Fyctia
Chapitre 11.2 Tamary
Une fois ses affaires récupérées, Amaury nous retrouve dans la cour. Il adresse un hochement tête poli à Elise avant de planter son regard dans le mien.
— Je vous appelle afin que nous convenions d'un nouveau rendez-vous ultérieurement.
Son ping-pong névrosé entre le glacial vouvoiement et un tutoiement qui me donne l'impression d'avoir affaire à un être humain, me flanque le tournis.
— Ok, soufflé-je avant qu'il ne s'éloigne pour monter dans sa voiture.
Tantor l'escorte jusqu'au bout. Je le rappelle avant qu'Amaury ne l'écrase en faisant demi-tour. Mon fidèle compagnon s'assoit à mes pieds pendant que je regarde la berline de cet homme infernal s'éloigner.
Elise me sort de ma torpeur en me flanquant un coup dans les côtes.
— Alors ? Raconte.
— J'ai besoin d'une douche.
— Je ne vais pas te dire le contraire et j'ajouterai aussi qu'il faut que tu te changes, mais ça ne t'éviteras pas de me répondre.
— Je sais.
Heureusement pour moi, mes parents sont absents pour la journée. Ils sont partis rendre visite à mon oncle qui coule une retraite paisible à quelques kilomètres d'ici. Sinon, ma mère serait déjà là en train de papoter avec Elise et lui aurait tout balancé.
Je soupire en me dirigeant vers ma maison.
— Tamy...
— Je suis en redressement judiciaire ! répliqué-je sans cesser d'avancer.
— Oh putain, non... Comment ? Mais pourquoi ? Sérieusement ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
J'ouvre la porte, puis m'engouffre dans mon antre sans prendre la peine de retirer mes bottes boueuses. Mes poings se serrent, j'expire et trouve le courage de faire face à mon amie.
— J'en sais rien ! Je bosse comme une dingue du matin au soir. Je fais tout ce que je peux pour que ça marche et c'est un putain d'échec ! Comment c'est possible de travailler autant sans réussir à payer toutes ces factures de merde ? Tu vas me le dire ? Parce que ça fait un bail que je cherche la réponse !
La colère m'enflamme les neurones. Je vomis toutes ces questions brûlantes sur cette pauvre Elise qui n'a pourtant rien à voir dans cette histoire. Il semblerait que j'ai atteint un point de non retour. L'explosion était inévitable. Ou bien mon inconscient sait qu'Elise est la seule qui peut encaisser ça sans m'en vouloir après.
Son regard se met a briller de larmes contenues, ce qui muselle aussitôt ma crise de nerfs.
— Oh non merde, pleure pas ! J'ai déjà l'impression d'être une merde alors si en plus je te fais pleurer, ça va m'achever.
Un sourire tremblotant éclot sur ses lèvres, tandis qu'elle essuie rapidement sa joue de l'unique goutte qui s'est échappé de ses yeux.
— C'est rien. Je suis juste triste de ne pas avoir vu que tu allais aussi mal.
— Arrête, c'est bon. Je vais trouver une solution.
— Tamy, un redressement judiciaire c'est pas une petite emmerde que tu peux gérer sans aide.
Un râle aigre m'échappe.
— J'ai de l'aide. Tu viens de le rencontrer. Un parfait blaireau qui n'avait jamais mis les pieds dans une exploitation laitière. Toute ma vie est entre ses mains douces et propres de citadin à la con. Et bien évidemment, sa première solution a été de ruiner mes vaches en augmentant le nombre annuel de gestations. Parce que pour faire du fric, il faut se carrer dans le fion les valeurs que tu défendais jusque là !
Elise connaît mes convictions à ce sujet. Je me suis déjà accrochée avec un autre exploitant qui n'avait aucun remord à utiliser ses bêtes au mépris de leur santé.
— Il doit bien y avoir d'autres moyens de te renflouer, lâche mon amie en croisant les bras autour de sa poitrine.
— Amaury veut tenter de passer outre la coopérative et que je vende en direct aux industriels. Vu qu'aucune banque ne financera le moindre agrandissement ou amélioration de la ferme, c'est la seule solution, expliqué-je en me dirigeant vers ma salle de bain.
Elise m'accompagne, tout comme Tantor. Je quitte mes fringues dégueu devant mes spectateurs. Non pas que j'ai un goût pour l’exhibition, mais ça fait des années que la barrière de la pudeur a disparu entre mon amie et moi.
Ce qui me stress en revanche, c'est son soudain silence. Je lui jette un rapide coup d’œil en tirant le rideau de ma douche. Sa narine droite frémit, signe qu'elle est en pleine réflexion.
Je me glisse sous l'eau brûlante en attendant qu'elle retrouve l'usage de la parole, ce qui ne tarde pas.
— Amaury, hein ? lance-t-elle en gloussant.
14 commentaires
chroniqied1nouvelle
-
Il y a 2 ans
Bones Vercetti
-
Il y a 2 ans
Stacy Henrion
-
Il y a 2 ans
Bones Vercetti
-
Il y a 2 ans
Emma_et_Lou
-
Il y a 2 ans
Bones Vercetti
-
Il y a 2 ans
Morgane Rigan
-
Il y a 2 ans
Maryline PIAUD
-
Il y a 2 ans
Patricia Eckert Eschenbrenner
-
Il y a 2 ans
Bones Vercetti
-
Il y a 2 ans