Fyctia
Chapitre 14.2
La sublime demoiselle engagea la conversation. Quelle voix divine !
Pourquoi cette femme l’attirait-il autant maintenant, alors que cela faisait de longs mois qu’il avait noté ses œillades ?
Quoi qu'il en soit, il n’était pas prêt à céder alors qu’Emily était si mal.
À une heure avancée, sentant ses forces l'abandonner, il s’échappa avec Nico.
Une marche s'imposait même si le petit kilomètre les séparant d’un lit douillet ne suffirait pas à les dessoûler.
En chemin, le téléphone d’Harry vibra. Elle l’appelait, encore. Prostré, il regarda la photo de la jolie blonde jusqu’à ce qu’elle disparaisse laissant place à un message vocal. Le premier qu'elle lui laissait depuis leur "discussion".
Il avait besoin de l’entendre, pour se rassurer.
« Harry… »
Le filet de voix lui donna la chair de poule. Un mauvais pressentiment l’envahit, le dégrisant sur le coup.
« J’ai mal. »
Le pouls d'Harry ainsi que son rythme respiratoire s’accélérèrent.
« Je voulais faire taire ma peine, aide-moi, je t'en prie. »
Il devint livide, ses jambes se coupèrent.
Nicolas le ramena à lui, alerté par la paralysie foudroyante de son ami.
— Harry ? Que se passe-t-il ?
Ce dernier émergea.
Il devait rassembler ses pensées.
Pris d’un élan de sang-froid inespéré, Harry appela le SAMU, leur demandant de se rendre à son domicile. Il était formel, sa petite amie avait attenté à ses jours.
Puis il rappela Emily qui ne répondit jamais.
Nicolas assista à la scène, médusé.
— Est-ce que tu peux me conduire chez moi ? supplia Harry.
— Bien sûr.
Ils coururent à en perdre haleine jusqu’à la voiture de Nico, garée au bas de son studio.
Dix minutes plus tard, soit une éternité, ils arrivèrent sur place.
— Pourquoi n’y a-t-il aucun gyrophare ? s’énerva Harry en sautant de la voiture.
Il grimpa les étages quatre à quatre, ouvrit la porte, les mains tremblantes, et se rua dans leur chambre.
Elle était là, inconsciente, dans le lit, le visage baignant dans une marre de vomi, une bouteille de rhum répandue au sol accompagnée d’une boîte d’Oxycodone.
Harry se souvint des enseignements de l’étudiante en médecine. « Un jour tu sauveras peut-être la vie de quelqu’un grâce à ces gestes », avait-elle dit.
Il libéra ses voies aériennes pour s’assurer qu’elle respire toujours, puis la plaça en position latérale de sécurité.
Après avoir contrôlé une nouvelle fois sa respiration, il l’enveloppa dans la couette pour la maintenir au chaud.
Il rappela ensuite les secours qui lui confirmèrent être en route.
Alors que les minutes le séparant de leur arrivée s’étiraient inlassablement, il parlait à Emily dans l’espoir qu’elle l’entende.
« Réveille-toi mon amour. Je t’en supplie, ne me quitte pas. Je suis désolé. Ne m’abandonne pas. Je serai là pour toi. »
Sans comprendre comment, il s’était retrouvé aux urgences, aux côtés de Nicolas, qui lui emprunta son téléphone pour prévenir Jean.
L’attente fut comme un énième supplice, après des jours passés à se flageller, le message terrifiant et la découverte du corps inerte.
Il incarnait Prométhée, sauf que lui, contrairement au Titan, méritait sa peine.
Il avait ignoré les différents signaux qui auraient dû lui permettre de déceler la dépression qui frappait Emily depuis des mois, sans parler de sa dernière phrase qui sonnait comme un avertissement.
Non content de ça, monsieur avait ignoré ses appels depuis plusieurs jours, par désir de liberté. Pour quoi ? Flirter ? Tout ça parce que ses hormones le titillaient. Quel monstre était-il !
Sa tête se mit à tourner. Qu’avait-il fait ? Si elle ne s’en sortait pas…
Il s’effondra. Sa tête heurtant le sol ne suffit pas à le réanimer. Il voulait oublier, comme elle.
Son ami le releva et dispensa quelques paroles rassurantes qui se perdirent dans les plaintes et gémissements alentour.
Peu de temps après, Jean et les parents d’Emily, prévenus par ce dernier, déboulèrent.
Leur incompréhension était lisible, même pour Harry à demi conscient. Ils semblaient tous trois espérer qu’il s’agisse d’un malentendu.
Le jeune homme expliqua la situation dans la limite de ses capacités, les larmes, l’angoisse, la honte et la culpabilité se mettant en travers de son chemin.
Puis un silence de mort s’établit, dans lequel Harry se mit à invoquer un Dieu auquel il ne croyait pas. Il était prêt à tout donner, sa vie, sa carrière, son bonheur, n’importe quoi pour qu’elle reste en vie. S’il fallait pactiser avec le diable, il le ferait. Au vu des circonstances il était plus raisonnable de croire en son existence.
Le petit comité, qui avait reçu des nouvelles rassurantes à l’aube, fut autorisé à rejoindre la chambre de demoiselle quelques heures plus tard.
Le visage amaigri d'Emily, ses cernes bleues, son teint blafard, ses lèvres blanches, furent une épreuve supplémentaire pour Harry qui s'était déjà jugé coupable.
Elle se réveilla enfin, procurant un nouveau souffle à la pièce aseptisée.
Harry resté en retrait, se mit à trembler. Jean saisit sa main jusqu’à ce que la jeune femme lui adresse un sourire, et sa voix éraillée l’appelle.
Assis au bord du lit, la petite main perfusée entre les siennes, Harry se répandit en excuses incompréhensibles, noyées sous des larmes intarissables.
Il la supplia d’oublier ses propos, de le laisser l’accompagner dans sa convalescence pour faire renaître leur projet de ses cendres.
La jeune femme acquiesça avant d’exprimer des regrets destinés autant à son chéri qu’à ses parents.
— Je suis désolée, dit-elle d’une voix plus claire. J’ai commis une terrible erreur, je ne mesurais pas la gravité de mes actes. Je ne recommencerai plus. Je vous le jure.
La demoiselle fut hospitalisée en psychiatrie, procédure habituelle.
Une fois passées les premières quarante-huit heures, elle eut le droit aux visites.
Harry était présent, à chaque fois qu’on le lui permettait, avec une attention nouvelle pour sa petite amie.
N'ayant jamais eu d’idées noire auparavant, son séjour ne dura que quinze jours, à la suite desquels, Emily regagna le logement familial, ses parents ne faisant plus confiance à l’homme supposé la protéger.
Les tourtereaux furent ainsi replongés dans les étés de leurs années lycée, recréant l’étincelle.
Puis les cours reprirent, ainsi que leur vie de couple dans cet appartement qui rappelait sans cesse à Harry le drame auquel ils avaient échappé, alimentant la peur qu’elle reproduise son geste.
Emily ne supportant plus de voir Harry aussi malheureux, malgré toute l’énergie qu’il déployait pour le cacher, lui rendit sa liberté, par amour.
Il refusa tout net, mais à force de persuasion, la belle arriva à ses fins. « Les inséparables ne sont plus », avait-elle dit.
Accablé par l’horreur qu’il avait engendré, Harry se promit de ne l’infliger à aucune autre femme, une part de lui punissant son insouciance.
Il ne méritait pas de retrouver quelqu’un, pas après ce qu’il avait fait endurer à la douce Emily.
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