Fyctia
5. De magie ? 3/3
Un grognement m’échappe. Décidément depuis hier, ça n’arrête pas. L’arrivée de cette nouvelle assistante bouleverse trop d’habitudes à mon goût. D’abord, elle est voluptueuse et charmante. Ensuite, elle a un piquant qui ne fait qu’affoler la bête dans mon caleçon. Mais ce qui me perturbe le plus, c’est ELLE dans son ensemble. Son regard surtout qui me renvoie inlassablement vers un passé que je préfèrerais effacer.
« Plus Stella sera loin de mon monde, plus je parviendrais à l’en préserver. Surtout maintenant. Je dois la sauver des ombres qui m’entourent, de l’obscurité qui s’apprête à m’engloutir tout entier. Les serres acérées de cette FEMME appuyant déjà son contrôle sur moi. A présent, je suis seul contre elle et si je dois abandonner mon étoile pour la protéger, je le ferais. »
C’était la décision la plus difficile de ma vie, au moment le plus compliqué possible. Mais je l’ai fait. Sans regard en arrière, alors que je le sentais… Son océan limpide dans lequel j’aimais me perdre débordait de larmes. Merde ! Pourquoi je me souviens de cet instant ? Pourquoi alors que tant années ont passé ? Confus, ma main vient frotter le haut de ma poitrine à gauche. Cet espace juste en-dessous de ma clavicule…
— Stella, hein ? m’interroge Vince plus pour affirmer un fait que pour avoir une réponse.
— Encore cette fille ! Mais mec, tu avais quoi ? Dix-sept ans, la dernière fois que tu l’as vu. Elle te hante encore ? Merde ! Y a urgence alors. Vivement dimanche pour entamer ton calendrier.
Éric toujours aussi délicat. Mais je conçois sa réaction. Lui, il ne l’a pas connu. Vince par contre. Il m’a repêché après tout ça. Il m’a vu lutter contre mes envies, contre mon cœur déjà fissuré. Il m’a aidé à avancer et à contrer les manigances de ma génitrice. Cette fourbe aux intentions mauvaises. D’ailleurs, je ne pourrais jamais le remercier assez pour la force qu’il a été. Pourtant, alors que je me sens impuissant, son bras tombant sur mon épaule me ramène à la réalité.
Ce présent qui est le mien.
— Passe-moi ton téléphone, m’indique-t-il quand je comprends qu’il a fait le tour de mon bureau. Tu vois cette jeune femme de l’autre côté de la porte ? Dès les premières minutes de son entretien d’embauche, j’ai su qu’elle serait le chocolat idéal pour cette année. Ton calendrier. C’est elle.
Elle ?
Sceptique, je ne dis pas un mot. Le bras de Vince pèse sur mon épaule alors qu’il ouvre l’application du calendrier de l’avent. Ses doigts glissent d’un jour à l’autre, ils n’enregistrent qu’un seul et même nom : Cassie. Encore et encore. De la première à la dernière case. Vingt-quatre fois. Mon meilleur ami change les règles de mon défi et je ne bronche pas cherchant malgré moi, la chevelure d’ébène de la belle sirène.
Et si pour la première fois en quoi ? Cinq ans ? Je ne sais plus… Mais et si le jeu en devenait plus intéressant. Plus difficile aussi. Pourtant j’en suis convaincu, au moment où Vince valide la dernière récompense cachait derrière le vingt-quatre décembre, cette année ma mission sera palpitante. Et quoi de mieux pour ça que de parvenir à mettre dans ces draps une femme au premier abord inaccessible.
— Alors se sera : vingt-quatre jours, un chocolat.
— Ouais, mon gars ! Et une petite sirène dans tes filets ! J’adore l’idée. Bien plus excitante que de coucher avec des coups d’un soir. Tu vas devoir te renouveler niveau drague. Mon pauvre, Éric s’extasie tel un enfant.
