Fyctia
Chapitre 24 - Aria 1/2
Plantée les bras croisés devant le démon qui me sert de baby-sitter, je boue. Voilà deux heures que nous nous tenons tête et il ne mâche rien. Moi non plus. J’ai tout essayé. La douceur, la force, la ruse. Le mec est bien trop malin pour se laisser avoir et je maudis Kexen de me l’avoir collé aux fesses.
— C’est quoi ton nom ?
— Loxis.
— Eh bien, Loxis, sache que ce n’est jamais bon d’énerver une femme. Elle pourrait te faire vivre un enfer.
Il rit, fait un pas et me surplombe de toute sa hauteur.
— Aria, c’est ça ?
J’opine sans bouger. Je pourrais baisser les yeux face à sa carrure, à son regard si semblable à celui de son ami, mais il en est hors de question. J’ignore d’où me vient ce courage que je sens à toute épreuve, ni pourquoi le danger m’attire tout à coup. Cependant, j’aime ça.
— Eh bien, sache, Aria, que je m’attire les foudres de dizaines de démones tous les jours. Une simple humaine n’aura jamais ma peau. Et pour info, l’enfer, j’y suis déjà.
Voilà ce que ça donne depuis que Kexen a disparu. On se lance des pics à tout-va. On se chamaille comme des enfants et, le pire, c’est que je crois qu’il adore ça.
Je plisse les yeux pour la énième fois, grogne et son sourire insolent décuple ma hargne. Je feinte de vouloir le contourner, il se décale en un éclair pour me couper la route et je me baisse pour tenter de passer entre ses jambes.
J’ignore à quoi je m’attendais. C’est peine perdue.
En moins de deux, il encercle ma taille et me soulève comme une plume. Tête en bas, je me débats, pendant qu’il se marre à gorge déployée. Je refuse de me rendre à l’évidence. Jamais je n’aurai le dessus sur lui. Pourtant, dans un élan de désespoir, mes doigts attrapent l’une de ses mèches de cheveux aussi blancs que la neige et il gronde.
— Lâche-moi, sale garce !
— Pose-moi d’abord, démon à gueule d’ange !
— Merde, t’as de la chance que j’ai interdiction de te tuer ! T’aurais pu te rendre contre à quel point je suis loin de ces crétins à plumes.
Ses muscles durs comme de la pierre se tendent à mesure que j’agrippe plus fort sa tignasse en bataille.
— Si ça ne tenait qu’à moi, je te filerais à bouffer au premier Sépir qui passe, enrage-t-il.
Je ne sais toujours pas à quoi ressemblent ces créatures, mais quelque chose me dit que personne ne voudrait se trouver nez à nez avec elles.
Le sang me monte à la tête pendant qu’il me secoue comme un prunier pour tenter de me faire lâcher ses cheveux. Puis, lorsque mes doigts entrent en contact avec la peau brulante de son flanc afin d’essayer de me stabiliser, il se raidit et ricane.
Non, impossible.
Sans attendre, je réitère et cette fois, je m’efforce de le chatouiller au même endroit. Sa réaction est immédiate. Il me balance sur le lit qui trône contre le mur et recule.
Je me redresse et arque un sourcil.
— T’es chatouilleux.
Il lève le nez, indigné, et secoue la tête.
— Jamais de la vie. Plutôt crever.
Je saute sur mes pieds, amorce un pas dans sa direction et le démon sort un poignard de derrière son dos tout en me pointant du doigt.
— Un conseil, ne bouge pas !
Au même moment, la porte derrière moi s’ouvre et je repère Kexen par-dessus mon épaule dont les pupilles voguent entre moi et son ami.
Il scanne ensuite la pièce que l’on a retournée et soupire.
— Putain, mais qu’est-ce qui se passe ici ?
Je pointe Loxis du doigt qui écarquille les yeux et m’imite l’instant qui suit pour me désigner coupable.
— Écoute mon pote… je sais pas qui est cette nana, mais moi, j’me tire. Elle est ingérable. Pire que Kalia. J’te jure.
Sans laisser l’occasion à Kexen d’en placer une, il ramasse l’un des fruits délicieux que j’ai goutés un peu plus tôt et claque le battant en bois derrière lui en sortant.
Amusée, je me mords les lèvres pour m’empêcher de rire et suis Kexen du regard alors qu’il redresse une chaise qui a terminé au sol. Curieuse, je détaille son corps recouvert de cette substance noirâtre et mes iris tombent sur l’entaille profonde située sous ses côtes. Si le reste du sang qui le recouvre n’est pas le sien, celui qui s’écoule de sa plaie, lui, l’est.
L’inquiétude qui me serre la gorge me surprend moi-même. Je n’ai aucune idée d’où ça sort. Je ne peux pas le détester et me faire du souci pour lui à ce point. Impossible. Ou bien, c’est cette attirance inexplicable elle aussi qui en est la cause ? Ça n’a aucun sens.
Sans le contrôler, je réduis la distance qui nous sépare et mon index frôle le pourtour de sa blessure. Il serre les dents et ses orbes bordés d’argent glissent sur moi pour me fusiller.
— Qu’est-ce que tu fous ? crache-t-il.
J’éloigne aussitôt mon doigt et grimace.
— Est-ce que tu as mal ? On devrait soigner ça.
Le démon ricane, amer.
— On ? Depuis quand tu te fais du mouron pour moi, Petite Âme ?
J’encaisse sa froideur comme je peux, luttant contre cette part de moi qui le réclame. À la place, je m’accroche à celle qui le hait.
Comme les fois précédentes, un éclair de regret traverse son regard et il soupire.
— C’est rien, les blessures causées par les Sépirs mettent toujours plus de temps à cicatriser.
J’acquiesce, observe la pièce et le bordel que nous avons mis en son absence, à deux doigts de m’excuser. Seulement, je ne le fais pas, la rancune que j’éprouve, bien plus forte. J’ai aussi envie de lui hurler dessus pour m’avoir enfermée ici en compagnie de l’autre tête de mule, mais je me tais. Parce que le voir blessé, vulnérable, ça m’atteint. C’est n’importe quoi. Tout ce que je ressens se mélange, s’entrechoque.
Je devrais exiger qu’il me renvoie chez moi, je veux revoir Seth. Malgré tout, je garde le silence.
Il m’examine une seconde, incline la tête, comme s’il était capable de lire en moi et fronce les sourcils.
— Je vais te ramener.
Interloquée, je l’analyse et cherche à savoir s’il est sérieux. Il récupère une sorte de cape qu’il me balance. OK, il ne blague pas.
— Enfile ça et remonte la capuche. Des Sépirs trainent encore.
Cette fois, c’est lui qui semble soucieux, mais je ne relève pas. Il me rejoint, récupère un peu de son sang avec son pouce et trace deux traits sur chacune de mes pommettes pendant que ses orbes sondent les miennes.
— Il faut couvrir ton odeur au maximum.
Je frissonne, mon rythme cardiaque s’emballe, mais je refuse de me montrer aussi faible. Tout à coup, les raisons de ma présence me reviennent et je me braque.
— Je ne sortirai pas de là tant que tu n’auras pas prêté serment.
Il inspire pour se calmer, se pince l’arête du nez et plante son regard dans le mien. Il hésite, et je lève mon petit doigt à hauteur de son visage.
Les muscles de sa mâchoire tressautent et il se résigne.
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19 commentaires
Adele Maine
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Il y a un an
Idylyne.B
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Il y a un an
lovepassion
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Il y a un an
lovepassion
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Il y a un an
Jakae chappinj
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Il y a un an
Gottesmann Pascal
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Il y a un an