Fyctia
Chapitre 8 LE SMS
Lara reçoit un SMS, elle parait décomposée, elle s'excuse et nous annonce qu'elle doit partir et qu'elle nous expliquera plus tard. H demande ce qu'elle a et je décide de le leur dire, je leur explique pour le noyé de ce matin. Ayant bien remarqué que H fait des efforts surhumains pour ne pas péter un câble, je prends la décision de lui parler un peu plus tard... Pour le dérider, je lui propose de prendre le volant de ma Mustang hacthback Ghia de 1979, mais il refuse, perdu dans ses pensées. Je décide de crever l'abcès.
– H, tu m’as l’air contrarié, c’est ma petite histoire de tout à l'heure qui te fait chier ? C’est des conneries H, tu sais !
– J’espère bien, Marsh !
– Je comprends. Ça peut paraître un peu gamin. Mais, honnêtement, ça fait du bien par moments. Si tu savais ce qu'elle nous a fait cette pute !
– Je peux comprendre ! Ce n’est pas tant vos bêtises qui me font chier, c'est que je croyais qu'ici dans ta cambrousse, on était à l'abri de la violence, des morts inutiles et injustes. Toute cette violence, même verbale, c'est de la merde. Mais, bon, je ne vais pas sombrer dans le mélo…
– Eh bien ! T’as vachement changé quand même… La dernière fois que je t'ai vu, tu te la jouais plutôt style bad boy en cuir genre Dany Zuko et là, tu es plutôt propret, genre premier de la classe comme un repenti à la "Tony de West Side Story" ! Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais tu sais si tu zappes mon côté gamin avec ma bande de potes, je suis étudiant en psycho, je sais écouter, pas comme thérapeute, mais tu peux compter sur moi !
Ben, tu n'es pas loin, en fait, j'aurais dû te le dire plus tôt.
Il se tait un moment
– Tu peux attendre si tu n'es pas prêt, je ne veux pas être intrusif – Tu parles bien sûr que je veux qu'il me parle, comme tout bon petit curieux qui se respecte. Il semble hésiter à lâcher le morceau, je l’encourage mentalement, vas-y crache-le, allez, crache, mais crache !
– Bon, autant te le dire et tout t'expliquer. Je ne suis plus le petit caïd des cités que tu as connu autrefois, j’ai tourné la page et… Ce n’est pas grâce à mon séjour en taule, mais plutôt… Ce n'est pas facile d'en parler. Je me suis pris une balle dans la hanche…
– Quoi ?! Je demande, abasourdi. Je me retiens de le railler avec un « arrête, tu déconnes ! » Mais, son expression me cloue le bec. C’est sûr, on ne décide pas au réveil de lancer la blague du jour : « J’en ai une bonne pour toi, on m’a tiré dessus ! » Tout en gardant un œil sur la route, j’observe mon cousin de l’autre. Harvey qui, d’un coup, devient pour moi un rescapé de la seconde guerre, un G.I. Jo à demi mangé par un obus. D’enfer !
– C’est pour ça que je boite par moments, continue-t-il avec un léger sourire. Ce qui a de plus drôle, c’est que c’est un de mes potes qui a failli me buter… Je ne supportais plus ces gratte-ciels, ce béton et cette putain de guerre des gangs ! Je n’en pouvais plus ! J’avais décidé de me sortir de cette merde qui m’entourait à Chicago et bang une balle ! Tu sais Marsh, j’ai choisi de venir chez toi pour commencer à refaire ma vie loin des flingues et du sang et je découvre que même dans ton trou perdu, il y a des gens qui se haïssent ! Je sais bien que tu essaies de me distraire, et je vous trouve sympas toi et ta bande, mais, ce n’est pas un jeu que de déconner sur le meurtre de quelqu’un : on peut finir par passer à l’acte. C’est facile de tomber de l’autre côté du miroir, crois-moi sur parole, j’en sais quelque chose… Je me sens un peu honteux, il y a du bon sens dans ses mots... je commence à avoir des scrupules de fantasmer ainsi sur la mort de Vilma...
– H, je ne veux pas me défendre, mais Vilma est plus qu’un monstre ! C’est Satan sur terre !
– Sans blague ! Sourit Harvey. Il faut la brûler alors ! Franchement, si ce n’est pas indiscret, pourquoi tu la détestes autant cette fille ?
Sujet douloureux, mais plus tabou. Il m’a confié ses malheurs, je vais lui confier les miens, je m’apprête à lui parler de Shirley, mais un SMS m'interrompt. Étant au volant, je demande à H de le lire. Déjà, il me dit que ça vient de Crazypony qui nous demande à tous de la rejoindre au manoir. Il insiste sur le mot SOS ! Évidemment, il ne peut pas comprendre, Crazypony est le surnom que nous donnons à Lara. En fait, nous avons tous des surnoms en rapport de près ou de loin avec le monde des chevaux. Le mien, c'est Mustang Style.
Crazypony, c'est le surnom de Lara !
Ah pourquoi ?
Ben parce qu’elle un peu folle et très petite !
D'accord ! Mais, comment tu les connais tous ces gens ?
Les Malloy ont été les premières personnes que nous avons rencontrées, quand nous sommes arrivés en Caroline du Nord, même si, ni Max, ni Marlon n'étaient nés, en fait, Madame Malloy était la chef d'atelier de l'usine que mon père a racheté à Torboro pour fuir Chicago après la mort de James, et Monsieur Malloy, lui, était un peu l'homme à tout faire, au départ, l'usine fabriquait des pièces détachées pour les frigidaires et les machines à laver industrielles. Aujourd'hui, on est dans la technologie de pointe, on fabrique des circuits imprimés, des processeurs et tout plein de composants pour l'informatique, l’électronique embarquée. Puis, on a ouvert la branche sécurité informatique depuis cinq ans. Christopher, l'un des deux frères aînés de Max travaille avec nous, il gère l'approvisionnement en matières premières, l'autre Oliver, c'est plus compliqué, on en parlera plus tard. C'est Max qui m'a fait connaître Lara, elles sont amies depuis la maternelle avec Audrey aussi, mais là, elle est partie en Angleterre. Ensuite, Max a ramené Marlon plus pour le punir au début et puis il s'est attaché à nous. J'ai connu Nick il y a trois ans, quand il a postulé pour le boulot de maître d'écurie, c'est Audrey qui avait passé une annonce dans une revue pour cavaliers. Et, depuis qu'il est là, disons que ça roule mieux. C'est grâce à Nick que j'ai connu Sissi, il lui est rentré dedans à Rocker Mount, tu sais là où tu as débarqué de ton bus. Bref, comme c'était un véhicule du club, c'est mon assurance qui devait jouer, elle n'est jamais repartie et on est ensemble depuis lors, ça va faire sept mois.
– Et les autres, ils sont en couple ?
– Nick et Audrey ont un peu fricoté sans plus l'année dernière, les autres à ma connaissance sont célibataires !
– Même Lara ?
– Oui, elle est seule, je crois que les gens ont peur d'elle !
– Pourquoi ?
– Ben comment dire ? Tu vois, chose étrange, je la connais depuis dix ans et c’est la première fois que je vais entrer au manoir, d'habitude, elle nous reçoit dans le pavillon des invités, elle est un peu gênée avec le côté « prout-prout » de son beau-père.
– Pourquoi prout-prout ?
– Lord Fandells était un riche célibataire quand il est tombé fou amoureux de sa gouvernante, la mère de Lara, elle avait six ans quand il l'a adoptée, contrairement à ce qui se dégage d'elle, Lara n'est pas du tout du genre guindée. Mais, le beau-père veille au grain !
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