Sandra MALMERA 24 jours, un chocolat 10. Réunion de crise 1/4

10. Réunion de crise 1/4

Jeudi 29 novembre ASHLEY


Il n’a fallu que peu de temps à Éric pour apparaître devant le bureau de mon assistante. Sa respiration haletante et ses pas lourds sur le sol m’ont tout de suite fait lever la tête de mon écran. Pendant quelques instants, je les ai observés lui et Cassie. Elle, à la fois étonnée de sa présence et agacée par ses paroles et lui, se penchant vers Stella comme pour lui murmurer un secret.


D’ailleurs, je n’ai pas attendu d’en voir plus pour sauter de mon fauteuil et filé en dehors de ma prison de verre. M’imposant au milieu de leur discussion trop peureux de découvrir les confessions que mon gaffeur d’ami pourrait faire à Cassie. Surtout que le regard confus de la belle brune m’a clairement annoncé que j’interrompais Éric au pire des moments. Enfin… pour elle, mais pour moi, je suis presque sûr d’avoir sauvé les meubles.


— Je dérange peut-être ? n’ai-je pu m’empêcher de demander quand mon ami à tourner son visage vers moi.

— Non, du tout.


Sa réponse a été trop rapide, pourtant je n’ai rien ajouté. Ni lui ni Stella n’ont eu l’air de vouloir ouvrir la bouche. Surtout elle, qui est vite retournée à ses occupations. Ses doigts frappant les touches de son clavier de manière effrénée, rapide et rageuse. Le message fut clair, bien que j’aie tout de même vu le temps d’une seconde un sourire se glisser sur ses lèvres alors qu’Éric posé sa main dans mon dos pour nous amener tous deux vers mon bureau.


Décidément celui-là, je ne saurais pas dire s’il est mon allié ou un complice de cette étoile. Un sacré traitre qui s’est plié en deux tant il a ri. De la situation, mais aussi et surtout de cette « coïncidence » qui a mené Cassie à être ma nouvelle assistante. Mes sourcils encore froncés de les avoir vu ensemble n’ont fait qu’attiser le degré d’intensité des moqueries d’Éric.


Il s’est lâché, passant de la vulgaire remarque à la question qui fâche :

— Tu n’as même pas reconnu la seule fille dont tu as été amoureux ? Sérieux, tu as de la merde dans les yeux ? Je n’aurais jamais cru rencontrer un jour, la fameuse Stella. Le pire, c’était de te voir dans tous tes états pour cette jeune femme avant même de comprendre qui elle est. Et maintenant que tu sais, j’ai l’impression que ça ne fait qu’amorcer un dilemme. Alors dis-moi qu’est-ce que tu lui as fait cette fois ?


Sa tirade se concluant ainsi sur la question fatidique, l’interrogation à laquelle je n’ai pas de réponse. Parce qu’aujourd’hui, je n’ai rien fait. Rien. Alors pourquoi une lame se plante dans mon cœur ? Pourquoi je ressens ce vide intense m’engloutir quand je repense à cette larme que Stella a essuyée rageusement ce matin ? Parce que si elle croit l’avoir cachée, elle se trompe. Cette trace humide sur sa joue, je l’ai aperçue, elle m’a percuté en plein cœur. Et elle est la preuve qu’un souvenir douloureux, un souvenir de notre passé commun a atteint son âme si rayonnante autrefois.


Merde ! Quelle heure il est ? Dix-huit heures trente et plus personne à part moi n’occupe l’étage à présent. D’ailleurs, alors que j’enfile mon écharpe autour de mon cou, je me perds à chercher Cassie. A travers la paroi de verre, j’ai pris l’habitude de trouver sa tête brune concentrée sur l’écran de son ordinateur, la voir enrouler l’une de ses mèches si douces autour de son doigt, et tapoter de ses ongles le dessus de son bureau en bois. Son nez plissé alors qu’elle est perdue dans le lointain de ses pensées.


Sauf qu’à cette heure-là, elle n’est plus là. Je le sais. Elle a quitté son bureau depuis une demi-heure. Son sourire avait d’ailleurs repris sa place sur ses lèvres, m’arrachant au passage un soupir rassuré. Son menton comme toujours caché dans le tissu épais de son écharpe, un drapé crème que je connais pour l’avoir vu avec ce soir-là… Dans un reniflement, je traverse le couloir me menant à l’ascenseur avec pour seul compagnon le silence.


Pendant un instant, alors que mon doigt presse le bouton d’appel de la cabine métallique, j’imagine Stella à mes côtés. Elle aussi aurait terminé sa journée plus tard et elle m’aurait attendu. Patientant avec moi, elle aurait glissé ses doigts entre les miens et enfin… j’aurais pu sentir ce sentiment, longtemps oublié, de réconfort. Cette chaleur, ce lien qu’à elle seule elle faisait naître entre nous. Comme avant…


— Mais ça c’était avant. Tu as bien vu sa réaction Ash.


C’est beau de rêver. Imaginer un monde autrement. Façonner le passé comme je l’aurais souhaité. Parce que si je l’avais gardé à mes côtés, nous en serions où ? Ensemble ? Arrête tes conneries, Ash ! C’était un amour d’adolescent… Non, pas seulement. Elle était ma lumière, mon étoile, mon évidence. Pourrait-elle l’être à nouveau ? Impossible, j’ai déjà tout gâché, tout noirci avec mes ténèbres. Et je l’ai lu dans son regard, Cassie est en colère contre moi, triste aussi mais je n’y ai pas trouvé cette étincelle de douceur que j’avais pris l’habitude de chercher.


— Eh mec ! Tu viens ?


La voix d’Éric me surprend, je ne m’attendais pas à le voir apparaître au moment où les portes de l’ascenseur s’ouvrent devant moi. Pourtant, il se tient face à moi, un sourire malicieux visé sur le visage. Et d’ailleurs, Vince est là lui aussi. Mes complices à la rescousse. Et je sens déjà que la soirée promet d’être riche en boissons et en discussions dont je me passerais bien. Tous les deux rient à gorges déployées alors que je fronce les sourcils. OK, ils ont clairement vu que j’avais la tête ailleurs. Et ça, c’est un très mauvais signe.


J’hésite même à ressortir, sauter hors de la boîte de métal mais les portes se referment devant mon nez avant que je n’aie eu le temps de prendre ma décision. Je suis mal… Oh merde, je suis carrément foutu ! La preuve ? Le bras lourd d’Éric vient se poser sur mes épaules tandis que Vince attrape son téléphone et le colle à son oreille. Je ne mets pas longtemps à comprendre leur manège, surtout quand la voix de mon meilleur ami résonne dans la cabine qui nous fait descendre.


— Joe ! Sors-nous une bouteille de whisky. Ash en a besoin. Ouais, on te racontera.

— Sérieux, ce n’est pas si terrible que ça ! osé-je sous leurs regards compatissants.

— Quoi ? Attends, attends, répètes !


Vince s’excite, hurle presque dans le micro de son portable alors que Joe semble lui donner une information importante. Importante ou surprenante, je ne saurais dire. Surement les deux, vu le visage ahuri qu’il affiche. Bientôt, il se marre avant de carrément se tourner vers Éric et moi pour hausser les sourcils dans un angle peu conventionnel. Merde, il se passe quoi encore ? Tournant la tête vers le Gaffeur, je comprends que lui aussi est dans l’ignorance la plus totale. Et quand Vince raccroche, il ne nous laisse pas le temps de l’interroger, qu’il nous tire tous les deux à sa suite pour nous amener vers la sortie de l’immeuble. Ok, de plus en plus étrange…


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