Fyctia
Chap 3.2 (Camille)
— C’est interdit de fumer dans les parcs à New York.
— Les Parisiens s’en tapent des règles.
— Les Parisiens ?
— D’accord. Moi.
— Tu as disparu tout à l’heure.
— Comment ça ? lui demandé-je alors qu’un spasme contracte mon estomac à l’idée qu’elle m’ait cherché dans l’amphi.
— Tu sèches déjà le premier jour, constate-t-elle presque avec tristesse.
— Heureux que tu as remarqué.
— J’ai rencontré Will juste avant, et il m’a dit qu’il t’avait laissé dans le coin.
Je reprends une taffe, pensif.
Elle fait attention à moi. Je suis content.
— Et Will, c’est pas mon père.
— Je voulais te présenter Noah.
Sa phrase claque dans les airs, brisant un détail en moi.
Mon agacement provoque un truc plus dévastateur en mon intérieur. Celui qui me donne des désirs de frapper sur quelqu’un, genre un footballer américain.
— Tu te fous de ma gueule ? craché-je, maîtrisant une avalanche de je ne sais quoi dévaler ma poitrine et tombant à mes pieds.
Nos regards se croisent. Le sien est terriblement… magnétique. En réalité, elle me donne envie de poser ma main sur sa nuque, de l’attirer vers moi, et de l’embrasser jusqu’à perdre connaissance.
Bordel, je délire un max. Elle est maquée.
— Toi aussi, tu te fous de ma gueule, Camille. Pas comme Noah. Il est clair, lui, au moins.
Elle a dit : Noah ?
Ok.
Elle peut sortir avec qui elle souhaite. Mais, j’en ai ras le bol d’entendre ce prénom à longueur de temps depuis ce matin. Et comprendre qu’il est mieux que moi ? Je le sais déjà, inutile de me l’apprendre.
N’importe qui serait meilleur pour elle, que moi.
— Écoute, que les choses soient claires. Si je suis ici, que j’étudie ici, c’est uniquement pour Roxane. C’est mon amie d’enfance et elle a toujours été présente pour moi.
Son air triste me fout les boules, torture mon cœur, qui n’attend plus qu’une épée pour le percer.
Pour en finir enfin de ses émois qui ne me fichent pas la paix.
— Je pensais que…
— Notre alchimie était incroyable, ouais.
Je tire une baffe. Elle me regarde comme si j’étais un extraterrestre. Qu’est-ce que j’ai dit pour qu’elle me dévisage comme ça ?
Bordel, je crois que je viens de lui avouer un truc… qui vient de sortir de nulle part.
— Mais je suis homo, me reprends-je stupidement avec le premier argumentaire que j’ai sous la dent.
— Et ?
J’écrase ma cigarette sur le béton, réfléchissant au plus grand mensonge qui se construit rapidement dans ma tête.
— J’ai un boy friend, en France.
— Je supposais que tu pensais que les relations à distance ne marchaient pas.
Son ton sec devient de plus en plus froid.
— C’est exact. C’est pour ça que je repars cet été, et que je ne reviendrai plus.
Elle m’observe avec curiosité. Pourquoi ai-je l’impression que je ne parviens plus à lâcher ses prunelles, à glisser sur sa bouche, à l'engloutir avec mon regard, alors que je ne le dois pas ?
— Roxane sait que tu rentres chez toi cet été ?
Son ton détaché me fait mal.
— Je ne le lui ai pas caché.
Nous nous redressons. Face à face, nous nous dévorons des yeux. Mes mains fourmillent de la toucher.
Mais je ne peux pas.
Je les planque dans mes poches, c’est plus prudent.
Sérieux, je ne sais pas ce qu’il m’arrive. Parce que mon corps a des réactions que je refuse, que mon esprit ne peut pas concevoir.
Parce qu’elle n’est pas libre. Que je ne suis pas assez bien pour elle. Que je tente par tous les moyens de la faire s’éloigner de moi. En vain. Parce qu’au fond, nos corps s’aimantent.
— C’est ta meilleure amie, reprend-elle.
— La seule.
Ses yeux semblent s’embuer.
— Inutile de me le rappeler. Inutile de faire comme si tu t’intéressais encore à moi. Comme tout à l’heure, sur le campus.
— Je fais ce que je veux. Et toi, je ne te veux pas.
Interdite, elle bat des cils, avant de me lancer l’insulte habituelle de l’an dernier.
— Sale con ! me crache-t-elle.
Puis, elle s’en va en pleurant. Le temps de réaliser la tournure de notre conversation stupide, je reste sonné l’espace d’une seconde, ramasse mon sac à la volée et je cours vers elle.
Je ne suis qu’un connard. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas être ensemble.
— Eden, attends !
Elle stoppe ses pas. Je me positionne devant elle, tandis que mon cœur bat à tout rompre. Je remarque l’étiquette qui dépasse de son T-shirt, m’approche d’elle puis, ose la lui remettre en place. Elle frissonne puis sa main se referme sur mon bras, alors que celui-ci est toujours tendu. Elle m’envoie un étrange frémissement qui dévale ma colonne vertébrale et percute mes pieds avec violence. J’avale difficilement ma salive, tandis qu’elle me regarde avec des yeux brillants, dans un visage sans sourire.
— Tu n’as pas raison. Je ne suis pas seulement un con. Mais un menteur. Parce que je n’ai pas de petit ami en France, lui avoué-je.
Son sourire timide réchauffe mon cœur et amène le mien. Puis, son expression devient grave effaçant toute trace de quoi que ce soit de joyeux. Sa paume glisse sur mon bras et retourne à la case départ : le long de son flanc. Je la suis du regard, puis racle ma gorge. Ses pupilles taclent les miennes avec puissance, d’un seul coup.
— Mais moi. Si. Noah, me rappelle-t-elle encore.
Sa phrase me propulse en arrière avec une force digne d’une caisse de formule un démarrant une course de vitesse.
— La réalité est brutale, Eden.
— Tu as raison, Camille. Mais, c’est la réalité.
Là, la voiture s’écrase sur un mur.
— Nous pouvons redevenir amis ? lui proposé-je contre toute attente.
Je ne réfléchis plus. Je suis HS. Plus de neurones. Plus rien.
Elle hésite.
— Moi, j’ai changé d’avis, j’ai envie d’être ton ami, si tu le veux toujours, ajouté-je.
Elle hausse une épaule puis valide d’un hochement de tête.
— Nous pouvons rentrer ensemble alors ? Et peut-être grignoter un truc avant de se coucher ? terminé-je.
Ma requête risque de me mener dans un chemin périlleux, mais tant pis. J’ai besoin de l’avoir auprès de moi, et si ce n’est que de cette façon-là, je prends.
J'attraperai tout ce que je peux avec elle, parce que ce que je veux, je ne l’aurai jamais.
L’aimer. Qu’elle m’aime.
Je veux redevenir son ami, jusqu’à ce que je reparte en France. C’est tout.
Oui. Comme ça, ce sera plus facile à supporter de la voir avec un autre.
11 commentaires
Chantal T.
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Il y a un an
D. Verton
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Il y a un an
Josepina(Jojo)
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Solann
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Inès k
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