Fyctia
Chapitre 15 Léria 2/2
Vous savez quoi ? Le Corsica Cola a le goût du coca en moins sucré.
Sur le chemin qui me ramène au stand 13, je découvre avec un petit pincement au cœur que le beau coquillage que je désirais à disparu. Il faut croire que quelqu'un a été plus rapide que moi... Je ne peux m'empêcher d'en vouloir un peu à Antone d'avoir empiété sur mes envies. D'ailleurs, en parlant de lui, je ne le vois nulle part... Peut-être y ai-je été un peu fort avec mon instance d'éloignement, mais il en va de ma santé mentale que lui et moi trouvions un terrain de réconciliation. Pour qu'il y ait la paix, il faut qu'il y ait la guerre, non ?
C'est donc avec cette dernière trouvaille philosophique en tête que je regagne le présentoir de tous mes cauchemars. J'y retrouve les garçons qui ont déjà bien entamé le travail, je mets donc à mon tour la main à la patte. Très rapidement, l'ensemble du matériel et le petit restant de marchandise sont chargés dans la camionnette.
Nous avons été plus que productif et heureusement, car les couleurs que prend le ciel laissent envisager une bonne averse. Raison pour laquelle Chris ne tarde pas à rentrer, me laissant à nouveau seul avec une réplique agrandie du Lutin Grognon.
Comment expliquer la tension qui règne entre nous sur le chemin... Disons qu'il y a de l'électricité dans l'air, et que je ne parle pas de l'orage.
- Décidément, je suis plus douée pour le rangement que la vente, affirmé-je pour détendre l'atmosphère.
- Vu ton talent pour tout déranger, ça relève de l'exploit, ronchonne la foudre en personne.
- Oh, mais tu serais surprise de toutes mes qualités, je rétorque alors, toujours avec le même objectif.
Parler avec Antone, c'est comme jouer avec le feu. Sauf que là, je ne risque pas de me brûler, mais de finir électrocutée.
- Être gourde et parler comme un camionneur ne sont pas des qualités.
- Être lunatique et mutique non plus, je le contre sur le même ton tout en décochant un coup de coude dans ses côtes.
- Et violente de surcroit ! Je me demande si tu as vraiment des qualités finalement...
- Oh ! je m'exclame mi-outrée mi-amusée, alors que lui-même m'assène un coup de coude en me répondant.
Notre combat à mains nues s'arrête net quand le tonnerre se met à gronder si fort que je pourrais en voir trembler le sol. L'explosion retentie dans le ciel, suivit d'une succession d'éclairs grandioses qui strient le panorama d'une lumière peu naturelle. Il n'y aura eu qu'un appel avant la pluie. Avant que des milliers de gouttes ne viennent embrasser ma peau.
- Vite on va finir trempé ! je m'exclame tout en accélérant le rythme.
- Pourquoi faire ? La pluie n'est un problème que si tu es en sucre, tu sais.
Antone maintient son allure sereine. L'eau plaque déjà ses boucles d'ébènes contre son visage et sa chemise blanche sur son corps. Même en pleine averse, il se déplace comme si la terre lui appartenait.
Je m'arrête alors, étudiant sa démarche et les lignes de son corps qui se mouve dans l'espace. C'est ainsi que, pour la première, je le vois. Il est sa philosophie de vie incarnée. Il est le caractère de ces terres et l'esprit des gens qui y vivent. Son corps est une statut gravée aux traits aussi abrupts et saisissants que les récifs de cette île. C'est une peinture sauvage, un poème en prose. Il est l'œuvre et la muse.
- Tu viens ? demande Antone déjà arrivé à ma portée tandis que je rêvasse.
Je suis à moitié là lorsque je lui réponds durant le reste du trajet. Je suis à moitié là quand il saisit un pant de mon débardeur trop grand pour me pousser à sa suite afin que j'aille plus vite.
Ce n'est qu'en arrivant au véhicule que je réalise tout le chemin que nous avons fait.
- On va ruiner les sièges, je m'entends dire.
- J'ai des serviettes dans le coffre, ça limitera les dégâts, répond-t-il.
Et tandis que je me dirige vers l'arrière du véhicule, sa voix me rattrape.
- Attends ! Je... Je voulais juste...
Je sens qu'il cherche ses mots. Ou plutôt qu'il ne sait pas comment les faire sortir. Antone regarde le ciel comme s'il allait lui tomber sur le nez tandis que sa main s'agite d'un tic nerveux. Son hésitation me ramène à la réalité, je me rapproche alors de lui.
Il profite de cette occasion pour saisir mes mains. Elles sont toutes petites par rapport aux siennes, calleuses et cloquées.
Ma respiration se fait saccadée, et lorsqu'il dépose dans mes mains le petit coquillage que voulais, je sens qu'elle se coupe.
- Mi scusu, murmure-t-il entre les goûtes de pluie.
Sa prise se fait plus ferme lorsque je plonge mes yeux dans les siens. Je ne cherche pas à cacher le sourire abrutis et incontrôlé que je sens naître.
- Tu veux bien qu'on maintienne notre accord ? s'enquiert-il avec un regard trop soucieux pour que j'aie l'idée de le malmener. Même si je ne sais pas tout le temps rester calme ?
- Tu le veux toujours, même si je suis le plus pigeon des touristes ?
- Ca, on fera en sorte d'y remédier, dit-il en se mettant à sourire aussi.
Nous restons ainsi quelques secondes de plus, avant qu'il ne relâche son étreinte et que moi, j'emprisonne ce précieux coquillage près de mon cœur. Nous grimpons ensuite dans le Ford, plus trempés que jamais après cet instant que j'ai vécu en slow motion mais où la pluie n'a pas cessée de tomber.
Cette fois-ci, la radio ne se fait pas prier et démarre à l'instant. Lui et moi passons donc le trajet sans prononcer un mot. Rien d'autre ne résonne dans l'air frais et humide que ma voix qui chante ces musiques que je ne connais pas. Il ne dit rien, mais il ne m'arrête pas non plus et même que parfois, je vois ses doigts rythmer l'ère sur le volant. Tout du long, je ne peux m'arrêter de sourire face à l'évidence qui me saisis.
Je veux que ce soit ça ma vie. Rouler les fenêtres ouvertes sous la pluie.
NDA : Il s'agit certainement du dernier chapitre qui sera disponible avant la fin du concours. Alors un grand merci à ceux qui ont pris le temps de me lire, me conseiller et me soutenir. C'est une longue course que j'ai dû laisser en cours de route mais il n'empêche que cette histoire me tient à cœur et que j'espère la finir, tout en profitant du temps supplémentaire pour l'améliorer.
Malgré l'empressement dans sa réalisation, "Sous le Soleil d'Août" a été mise en avant dans la catégorie histoires immersives sur Instagram et lectures amusantes dans la rubrique de cette semaine alors encore une fois merci pour ça ! C'est ma première publication sur fyctia, et je pense pouvoir dire que ce ne sera pas la dernière ! <3
20 commentaires
Maryline PIAUD
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Il y a 2 ans
perrine0382
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Il y a 2 ans
snliska
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Il y a 2 ans
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Il y a 2 ans