Fyctia
4. Un soupçon 4/4
Mais Éric ne sait pas tenir sa langue. Jamais. Et encore moins quand il sait que je suis en position de faiblesse. Non ! Il en profite même pour me foutre la honte. D’ailleurs, il s’empresse de tendre la main vers mon assistante. Elle a le visage crispé, le sourire a demi marqué. Puis, alors qu’elle se décide à faire un mouvement mon ami ne peut s’empêcher d’ouvrir la bouche.
— Petite sirène ! Nous n’avons pas eu l’occasion de nous présenter, je suis Éric de la comptabilité.
— Petite sirène ? Génial… Je suppose que ce surnom va rester.
— Yes ! Comme ce vilain pull. La provocation ultime ! Et je parie…
Ni Cassie ni moi n’avons le temps de faire un geste que déjà les doigts rêches de mon ami pressent le gros nez rouge. Cette fois, c’est ce sont les paroles nasillardes de mon beau sapin qui s’évadent du creux de la poitrine de mon assistante. Elle sourit d’un air timide, tout en posant sur moi un regard lourd de sens alors qu’Éric se plie en deux tant il est hilare. Et merde ! Cette histoire, je vais en entendre parler pendant vingt ans.
— C’est le meilleur pull du monde ! Déride-toi mon pote, ce n’est qu’une musique.
Et le coup de coude dans les côtés, je ne l’avais pas vu venir. D’ailleurs, mon plateau bien rempli en fait de suite les frais. Une vague lattée s’échappe de la tasse de droite et vient m’asperger les doigts. Mais bien sûr, les mouvements ne s’arrêtent pas là. La bouche ouverte de Cassie m’indiquant clairement que la boisson survivante s’apprête à suivre l’exemple de la première. Putain ! Cette journée est pire que la précédente…
Je m’attends au pire et grogne ma frustration face à ce spectacle désolant que j’offre non seulement à mon ami mais aussi à cette femme que j’espère séduire. Belle entrée en matière, Ash! Mais je suis surpris par des doigts longs et fins qui attrapent in extrémistes le chocolat chaud. Me laissant la chance de stabiliser le plateau et sauver le liquide encore présent dans la tasse numéro un.
— Victoire pour la petite sirène ! hurle Éric que j’avais presque oublié.
— Génial… Tu souhaites que je prépare une nouvelle boisson ?
Elle m’interroge. Sérieuse. Sauf que… Je n’arrive pas à réfléchir, perdu dans la contemplation de la position qu’elle a adopté pour récupérer le contenu de mon plateau. Les boucles brunes de Cassie pendent dans une cascade sublime, et descendent jusqu’au dessin de ses seins, que je devine sous cette laine immonde. Mais ce n’est pas le détail qui me percute. Non… C’est cette cambrure formée par son dos, ses fesses tendues vers l’arrière comme un appel à la tentation.
Mon souffle se coupe, un frisson remonte le long de mes bras. J’examine, affamé, les lignes de sa silhouette. Les battements de mon cœur s’emballent au fur et à mesure que je parcours son corps en sens inverse. De la courbe de son cul, au creux de son dos, jusqu’à croiser l’océan cristallin de son regard. Cette fille… elle m’est familière. Et reprenant de l’air, j’imprime sans le vouloir les détails de ses iris dans ma mémoire.
Un dégradé d’azur qui s’estompe pour donner naissance à un gris nacré.
Semblable à ces yeux que je n’ai pas su effacer.
Stella.
— Ash ? Réponds à la gentille sirène, minaude Éric pour obtenir une réaction de ma part.
— Oui. Non. En fait… Le chocolat est pour vous.
— Moi ?
Ma tête esquisse un mouvement automatique. Cassie se contente alors de récupérer la boisson dont elle est la sauveuse. Elle me sourit avant de se rasseoir. Merde ! J’ai été distrait par ses yeux. A tel point que je n’ai pas assez profité de la vue qu’elle offrait. Mais je sais qu’un certain gaffeur, à mes côtés, a quant à lui bien enregistré la scène qui se joue ici. Son sourire en coin en est la preuve. Et même si cela devrait m’inquiéter, je ne peux pas m’empêcher de garder mon attention sur elle. Allant jusqu’à en déposer le plateau à ces côtés.
