clara.yae The Devil in love Chapitre 06

Chapitre 06

Ce n’était toujours qu’un rêve, mais c’était le début d’une histoire horrifique et romantique. Si je pouvais faire un bond dans le passé et revenir à ce moment-là, aurais-je changé quelque chose ? Me serais-je laissé faire comme je l’avais fait ? Si j’avais décidé de prendre un tout autre chemin, alors peut-être que mon âme ne serait plus aussi en danger qu’aujourd’hui, peut-être qu’elle ne l'aurait jamais été, ou alors aurais-je simplement retardé l’inévitable ?

Je ne savais pas, mais cette nuit-là n’était pas comme les autres. Il y avait quelque chose en plus, quelque chose de plus… réel. De… trop réel.

Et c’était arrivé du jour au lendemain.

Personne n’aurait pu s’attendre et se préparer à une histoire comme celle-ci.

Je me souvenais être allongée dans mon lit –celui-ci positionné dans le coin de la chambre, contre le mur – enfoui sous un tas de couettes chaudes.

Je me souvenais de cette obscurité profonde et oppressante, de ce minuscule trou noir perché dans un coin, au-dessus de moi, grandissant à mesure que les minutes s'écoulaient. Son abîme semblait sans fin, évoquant les immenses spirales d'encre qui dévoraient les étoiles, plongeant l'univers dans leur éternelle nuit.

Mais celui-ci n’avait rien à voir avec ceux de la galaxie, c’était juste un trou comme un autre, ou presque, du moins. Parce que celui-ci laissait aller et venir de sombres silhouettes humanoïdes qui n’affichaient aucune expression.

D'une manière que je peinais à saisir, c'était comme s'ils franchissaient le seuil d'un autre monde, où ils étaient libres de déambuler à condition de suivre scrupuleusement le temps qui leur était imparti. Mais si par inadvertance l'un d'eux osait s'attarder au-delà de ce qui lui était autorisé, alors quelque chose d’effroyable finissait par lui arriver.

Je me souvenais de leur forme brumeuse, à mi chemin entre la vie et la mort, tels de spectres nocturnes dévoreurs d’âmes. Certains ne restaient qu’entre eux, tapis au fond de la chambre, ne me prêtant aucune attention, tandis que d’autres s’amusaient simplement à me tourner autour, comme un prédateur jouant avec son dîner. Comme une araignée admirant sa proie.

Puis, il y avait ceux qui étaient plus imposants, ceux qui se sentaient déjà comme chez eux, et qui n’avaient aucun mal à me terroriser.

Je me souvenais de leur sombres mains de fumée noire me parcourant le corps et de leurs longues griffes qui s’enfonçaient dans ma chair, de cette entité qui essayait toujours de m'étrangler, ou de celle qui prenait un malin plaisir à plonger ses longues griffes aiguisés dans ma cuisse, jusqu’à mons os.

Le plus effrayant, ce n’était pas simplement le fait que j’étais mise à nue en proie aux ténèbres et aux démons de minuit, oh… non.

Le plus effrayant, c’était la douleur.

Celle qui me dévorait la jambe ainsi que celle qui m’empêchait de respirer. Et cette douleur là était bien réelle : elle était aiguë et glaçante, se faufilant dans mes veines brûlantes jusque dans les profondeurs de mon cœur.

Ce n’était pas juste un rêve.

Cette nuit-là, la douleur était bel et bien réelle.

Cette nuit-là, j’étais persuadée, encore aujourd’hui, qu’ils étaient tous bien réels.

Je ne saurais dire combien de nuits ça avait duré.

Peut-être des semaines, ou bien des mois ?

Et puis du jour au lendemain, tout a changé.

Il régnait une atmosphère plus sinistre que par habitude.

Je me souvenais du temps écoulé, de cette voix qui les rappelaient, de ces ombres qui regagnaient l’énorme trou les unes après les autres, de cette forme qui n’avait pas respecté le délai imparti, et de son corps de fumé que j’avais vu disparaître. Si les ombres pouvaient exploser, alors celle-ci avait été le déclencheur d’un sacrilège ardent dont j’en gardais encore de profondes traces bien ancrées sur les paroies brisées de mon esprit.

C’était la sombre et injuste règle établie : si l’un mourrait, je devais prendre sa place.

Parce que j’étais l’objet des tentations sinistres de ces êtres et que, par conséquent, une grande partie de leur non-respect était de ma faute.

Je me rappelais avoir traversé ce trou, comme aspirée par le néant lui-même.

Mais ce qui se trouvait de l’autre côté était tout ce à quoi je m’attendais…

Alors que je pensais trouver un monde fait de sol cendré bouillonnant comme du magma en fusion, de volcans en éruption et de flammes dévorantes, je me suis finalement retrouvée dans la chambre d’un orphelinat à l’atmosphère digne des plus grands films d’horreurs américains. Un vieux bâtiment aux teintes vertes et ténébreuses, dont les couloirs étaient sans fin et n’étaient éclairés que de petites lumières à l’agonie, grésillant leurs derniers mots au-dessus de chuchotis d’enfant qui se répercutaient sur les murs couverts de traces de mains sanglantes.

Et dans cette atmosphère glaçante, ce qui m’a le plus perturber n’était pas les décors horrifiques, mais ces trois autres jeunes filles à peine plus vieilles que moi, qui se tenaient dans la chambre comme si elles y avaient vécues la plus grande partie de leur vie.

Je ne me souvenais plus de leur visage, ni à quoi elles ressemblaient, mais je me souvenais de cette phrase, qui m’avait longtemps tourné en boucle dans la tête.

– Encore une ! Décidément, ils ne s’arrêtent plus maintenant… avait soupiré l’une d’entre elles.

Je ne connaissais pas son nom, mais je me souvenais de sa double voix aux teintes maléfiques qui résonnait sur les murs et faisait grincer la fenêtre barricadée de panneaux de bois recouverts de moisissure intemporelle.

– Ils la cherchent encore, sans doute, mais depuis le temps…

– Ah ! Maudite Méli-

– Tais-toi, grinça la première.

Ce n’était que des bribes de phrases qui me paraissaient incohérentes et lointaines, mais avec le temps, j’avais fini par comprendre qu’il s’agissait bien plus que cela.

C’était celle qu’ils cherchaient, et ils rassemblaient celles qui s’en rapprochaient le plus, les enfermant dans une prison de songes obscurs clôturée de peurs et d’angoisses nocturnes.

Ce rêve me revenait chaque nuit, et ce, durant de longues semaines. Je restais là, assises dans un coin dans la chambre, écoutant ce trio féminin parler de choses que j’imaginais comme le “monde d’en bas”. Je restais là, assise à regarder leur corps flétrir comme une fleur fanée, comme une chenille tissant un cocon pour pouvoir se transformer en papillon démoniaque au venin amer. mortel.

C’était un processus long et pourtant, j’avais la ferme impression qu’elles n’avaient jamais remarquer les maléfiques changements qui mutilaient leur corps et les ouvraient en deux pour en faire sortir une âme sombre, déployant leur ailes jusqu’aux abysses du monde d’en bas.

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2 commentaires

Dixy

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Il y a un an

Likes de soutien ❤

Jessica Goudy

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Il y a un an

Je te soutiens dans ton écriture 🥰 N'hésite pas à me lire aussi si le coeur t'en dit 🙏😘
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