Fyctia
CHAPITRE 13.2
— Salut, Loïs.
Ses doigts s'enfoncent dans les épaules du petit gars qu'elle tient devant elle, dont le nez est dressé dans ma direction. Il me scrute sans un mot, l’air curieux. Je lui fais un signe de la main.
— Salut, mec.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? reprend Loïs, me poussant à relever les yeux vers elle.
J'attrape le bas de mon jogging et soulève le tissu pour lui donner un aperçu de ma cheville.
— J'ai un nouveau gadget, lui dis-je.
— Mon Dieu... souffle-t-elle.
De stupéfaite, sa mine se fait plus soucieuse alors qu'elle examine le bracelet noir qui m'enserre la peau. Puis son regard embué remonte jusqu'au mien pour s'y accrocher. Mille émotions semblent la traverser, comme si elle tentait de naviguer dans le trouble ses pensées, sans parvenir à discerner la réalité.
— Je suis partagée entre l'envie de te prendre dans mes bras et de te remonter les bretelles. Depuis quand es-tu ici ?
— J'suis arrivé lundi, lui dis-je en faisant abstraction de sa voix tremblotante.
Ses yeux s'abaissent une fois encore avant qu'elle ne secoue la tête en reprenant :
— Où est-ce que tu étais passé ? Qu'est-ce que tu as encore fait ?
Ses mots s'entremêlent, de même que ses questions qui semblent vouloir sortir en même temps. Je m'apprête à lui répondre lorsqu'elle me fait signe de ne pas aller plus loin. Elle m'adresse un léger signe du menton en direction du petit garçon près d'elle.
— Pas maintenant, tu veux bien ?
J'acquiesce puis change de sujet.
— Tu es venue voir Tory ?
— Oui, en fait je...
Son regard passe de moi au jeune homme à plusieurs reprises, comme si elle tentait de se souvenir de la raison pour laquelle elle est ici.
— Ugo est censé dormir là. Sean et moi sommes attendus au gala de bienfaisance organisé chaque année.
— Ouais, félicitations d'ailleurs. Est-ce que je dois t'appeler « Madame la première dame de New Haven » maintenant ?
Elle glousse et lève les yeux au ciel.
— Tais-toi donc et laisse-nous entrer.
Elle me suit à l'intérieur et le petit Ugo file aussitôt au salon pour se jeter sur Jax, allongé sur son tapis. Loïs et moi poursuivons notre route jusqu'à la chambre de Tory, et j'ouvre la porte sans un bruit. Nos regards tombent sur la femme qui est toujours endormie sous les couvertures.
Loïs me tapote l'épaule en douceur alors qu'elle chuchote à mon attention :
— Laisse la se reposer.
— Elle avait l'air crevée tout à l'heure, expliqué-je alors qu'on retourne sur nos pas.
— Oui... C'est assez habituel. Mais on sait tous les deux comme cette journée est d'autant plus éprouvante pour elle.
Je fronce les sourcils sans comprendre, avant que l’évidence me frappe de plein fouet.
Merde. Je n’avais pas fait le lien tout à l’heure, quel imbécile !
Loïs expulse un long souffle à mes côtés, se passant une main sur le visage, et me ramenant au moment présent.
— Je n'arrive pas à croire que tu sois là, déclare-t-elle à voix basse, se parlant davantage à elle-même.
Elle semble se perdre une fois de plus dans ses pensées et j'en profite pour la détailler. Je crois que je ne l'avais jamais vu apprêtée ainsi. Elle porte une longue robe en satin blanc et des escarpins argentés. Ses cheveux sont relevés en un chignon parfait, étirant son regard qui, lui, n'a pas changé avec les années. Quelques petites ridules se sont ajoutés à ses traits délicats, mais le temps semble avoir été clément avec elle. J'ai toujours adoré les voisins de Nana, et une douce chaleur se propage dans ma poitrine alors que j'ai la soudaine impression de retrouver un peu de ma vie passée.
Loïs regarde sa montre.
— Il faut vraiment que j'y aille, soupire-t-elle.
Elle hésite à nouveau, ses prunelles oscillant d'Ugo à moi, comme tiraillée de l'intérieur.
— Est-ce que tu pourrais t'occuper de lui ? Juste le temps que Tory se repose.
Elle lâche ça comme si c'était la chose la plus évidente au monde. Je fais un pas en arrière, déstabilisé.
— Attends, tu veux que jette un œil au p'tit ? Moi ?
Je pointe mon indexe dans ma direction. Juste au cas où elle n’aurait pas fait le lien.
— Oui, je n'ai pas vraiment le choix, affirme-t-elle alors que mon front se plisse d’incrédulité. Je suis sûre que tout va bien se passer. Ugo a déjà mangé, il va certainement jouer une petite heure puis tomber fatigue. Tory sera réveillée d'ici là.
Je la fixe, abasourdi.
— T'es sérieuse ?
Ou as-tu perdu la tête ? ai-je envie d'ajouter.
Elle tente de chasser toute trace d'inquiétude sur son visage et s'approche de moi pour m'attraper les mains.
— Je te connais Mason, peu importe ces dernières années, pour moi tu es toujours ce gamin respectueux que j'aimais tant.
Ses mots me touchent en plein cœur bien que je n'en laisse rien paraître. Puis elle poursuit un ton plus bas, tout en resserrant ses doigts d’une poigne ferme :
— Et si jamais il arrive quoi que ce soit à mon fils, crois-moi, la déco que tu as au pied te semblera dérisoire en comparaison de ce qui t'attend.
Elle ajoute à sa tirade un sourire éclatant et s'écarte aussi vite pour aller embrasser Ugo.
— Tu vas rester un petit moment avec Mason, d'accord ? Tory est juste à côté, n'hésites pas à aller la chercher si tu as besoin d'elle.
Ils se prennent dans les bras et Loïs me jette un dernier regard par-dessus l'épaule de son fils. Chargé de sous-entendus. Ses yeux se mettent à briller alors qu'elle semble m'adresser des mots silencieux que je ne comprends pas. Je me gratte le derrière de la tête, nerveux.
Et mon malaise s'accroît un peu plus encore lorsque Loïs claque la porte derrière elle, me laissant seul face à ce p'tit gars que je ne connais pas.
Je reste un moment figé là.
Dans quoi je m’suis fourré, là ?
9 commentaires
Oswine
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Il y a 23 jours
Alyssa Well
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Il y a 23 jours
DIANA BOHRHAUER
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Il y a 23 jours
TammyCN
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CTrebert
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Alice Ferin
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Il y a 24 jours