Sceptique, elle ne bouge pas pendant encore quelques secondes. Puis, dans un haussement d’épaules, elle penche la tête vers la tasse qu’elle tient entre ses mains. Pendant un instant, j’ai l’impression de lire de la surprise sur ses traits. Mais très vite, elle est remplacée par une jolie grimace satisfaite. Elle fait des allers-retours entre la boisson et moi, et finit par s’amuser avec l’un des gâteaux que j’ai planté dans la crème du chocolat.
— Le chocolat, le lait et les biscuits. La crème et la paille sucrée parfaite. Comme…
— C’est la boisson préférée de notre gros dur ! la coupe Éric.
— Je sais.
Quoi ?
Mes sourcils se froncent au moment où Cassie se rend compte de sa dernière intervention. Comment ? Elle plisse le nez, serre la mâchoire et voyant que je suis pantois, elle s’en satisfait. Quant à mon ami, il profite de mon silence pour taper sur mon épaule et m’indiquer l’entrée de mon bureau. D’accord, j’ai compris. Terminé les distractions, nous devons passer à l’action. Pourtant… J’aimerais bien comprendre ce qu’elle a voulu entendre avec son « je sais » catégorique.
Merde ! Cette femme est mystérieuse. Intrigante ! Le parfait cadeau pour une première case de mon calendrier. Surtout si elle continue de me surprendre. Et bien que j’aie remarqué que ses pommettes se sont teintées une nouvelle fois de rose en lui tournant le dos, je note aussi le contour de ses yeux rougis et gonflé. Mais pourquoi ? Ma colère de toute à l’heure ou un autre élément qui m’est inconnu ?
— Coriace la petite sirène, note Éric en fermant la porte du bureau.
— Mmh. Ouais.
— Tu as perdu ta langue ? C’est nouveau ! Attends, j’appelle Vince, il va en être sur le cul ! Merde… J’ai laissé mon portable à l’étage du dessous. Je vais en profiter pour demander son numéro à la mademoiselle au passage. Je reviens !
Hors de Question ! Je pose à la hâte le plateau. Me retourne, attrape le bras de mon ami, le tire vers moi. Son col se retrouve que la veille serrer entre mes doigts. Mon visage a deux centimètres du sien, le regard furieux. Mais qu’est-ce qu’il me prend ? Lui, affiche un sourire victorieux et me pousse pour ensuite s’installer dans un des fauteuils et se concentrer sur le dossier Fabre abandonné-là plus tôt. Putain !
Deux jours et ma nouvelle assistante me perturbe à tel point que j’en perds le contrôle. Je soupire, rumine, tire sur mes cheveux sous l’œil attentif d’Éric qui note avec précision chacun de mes gestes. Mec, si tu dis un mot, tu es foutu ! Mais, il la ferme, se contente de se focaliser sur notre dossier en attente. Très bien. Je n’ai pas envie de répondre à la moindre de ses questions. Pas maintenant.
Mon chocolat ?
Abandonné aux côtés de Cassie. Vraiment ?
— Une minute.
— Ah enfin ! Il arrive à dire deux mots ! Eh ! Tu fous quoi ? Mais restes ici !
Éric m’interpelle mais mes pas instinctifs eux me guident en arrière. Je parcours ainsi dans un ralenti la distance qui me sépare de cette jeune femme. Cassie relève vers moi son océan translucide avant de souffler un « bordel » nerveux. Oh, alors comme ça, elle aussi est perturbée par mes yeux ? C’est bon à savoir.
11 commentaires
Fanfan Dekdes
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Il y a 4 ans
Sandra MALMERA
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Il y a 4 ans
Luna_Dagird
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Il y a 4 ans
Sandra MALMERA
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Il y a 4 ans
Aby Mery
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Il y a 4 ans
Sandra MALMERA
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Il y a 4 ans