Paupipauline UN ÉCOSSAIS AU PIED DE MON SAPIN Chapitre 44

Chapitre 44

Les chutes de neige se sont intensifiées depuis mon trajet aller et le vent étant de la partie durant le retour, les conditions sont réunies pour que le froid me prenne d'assaut. Je remarque dans ma lamentation que la coupure d’électricité n'est pas générale puisque les rues sont toujours éclairées par les grands lampadaires et par les rideaux lumineux qui jonchent l'avenue.


Même blotti contre Alexander et à l'abri de son parapluie, rien n'y fait. Mon corps est gelé pendant que je me mets à grelotter. Je sais que nous n'avons qu'un bon quart d'heure pour rejoindre la maison, mais ce trajet-là me parait encore plus long.


Nous gagnons du terrain en nous rapprochant toujours un peu plus près du but mais l'effort est bien loin d'être terminé lorsque nous tournons dans les petites rues menant à mon domicile. Alors que les grands axes ont eu le mérite d'avoir été déneigés et salés, les petites rues annexes sont toujours dans leurs jus de la nuit précédente. Avancer dans cette neige est difficile et d'autant plus quand le froid commence à raidir les articulations.


C'est un calvaire !


Si je n'avais eu la motivation de retrouver mon Écossais en tête à tête, jamais je n'aurais mis un pied dehors ! Jamais ! Tandis que j'avance en pestant à coup de longs soupirs, je me rappelle que nos retrouvailles au cabinet nous auront permis de briser définitivement la glace entre nous.


Cette pensée me réchauffe un tant soit peu le cœur pendant que nous entrons enfin sur la Brook Street et j'arrive à distinguer de loin les lumières de ma maison. Alors que nous arrivons devant le portail, une petite vague de stress m'envahit.


Si le repas tournait au cauchemar pendant un méchant règlement de comptes entre Alexander et mon père, comment réagir ? Moi qui ai toujours eu une relation impeccable avec mon père, celle-ci se dégrade à vue d’œil ces dernières semaines et j'en viens même à perdre ma confiance en lui.


C'est avec une grande inspiration que j'ouvre le portail et que nous entrons dans la cour.

Je fais quelques pas avant de m'immobiliser dans l'obscurité et devant Alexander.



– Donne-moi un peu de courage avant que nous nous jetions dans la gueule du loup. - chuchoté-je à Alexander -



C'est bien à l'abri des regards que je profite une dernière fois pour prendre une dose de sa chaleur et pour chérir ses fines lèvres, froidis par l'hiver. Je constate qu'il fait durer le plaisir en jouant avec mes lèvres, en me laissant une nouvelle fois haletante à son contact brûlant. Le moins que l'on puisse dire c'est qu'il sait parfaitement montrer son désir.


Néanmoins, après ces quelques délicieuses secondes, il est temps de revenir au présent. Même si le fait de braver une nouvelle fois les interdits et qui plus est chez moi, rend le moment d'autant plus appréciable et excitant.



– Et cette fois-ci il faut vraiment que l'on se tienne à carreau devant mon père et ton oncle hein ! - lancé-je l'air grave -



Il se contente d'hocher de la tête juste avant que je ne toque successivement trois fois à la porte pour avertir l'assemblée de notre arrivée et j'ouvre celle-ci sans attendre pour nous engouffrer dans une pièce où une agréable chaleur nous accueille.


Aussitôt entrés, c'est un comité d'accueil mitigé qui nous scrute. Tous étant installés dans le salon, devant la cheminée, ma mère, mon frère et Charli nous adressent un large sourire. Alors que mon père et John nous toisent du regard, un air faussement aimable collé au visage.


J'ai eu beau faire une prière pour qu'il soit dans un bon jour, apparemment elle ne sera pas exaucée ce soir. Nous nous débarrassons de nos manteaux meurtris par le froid et l'humidité pendant que ma famille a repris ses discussions. J'échange quelques regards complices avec Alexander en toute discrétion et nous prenons place aux côtés de nos familles.


Mon frère s'empresse de nous servir une coupe de prosecco chacun et sans avoir besoin de lever le menton, je sens déjà les yeux de mon père me fixer.



– Vous avez vu l'heure ! Nous devrions déjà être à table à cette heure-ci. - débute mon père avec une intonation proche de la remontrance -


– Je sais. Nous avons dû attendre le livreur qui avait du retard. - rétorqué-je aussi sec -


– Evidemment, il y a toujours une bonne excuse. - poursuit-il en me fusillant du regard -



Son ton accusateur et ses réprimandes commencent sérieusement à faire accélérer mon palpitant mais cette fois-ci pour les mauvaises raisons. J'avale une grande gorgée de pétillant et ravale ma fierté au passage en m'appliquant à calmer ma colère interne. Je ne peux pas me permettre de m'emporter comme ça, pas maintenant, pas ce soir me dis-je en soupirant.



– Mais ce n'est pas si grave que ça chéri. De toute façon la dinde n'était pas encore prête. - dédramatise ma mère pour dissiper la tension en m'adressant un furtif clin d'œil -



Son intervention me fait le plus grand bien. Même si je sais pertinemment que la dinde est prête depuis plusieurs heures, mon père lui, n'en sait rien.


Je lui revaudrais une fière chandelle pour son aide.


Les conversations futiles reprennent bon train sans que je n'y participe vraiment. La seule chose qui m'importe est de réussir à donner le change par rapport à Alexander. Je voudrais l'observer et profiter pleinement de ce moment festif avec lui mais je n'en fais rien.


Pour le coup c'est mon père qui me surveille comme le lait sur le feu et ça, qu'est-ce qu'il m'agace ! J'ai l'impression qu'il n'attend que le premier faux pas pour nous mettre tous les deux à brûler sur le bûcher.


Je garde la face en lui adressant de longs regards, bien hypocrites.


Après avoir terminé ma coupe cul-sec, j'estime avoir suffisamment joué la comédie face à mon père pour me permettre de quitter l'assemblée et terminer de préparer notre table de fête. C'est sans dire un mot que je fonce vers cette dernière. Arrivée à hauteur, je m'applique à allumer chacune des petites bougies ici et là et à allumer la petite guirlande lumineuse.


Là, l'atmosphère devient bien plus chaleureuse, ça me plait.


C'est en pleine contemplation de mon travail achevé que je sursaute lorsque je sens une légère main se poser sur mon épaule. A mon grand soulagement il ne s'agit ni de mon père, ni d'Alexander mais bien de ma mère qui m'adresse un doux sourire affectueux.



– Tu m'aides en cuisine ? - me chuchote-t-elle doucement -



Sa douceur m'apaise profondément pendant que je lui adresse un sourire de biais en acceptant sa proposition. Quelques secondes plus tard, elle fait volte-face en s'adressant aux hommes qui discutent entre eux.



– Les hommes à table !



Ordonne gaiement ma mère avant de m'entrainer avec elle jusqu'à la cuisine.

Rien qu'à voir ses grandes pupilles pétiller, je sens qu'elle couve quelque chose !

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12 commentaires

Jane Moody

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Il y a 4 ans

J'aime bien des deux derniers chapitres, je trouve que l'histoire devient moins "froide", ça fait du bien. :)

Paupipauline

-

Il y a 4 ans

Merci !! :) :)
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