Mystiplume Un pas après l'autre Chapitre 6

Chapitre 6

Chaque soir, Astrid passait devant l'école primaire. Cela réveillait en elle un sentiment de nostalgie.

Elle avait toujours voulu avoir un petit frère ou une petite soeur. À la mort de son père, elle avait bien sûr compris que cela n'arriverait jamais, mais malgré tout, elle aurait aimé prendre soin d'un petit être qui aurait besoin d'elle.

Désormais, elle se disait que ce n'était pas plus mal. Si elle avait eu un petit frère ou une petite soeur, elle n'aurait pas pu se suicider et l'abandonner avec leur alcoolique de mère.

Mais elle était fille unique. Elle pouvait mourir, elle ne manquerait à personne.

Elle se demandait si sa mère, de son abîme d'alcool, remarquerait sa disparition, si elle en aurait quelque chose à faire.

" Sans doute pas. "

Telle fut sa conclusion.

Elle avançait en traînant des pieds, aussi peu motivée pour rentrer chez elle que pour aller à l'école. Le matin, elle prenait le bus, mais le soir, elle préférait rentrer à pied. Cela lui permettait de passer le moins de temps possible dans sa maison vide.


Elle entra dans l'épicerie située entre l'école primaire et sa maison, et sortit de sa poche une liste de courses.

La veille au soir, elle avait prélevé 50 euros du porte-feuille de sa mère, qui traînait abandonné sur la commode de l'entrée. Ce serait 50 euros qui ne passeraient pas dans la bouteille.

Elle prit un panier et commença à arpenter les rayons d'un pas lourd.

À chaque fois qu'elle mettait quelque chose dans le panier, elle disait le nom dans sa tête et le cochait mentalement.

"Pâtes. Fait. Fromage râpé. Fait. Pain sandwich. Fait. Jambon. Fait. Beurre. Fait. Céréales. Fait. "

Cette mélopée accompagnait chacune de ses virées à l'épicerie, façon de délimiter le temps qu'elle y passait. De rester ancrée dans le présent.

Une fois son panier plein, elle passa en caisse et ajouta un sac de courses à ses achats.

- 40€57, dit le caissier d'une voix morne.

Astrid ressentit de l'empathie pour lui. Il devait mortellement s'ennuyer, à passer ses journées assit derrière sa caisse, à scanner toujours les mêmes articles, à énoncer la somme due, à encaisser l'argent et rendre la monnaie. Le soir, quand il terminait, était-il heureux de rentrer chez lui ? Avait-il une famille qui l'attendait ? Ou rentrait il d'un travail déprimant pour se retrouver dans une maison vide et tout aussi déprimante ?

Ces questions la préoccupait en sortant. Elle ne souhaitait à personne d'être aussi malheureux qu'elle. D'avoir la même routine, la même vie déprimante.


Elle déverrouilla sa porte et se dépêcha d'entrer et de refermer derrière elle.

Sa mère n'était pas rentrée, et ne rentrerait sans doute pas avant les petites heures du jour, lors de la fermeture de son bar préféré.

Elle alluma la télévision afin de mettre fin au silence incessant qui régnait, puis rangea ses achats.

" Pâtes. Placard. Yaourts. Frigo. Beurre. Frigo. Fromage râpé. Frigo. Jambon. Frigo. Pain sandwich. Placard. "

Répéter dans sa tête ce qu'elle faisait, la façon dont les choses s'agençait, lui permettait de ne pas devenir folle.

Le silence ne l'aurait pas.

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