Fyctia
Chapitre 1 Ana
J’ai perdu la notion du temps mais la brûlure qui échauffe mes muscles m’indique que cela fait un moment que je cours sur la piste. J’aime venir ici quand ce cauchemar me sort du sommeil et que les images sont trop présentes pour réussir à les effacer. Même en pleine nuit. Sur ce circuit, je me sens proche de lui. Son absence est toujours autant difficile. Mais venir ici me fait du bien.. Nous y avons tellement de souvenirs que c’est comme ci il était encore avec moi à cet instant. Une larme roule sur ma joue à l’évocation de son souvenir.
Ma playlist au maximum dans mes oreilles, je prends la route du retour.
Les bâtiments défilent à mesure que mes pas me guident à travers la ville. Je fais une halte au café prêt de notre résidence pour emporter leur délicieux latte macchiato caramel, et n’oublies pas le breuvage noir de mon amie accompagné d’un muffin aux myrtilles, son préféré. Mon estomac est encore bien trop retourné pour réussir à avaler quoique ce soit.
Lorsque je franchis le seuil de notre appartement, je suis accueillie par ma coloc.
- Salut beauté! lance t-elle depuis le salon
- Hello, t’es bien matinale! je remarque en jetant un oeil à ma montre qui n’affiche que 7h.
- Hum, je sais, mais je t’ai entendu, m’avoue t-elle le regard triste.
- Oh! je réponds gênée, sachant qu’elle fait allusion à mes cris dans mon sommeil.
Ce n’est pas la première fois. Au début, mes songes étaient si intenses que j’en criais. Elle me rejoignait dans ma chambre, me prenait dans ses bras et nous pleurions ensemble. Au fil des mois, j'ai fini par exiger qu'elle ne vienne plus. La douleur de la voir souffrir aussi était insupportable.
Elle ne cherche pas à en parler davantage et me remercie pour la gourmandise quand je file sous la douche. L’eau chaude détend mes muscles endoloris. Je lève ma tête vers le jet et me répète mon nouveau mantra.
“Accepte ce qui est, laisse aller ce qui était, aie confiance en ce qui sera.”
Ce genre de petites phrases me font du bien et fonctionne, la plupart du temps, pour chasser les idées noires.
Judith en à afficher un peu partout dans ma chambre, sur tout un tas de post-it colorés.
On se connait depuis nos 12 ans quand, nouvelle, elle est arrivée au collège et ne connaissait personne. Elle ne s’est pas gênée pour mettre son poing dans la figure d’un de nos camarades de classe qui se moquait d’elle pour sa grande taille. J’avais pris sa défense auprès de notre professeur, et depuis on ne s’est pas quitté.
Sa répartie non plus, ne l’a pas abandonné et c’est sans frapper qu’elle entre dans ma chambre, me sortant de ma rêverie.
- Tu dois m’aider, beugle-t-elle d’une voix désespérée. Elle enchaîne en faisant les cent pas. Tu te rappelles de Justin?
- Hum, le type du bar, ou de la salle de sport?
- La salle de sport, Ana, la salle de sport! Suis un peu! s'impatiente-t-elle.
- Ok, oui, je souris face à sa mine faussement outrée, en quoi je peux t’aider? je la questionne ne comprenant pas ou elle veut en venir.
- Tu dois y aller pour voir s’il drague d’autres filles!
Tu rigoles, j’espère Ju’, je m’esclaffe, tu sais très bien que je n’aimes pas y aller. Puis si tu as des doutes, c'est déjà mauvais signe, je lui fais remarquer. Je pensais que tu voyais, l’autre là, Marc, j’hésite un instant sur le prénom.
- Pfff non c’est fini, il n’en valait pas la peine.
- Je vois, je rétorque prudemment pas certaine de quoi lui répondre, toi même tu sais que je ne suis pas la mieux placée pour parler de relation amoureuse. En 23 ans, j’ai connu très peu d’hommes. Maintenant, j’ajoute en remarquant l’heure, si tu veux bien prendre tes affaires pour qu’on y aille, tu me raconteras en chemin.
Nous arrivons au circuit rapidement. Mon père nous accueille chaleureusement en nous serrant dans ses larges bras. Ce circuit est dans notre famille depuis 3 générations et il se donne corps et âme pour que cela continue. Ici, je me sens chez moi, si je pouvais j’y vivrais, même si c’est tout comme, vu le nombre d’heures que j’y passe.
- Voila les plus belles scande t-il fièrement en ouvrant la double porte du hall d’accueil. Faut qu’on parle, m’interpelle t-il de but en blanc d’un air inquiet.
- Aïe, intervient ma sœur de cœur, je vous laisse discuter, ajoute t-elle en prenant place derrière l’accueil. Poste qu’elle occupe depuis 3 ans.
Le circuit n’est pas encore ouvert au public, il nous reste une bonne heure avant que les premiers clients arrivent. J’aime arriver avant l’ouverture pour prendre le temps de saluer mes collègues et refaire le point sur mes rendez-vous de la journée. Je suis un peu le bras droit de mon paternel, donc je gère à la fois le personnel, le relationnel avec les fournisseurs mais aussi tout ce qui touche à la communication. Judith m’assiste un peu dans cette dernière tâche, mais elle se concentre un peu plus sur tout ce qui touche aux réseaux sociaux, en plus de s’occuper de l’accueil. Nous avons toutes les deux obtenu notre master en communication et marketing, elle sort d’une école de commerce, moi de management.
- Tu vas cracher le morceau papa, je demande inquiète.
- C’est Fred, il nous quitte! il balance dans un souffle en me tendant ce qui semble être une lettre de démission.
Frédéric, un de nos mécaniciens instructeurs, veille à la maintenance et à la réparation de tout notre parc de voitures et de karts. Il a également en charge une partie des stages de conduite que nous proposons. Cette annonce ne m’étonne pas plus que cela.
- P’pa, t’inquiète pas je me doutais que ça allait arriver, donc j’ai pris les devants et ai déjà posté une annonce sur les différents sites internet de recherche d’emploi.
- Comment ça? s'interroge-t-il, sans m’en parler? Depuis quand es tu au courant? il débite ses questions.
- Tu voulais que je prenne des initiatives pour l’entreprise? Surprise! Je marque un temps et affiche un grand sourire. Ecoute, je le rassure en prenant sa main dans la mienne, quand il m’a annoncé que sa femme était enceinte et qu’elle souhaitait se rapprocher de sa famille sur la côte, je me suis doutée que ce jour arriverait.
- Tu as bien fait, je le reconnais, cède t-il. Il va nous falloir commencer les entretiens dès la semaine prochaine car il part dans quinze jours. Tiens moi au courant exige t-il en partant.
Je rejoins mon bureau à l’étage, loin de l'effervescence et de l’afflux des clients.
Ces dernières années, j’ai perdu le goût du contact avec la clientèle, le cœur n’y est plus. Je l’ai perdu en même temps que ma moitié.
NON se réveille ma conscience tu ne peux pas flancher au travail!
Elle a raison, je ravale ma souffrance qui menace de me submerger et m’enferme dans ma bulle.
Ce n’est que l’arrivée de Judith pour la pause déjeuner qui m’en sors, mais je refuse, comme souvent, je simule une montagne de travail. Je mangerais un bout seule, dans mon bureau. Elle n’est pas dupe mais n’insiste pas.
Lorsqu'elle réapparaît, je suis éreintée mais elle réussit à me convaincre de sortir car “après tout on est samedi!”
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