OK. Celui-là n’a pas encore profiter de sa séance détente près de la photocopieuse. Et bien sûr, je me tape son regard lumineux et vicieux. Ce type est irrécupérable ! Merde… Nous ne prêtions plus attention à mon assistante et la voilà droite comme un piquet devant la porte. Une main sur la poignée et l’autre tenant fermement un dossier fuchsia. C’est quoi cette manie avec le rose ? Et ce pull ! A vomir.
D’un hochement de tête vers elle, j’indique à la fois à mes amis que nous ne sommes plus seuls et à la demoiselle d’entrer dans la pièce. Nerveuse, elle soupire en ouvrant et avançant d’un pas. Son regard va de l’un à l’autre pour terminer son chemin dans le mien. Purée ! Cet océan, je le connais. Mes poils se hérissent le long de mes bras, un frisson s’empare de mon corps. Mon cœur tape contre ma poitrine.
Merde, c’est quoi ce sentiment ?
— Le marketing m’a demandé de t’apporter le dossier de communication pour Fabre. Ils disent qu’Éric en aura besoin pour établir un nouveau devis. Quant à Vince… et bien, une femme m’a hurlé dans les oreilles pour vous dire que votre mère vient de s’inviter chez vous. Ash ? Eh bien… Merci pour le chocolat. Il était délicieux. Comme avant.
— Comme avant ?
Ma question reste en suspens, la belle ayant déjà filé. Mais merde à la fin ! Et c’est quoi ce truc ? Elle n’a pas osé ? Je rêve ! Ce n’est pas croyable. Un rire retentissant s’échappe de ma gorge alors que j’examine le dos de Cassie. Vince, debout à mes côtés, explose en écho à mes éclats. Quant à Éric, curieux de comprendre notre réaction, il se tourne d’un geste vif vers la sortie de mon bureau.
Et notre dernier compère nous rejoint dans un rire rauque la seconde d’après. Cette fille aura ma peau. Bordel ! Après le pompon rouge et proéminant au creux de ses seins, voici venu le tour d’une queue en laine marron qui se balance au milieu de son dos. De droite à gauche au rythme de ses pas. Bien entendu, elle nous surprend tous les trois pliés en deux, mais elle se contente de nous saluer et de presser le nez rouge du renne.
Nous ne percevons qu’un semblant de son, mais la scène ne fait que redoubler nos rires. Merde alors ! Cette horreur n’est pas si mal. Surtout quand j’ai la chance d’observer le déhancher des fesses de celle qui la porte. Un sourire étire mes lèvres, et une douce chaleur monte à la surface. Une sensation que j’avais oublié, un bien-être que j’ai l’impression de devoir chercher dans les bras d’inconnues ou entre leurs cuisses.
— Rodolf est officiellement mon meilleur ami, éclate Éric.
— Tu vois, Ash. Elle est parfaite.
— Oui, enfin… Faudrait pas qu’elle en devienne suicidaire ! Regarde-le. Son visage est écarlate et quoi ? On voit tes dents ? Tu as des dents quand tu souris ? Putain ! Elle est douée !
Merci Éric.
Ton analyse nous est très utile. Mais ce que je note, c’est que de l’autre côté de la surface vitrée, assise à son fauteuil, une étoile nous détaille. Elle aussi est hilare. Les épaules secouaient de sursauts alors que d’une main, elle tente de cacher ses lèvres étirées. Bien essayé, Cassie. Cependant, ses pommettes rosies par son émotion l’ont trahi. Merde ! Elle n’en est que plus craquante.
Bien. Finalement cette journée est plus palpitante que la précédente. Qui sait ce qu’elle nous réserve d’autre ? J’avais oublié ! Le dossier Fabre. Éric tape de ses doigts sur mon bureau attendant que je réagisse à une de ses répliques légendaires. Sauf que je n’ai rien entendu trop concentrer sur mon assistante. Bravo Ash, tu es le parfait cliché du patron qui fantasme sur sa secrétaire.
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