Fyctia
Chapitre 2
Complètement assommée par le jetlag, ce n'est que dix heures plus tard que je finis par émerger de nouveau. Il me faut un moment d'ailleurs pour me repérer dans le temps et dans l'espace. Mon portable m'apprend qu'il est aux alentours de vingt-heures, ce qui veut dire qu'on doit s'approcher de l'aurore en Angleterre. Je décide de prendre une douche, me sentant toute poisseuse après mon voyage. C'est avec plaisir que je retrouve une sensation de propreté alors que je décide de prendre soin de moi en m'appliquant de la crème sur le corps. Bien que je sois ici pour le travail, me couper du stresse de la vie active anglaise va me permettre de souffler un peu. Petit à petit, je réussis à trouver des points positifs dans ce voyage inattendu, même si rien ne pourra remplacer un Noël auprès de ma meilleure amie.
J'enfile une robe en mousseline tout en veillant bien à rentrer l'alliance qui pend à ma chaîne dans mon vêtement. Ce bijou ne me quitte jamais. Ça a été une grande étape pour moi de retirer cette bague de mon doigt pour la porter simplement autour de mon cou, mais je me sens toujours prisonnière de lui. Je sais que le jour où j'arriverai à m'en délivrer sera aussi le moment symbolique où j'accepterai de me séparer des démons qui me collent à la peau, mais je sais aussi que j'en suis encore loin. Je noue mes longues mèches d'un châtain clair en deux nattes avant de rejoindre le rez-de-chaussée.
Je n'ai encore acheté aucune provision mais mon estomac réclame déjà son dû. Un délicieux fumet attire d'autant plus mon attention et l'odeur m'emmène jusqu'à la cuisine où se trouve Ava.
— Julia, j'allais justement venir te réveiller. Le hachis parmentier est prêt, viens t'installer.
— Vous n'aviez pas besoin de me préparer à manger Madame Harley, l'assuré-je, gênée.
— C'est toujours Ava, réplique-t-elle. Et ne sois pas ridicule, tu viens juste d'arriver, il est normal que je t'accueille avec un bon plat, surtout après un si long voyage. Quel genre d'hôte je ferais sinon ?
Il n'y a pas à dire, Ava a un don pour mettre les gens à l'aise. Je me résigne donc à lui tendre mon assiette, juste avant que mon ventre ne grogne et ne me trahisse. Pendant le repas, elle se fait une joie de m'interroger sur ma vie à Manchester. C'est donc avec passion que je lui parle de mon appartement, de Beth et de mon nouveau travail. Je suis si détendue que j'ai presque baissé la garde au moment où vient la question fatidique.
— Et il n'y a pas un homme dans ta vie, au milieu de tout ça ?
Je feins la décontraction en faisant mine d'être occupée à boire puis réponds en reposant mon verre avec toute la lenteur du monde :
— Non, plus d'homme.
Au choix des mots, Ava semble comprendre que c'est un sujet délicat puisqu'elle n'insiste pas, même si je sens ses prunelles bleues inquisitrices me sonder.
— Tu devrais aller profiter de la plage. Il y a une bonne ambiance pendant la période qui précède les fêtes.
J'acquiesce, quand bien même ce n'est pas l'ambiance que je recherche pour un mois de décembre. D'un autre côté, c'est l'occasion de commencer à prendre quelques clichés pour pour article de cette période d'ébullition à l'approche de la Nativité. Je suis donc son conseil après avoir insisté pour faire la vaisselle. C'est avec une veste en jean sur le dos que je commence alors à arpenter les rues de Sydney.
Mes pas me mènent à la fameuse plage de Bondi. À cette heure-ci, beaucoup de jeunes s'y trouvent. Les reflets du soleil dansent sur les ondulations de l'eau d'un envoûtant bleu lagon et je regrette immédiatement de ne pas avoir mis mon maillot de bain. Cela ne m'empêche pas de contourner la bande d'amis qui joue au volley afin de m'approcher pour tremper mes jambes alors que les vagues viennent se fracasser sur mes cuisses. La jupe de ma robe se fait d'ailleurs mouiller, mais je ne suis pas une de ces filles qui veillent minutieusement à leur apparence. Je décide d'immortaliser ce tableau en prenant la première photo de mon séjour.
C'est alors que j'entends des instructions être criées. À quelques mètres de mois, un homme de grande taille, dont l'ondulation des cheveux mi-longs blondis par le soleil n'est pas sans rappeler les vagues derrière lui, pose devant un photographe. Au vu de son aisance, je devine sans mal qu'il doit avoir une certaine activité dans le mannequinat. La luminosité est parfaite, sa présence est auréolée des premiers rayons du crépuscule alors qu'un jeu d'ombre et de lumière mystérieux se joue sur son corps. L'homme lève ensuite une main derrière sa tête, me laissant apercevoir un tatouage tribal sur son pectoral droit. Alors qu'il se tourne de trois quarts vers moi, j'aperçois de profonds yeux bleus dont l'intensité est renforcée par un rayon de soleil qui vient effleurer sa silhouette.
C'est presque malgré moi, dans un instinct naturel, que je porte de nouveau mon appareil à hauteur d'oeil et que je capture le portrait de cet homme qui semble comme immergé des flots. Une Vénus au masculin. Magnifique.
Ce n'est qu'après coup que je réalise l'étrangeté de mon geste alors que mon regard fixe a déjà attiré l'attention du modèle et de son photographe. Oh oh. Alors que son acolyte commence à râler, je vois Vénus le calmer d'un geste de la main avant qu'il ne s'approche de moi en... souriant ?
Je reste pétrifiée sur place, alors que mes pieds s'enfoncent littéralement dans le sable mouillé. Tout ce que je parviens à dire lorsqu'il parvient à ma hauteur est un hésitant :
— Heu... G'day !
Je vous en prie, que quelqu'un vienne m'enterrer !
12 commentaires
Fanfan Dekdes
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Il y a 4 ans
EightMae
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Il y a 4 ans
Amandine_grn
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Il y a 4 ans
EightMae
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Il y a 4 ans
Nelyne
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Il y a 4 ans
EightMae
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Cléoda Iseth
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EightMae
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FleurDeCerisier
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Il y a 4 ans
EightMae
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Il y a 4 ans