à ma soirée me dérange. Alors je râle, grogne, ronchonne et soupire autant de fois qu’il m’est possible de le faire. Et surtout aussi longtemps qu’Éric continuera à appeler Stella, petite sirène. Ce qui risque de durer infiniment puisqu’il reprend la parole tout en incluant la femme de mes pensées à sa réplique :

— Tu as donné quelle heure à la petite sirène ?

— Vingt heures, grommelé-je en me tirant les cheveux en arrière.

— Ok. Donc, tu es en retard. Enfin… il te reste exactement cinq petits tours d’horloge avant de l’être. Je serais toi, je me brosserais les dents et je filerais.

— Pardon ?


Le gaffeur ricane alors que je m’affole. Je saute du canapé, bouscule Vince qui revient des toilettes et je fonce dans la salle de bain. Un bon rinçage de bouche ne fera pas de mal ! Sur le rebord du lavabo, j’attrape la montre ancienne de mon père et la place à mon poignet. Ce simple objet me rassure, me donne cette impulsion et cette confiance en moi qui me manque tant parfois. Et ce soir, je vais avoir besoin d’un coup de pouce, même infime pour assumer ce rendez-vous hebdomadaire forcé.


Parce que c’est ce que tu as fait Ash, tu as piégé Stella. Me le rappeler me fait à la fois sourire et grincer des dents. Pourtant quand je croise mon reflet dans le miroir, juste avant de quitter la pièce, je remarque une lueur de malice que je n’avais plus vu depuis plusieurs années. Une étincelle de doré au fond de ce vert profond qui habille mes yeux. Merde ! Cette femme, je l’ai dans la peau ! Littéralement…


— Ash ! Bouge ton cul ! Tu as dépassé l’heure ! me hure Éric à travers la porte.

— J’arrive ! Tu as vu mon portable ?

— Sur la table, avec Rodolf. Attrape-le et on y va ! Après il nous dira qu’il peut y aller seul. Je te jure, c’est pire qu’un gosse.


Il chuchote sa dernière phrase à Vince et quand je sors de la salle de bain, je remarque leurs regards curieux sur moi. Mais je me contente de hausser les épaules et lever les mains en l’air pour leur signifier mon innocence. Enfin… jusqu’au moment où je tombe sur l’écran de mon téléphone qui affiche en même temps qu’un message : l’heure ! Vingt heures et deux minutes ! Je suis foutu !


Je me racle la gorge, rage sur mon habitude à toujours arriver en retard à mes rendez-vous, et attrape le calendrier en même temps que je glisse mon portable dans la poche arrière de mon jean. Puis, je finis par rejoindre mes amis qui patientent devant la porte, les bras croisés et les sourcils froncés. Quoi ? Encore ? Mais rien, ils se contentent de rire, le tout en me tapant tous les deux l’épaule. Un à gauche et l’autre à droite.


— Je conduis. Tu crois qu’elle t’aura attendu ?

— Elle le faisait. Avant, répondé-je à Vince en hochant la tête et leur emboîtant le pas.


Cette fois, aucun d’eux ne rit. Ils s’examinent le temps d’un instant et me poussent vers l’avant. Nous sommes vraiment en retard. D’ailleurs, ce n’est pas Rodolf calé sous mon bras qui nous dira le contraire ni mon téléphone qui signale sa présence sous plusieurs bips de réception de messages. Merde ! C’est elle ? Les fesses posées dans le siège de la voiture de Vince, je gigote pour le dégager de la poche dans laquelle je l’ai fourré.


— Putain ! Merde ! Ce n’est pas vrai ! Dites-moi que je rêve ! Non mais regardez-moi ça ! hurlé-je en tournant mon écran vers mon chauffeur et son copilote.

— C’est Anna ? La petite sirène est avec Anna ? Mec, tu es carrément enlisé dans la bouse ! Tu as baisé combien de fois avec Anna ? Trois ? Quatre ? Si Cassie l’apprend, elle va s’énerver et tu pourras dire adieu à ton magnifique challenge. Surtout qu’il vient juste de commencer. Alors dis-moi, j’espère que je suis inscrit sur ton testament, parce que je ne dirais pas non à ton loft et je suis sûr que Vince serait ravi de prendre la suite de l’entreprise.

— ÉRIC !


Il joue des sourcils d’un air enfantin, comme pour se dédouaner de ce qu’il avance et dans un sens, il a raison. Je le sais. Si Anna fait amie-amie avec Stella, je risque d’y perdre la vie. Et ce n’est pas qu’une façon de parler ! Merde, pourriture de queutard ! Je l’aurais bien cherché ! Cette fois, je balise. Et mes cheveux en pâtissent, encore. Quant à ma lèvre, elle s’ajoute au tableau, mes dents venant en arracher la peau.


Mes compères ne disent pas un mot, et notre chauffeur s’active sur la route pour nous permettre d’arriver au plus vite. Le problème ? Nous sommes samedi soir et la réputation du Loch Ness n’est plus à faire. Surtout quand les portes de la boite ouvrent dès vingt-deux heures et qu’elle se remplit en moins de trente minutes. Alors autant le dire, être parmi les clients du bar en début de soirée est une aubaine.


Un avantage qui risque de nous passer sous le nez si nous ne nous pointons pas rapidement là-bas. Et surtout une soirée qui risque de se transformer en cauchemar si mes vingt minutes de retard font disparaître Stella du lieu. Ou encore si… non, Anna n’est pas si futée. Elle va seulement penser que Cassie est une conquête de plus pour le coureur de jupons que je suis. Oui! Jouons sur la chance, croisons les doigts. Peut-être que pour une fois, je pourrais compter sur ma bonne étoile.


Après tout, elle est revenue dans ma vie. Alors pourquoi ne pourrait-elle amener avec elle de la lumière ? Quoique… en y réfléchissant, je ne peux que tirer plus fort sur mes cheveux. Ash, tu es un idiot ! Cette étoile, elle est en mille morceau par ma faute et j’arrive encore à garder espoir quant à sa présence dans ma vie. Elle travaille pour moi, et quoi ? Ça devrait tout changer ? Réparer le passé ? Réparer les actes de ma mère ? Parce que je le sais, cette vipère a agi dans mon dos, elle l’a trainé dans la boue, pourtant…


Rodolf à ma droite est la preuve que l’espoir fait vivre. Qu’une étincelle a survécu et qu’elle m’offre une opportunité. A moins que je ne sois l’une de ses missions que Stella avait à cœur de mener. Comme la fois où elle a trouvé un chien errant dans la rue et qu’elle a parcouru toutes les ruelles aux alentours de la notre pour en retrouver le propriétaire. Combien de temps cela lui avait pris déjà ? Deux semaines !




Tu as aimé ce chapitre ?

1 commentaire

Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.