Sandra MALMERA 24 jours, un chocolat 11. Contrecoup 2/3

11. Contrecoup 2/3

Sa voix criarde m’horripile pourtant je félicite Cassie pour son ingéniosité. Cette fille m’épatera toujours pour sa créativité. Mais moi, comme un imbécile, j’ai décroché laissant cette vipère interférer dans mon quotidien… Elle n’en a pas assez de ses visites en début de mois, pour percevoir la pension que mon père a exigé que je lui reverse chaque mois, dans son testament ? Il faut en plus qu’elle me harcèle pour savoir si je vais assister à ses galas de bienséances !

D’ailleurs, lequel est-il aujourd’hui ?


— Avec Marie-Pierre, nous avons convenu d’une entrevue pour que vous vous rencontriez sa plus jeune fille et toi. C’est une bonne famille, et Catherine a une éducation des plus stricte, je suis sûre qu’elle va te plaire.


Même pas en rêve ! Je lui ai déjà dit mille fois que ses coincées du cul de bourgeoises pouvaient rester chez elles. Il faut absolument que je coupe court à cette conversation sinon je ne vais pas avoir d’autre choix que d’accepter, et supporter leurs manières, c’est inenvisageable ! Non, merci! J’ai déjà donné et ça pendant des années. Alors si Jack m’a aidé à sortir des griffes de cette vipère, du moins autant qu’il a pu ce n’est pas pour y replonger.

Non ! J’ai mieux à faire !


— Mère, je dois vous laisser. Le graphiste semble avoir un souci avec le dossier. Je vous rappellerais.

— Tu le dis mais ne le fais jamais ! s’insurge-t-elle alors que d’une pression sur mon écran je mets fin à cette conversation inutile.


Décidément… cette journée n’est pas pour moi. Le pantalon à moitié monté, je grogne et m’acharne sur ma chemise. Mes bras sont coincés et mes jambes enfermées dans le tissu. Je me contorsionne pour tenter de m’habiller en quatrième vitesse mais la scène se transforme en échec quand mon corps bascule en avant et que mon nez vient percuter le sol. Merde ! Il ne manquait plus que ça !


Me relevant tant bien que mal, je finis de m’habiller et fonce vers la sortie, attrapant au passage un beignet laissé par Éric sur la table du salon. Il est un peu sec, mais ça fera l’affaire. Un manteau, un bonnet, une écharpe et je peux filer. Trois étages me séparent de la rue, trois étages pour me préparer à affronter le vent frais et surtout à faire face aux décorations, aux sourires joyeux et aux musiques ahurissantes de Noël ! Foutues fêtes qui se rapprochent à grands pas


Et dire qu’avant, j’adorais Noël… et mon anniversaire. A présent, j’en ai horreur, trop hanté par des souvenirs douloureux pour vouloir y faire face. Le seul point positif à cette période ? En fait, je ne suis pas certain d’en trouver un seul ! Ou… peut-être. Non. Rien. Enfin, je me dis que cette année pourrait me réserver des surprises, après tout elle a balancé une étoile filante à pleine vitesse sur moi.

Une étoile qui me perturbe, m’obsède et m’envoûte.


*

CASSIE


Cinq appels !

Il a fallu que cette vipère insiste cinq fois pour que je lui conseille d’appeler son fils sur sa ligne personnelle. Et encore, les mots sont sortis sous un calme dont je ne me serais jamais cru capable. Cette femme est vicieuse, pernicieuse et surtout elle a torturé Ash de la pire des manières. Utilisant son identité même pour le détruire à petit feu, instiller en lui l’idée qu’il n’aurait pas dû naître en tant qu'homme.


L’évocation de cette idée amorce un frisson désagréable de ma nuque au bas de mon dos. J’ai du mal à me dire qu’en revenant dans le quotidien d’Ashley, j’ai de fortes chances de recroiser Jeanne De Cœur. Drôle de nom pour une femme qui en est dépourvu. D’ailleurs, je me demande comment Richard Terence, lui qui était si doux avec son fils, a pu aimer cette vipère. Mais je n’aurais jamais de réponse. Tout comme Ash qui ne parvient apparemment pas à sortir des griffes acérées de sa mère.


Je grogne sous le tintement du téléphone, il n’arrête pas de sonner depuis que je suis arrivée et l’absence d’Ash n’arrange pas mon affaire. Surtout quand ça fait plus de deux heures que j’essaie de réorganiser tout le planning pour nous éviter le moindre retard. Appelant même le graphiste pour régler moi-même les derniers détails du dossier Fabre qui se conclut ce soir. Je décroche en soufflant et levant les yeux au ciel.


— Toujours pas, non. Je peux peut-être aider ? demandé-je au graphiste qui semble à bout de nerfs.

— Oui. Non. Écoutez, vous êtes bien mignonne mais la personne que le directeur cherche est impossible à trouver et le musée n’arrête pas de me harceler pour cette histoire d’œuvre à deux nuances. Je ne sais plus où fouiller ni qui appeler. Et vous ne comprenez surement pas de quoi je parle puisque vous êtes ici depuis lundi seulement.

— En effet. Mais si vous m’expliquez, je pourrais dans la mesure du possible vous aider. Qui cherche-t-il et pourquoi ?

— Si vous voulez. Mais je ne vois pas comment vous pourriez être utile. Cet artiste est un vrai fantôme. Bon. Par où commencer ? Je ne sais pas d’où lui vient cette obsession mais notre cher directeur est passionné par ces peintures qui surgissent de nulle part, ici et là, sur les murs de la ville. Vous avez dû les voir ? Ce sont des dessins aux traits fins colorés, vifs qui la nuit venue se transforment en un mélange de tracés luminescents…


Je ne l’écoute plus. Ces dessins, je les connais. Mes doigts en tremblent, mon souffle se coupe et j’essaie tant bien que mal de reprendre possession de mes moyens. Impossible ! Et pourtant… Quand le monologue du graphiste se termine, je ne peux que me rendre à l’évidence. Ash me cherche, il me cherchait, j’ai toujours été dans sa vie sans même qu’il n’en soit conscient.

Et je ne peux pas m’empêcher de prendre la parole juste pour m’assurer que le graphiste parle bien des œuvres auxquelles je pense. Des tracés à la peinture en bombe, des reliefs étudiés pour rendre la nuit plus lumineuse, des contours qui font des ombres un autre monde, un univers où une étincelle devient merveille. Mince… s’il découvre qui est derrière tout ça, alors il saura que ces peintures, elles sont… Oublies, Cass !


— Celles avec une signature accompagnée d’une étoile ? interrogé-je le graphiste encore à l’autre bout du fil.

— Oui ! C’est ça ! Vous connaissez ?

— Non. Désolée.


Je mens. C’est la seule solution. Ash ne doit pas savoir. Déçu, le graphiste me demande une dernière faveur, celle d’informer Ashley qu’il arrête les recherches. Celles-ci se trouvant toujours face à un mur. Un mur de briques qu’il n’arrive pas à percer quoiqu’il fasse et surtout quoiqu’il propose. Selon lui, l’artiste ne veut pas être connu et le seul élément qu’il a su trouver, c’est que c’est lui qui prend contact avec ses clients et non le contraire.

Et sur ce point, il a raison.

Merde ! Je suis foutue ! Totalement…


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