Fyctia
Celle qui tient la glace 24
Sa colère était un incendie. Aussi violente que la combustion chimique de la poudre explosant sous la frappe d’un percuteur pour propulser une balle, les crépitations des impulsions électriques de son cerveau faisaient fuser une immense tempête à travers tout son corps, organique comme mécanique.
Dans un état second dû à la dissociation, Angad combattait comme dans un cauchemar.
Les deux hommes virevoltaient dans une danse terrible, déplaçant la neige sous leurs pas et la fumée mourante dans les mouvements de leurs bras.
Le Russe était doué avec une lame, et visait les articulations et les points faibles de la veste pare-balle intelligemment. Et surtout, il était rapide. Angad venait d’esquiver de justesse deux attaques coup sur coup, évitées au centimètre près. Il n’avait pas le dessus, forcé de rester hors de portée sans pouvoir contre-attaquer. La lame fusa à nouveau, et Angad rejeta la tête en arrière, la voyant passer à quelques millimètres de son visage. Cette fois il parvint à saisir le bras de son adversaire et à retourner son élan contre lui pour le projeter à terre. Il tordit le bras qu’il tenait toujours, et entendit le claquement sec de la tête de l’humérus qui sortait de l’omoplate, juste avant le hurlement de douleur.
Stupidement fair play, il le laissa se relever. Le Russe, son épaule luxée pendant dans le vide, lui lança un nouveau juron hermétique.
Normalement, ce genre de douleur, selon comment l’adversaire gérait l’adrénaline, pouvait soit lui faire perdre pied, soit le rendre fou.
Pas de pot pour Angad, ça le rendit fou.
Sans même s’occuper de récupérer son couteau tombé dans la neige, le Russe le chargea d’une façon si frontale et primitive qu’Angad perdit une seconde à être stupéfait. Fonçant tête la première dans un grondement bestial, l’autre le percuta de plein fouet, si violemment qu’il le décolla du sol. Les deux hommes basculèrent dans la neige.
Erreur de débutant, se dit Angad. Peut-être parce que ça faisait longtemps qu’il ne s’était pas battu aussi violemment. Peut-être parce qu’il commençait à être fatigué — il n’avait pas dormi depuis trente heures. Peut-être parce que sa propre colère l’empêchait d’avoir les idées claires.
Le Russe était au dessus de lui, et cherchait à le maintenir au sol. Dans un sursaut furieux, Angad se redressa et lui rompit l’os frontal du nez d’un coup de tête. Profitant de l’étourdissement, il lui asséna un crochet du gauche en pleine tempe, et parvint à se relever.
Il n’avait pas dû attendre sa prothèse surhumaine pour devenir un combattant redoutable. C’était parce qu’il en était déjà un qu’on l’avait recruté comme cobaye pour Hécatonchires. Ses années de guérilla, il les avait passées à survivre et se battre avec un seul bras.
Il avait traversé quasiment deux ans uniquement dans un brouillard de rage et de chagrin, dans lequel il n’avait pas eu une seule fois peur de mourir tant il était désespéré. Il y avait vu et fait des choses qu’il avait eu ensuite le plus grand mal à raconter en thérapie.
Des choses comme celles qu’il faisait aujourd’hui.
Le Russe se remettait debout, et était en train de tirer un nouveau couteau d’un étui sanglé à sa cheville. Il n’eut même pas le temps de le pointer. La chaussure d’Angad percuta son genou de côté. La rotule se brisa. Le coude mécanique percutant ensuite sa gorge écrasa le larynx, fractura l’os hyoïde, et disloqua les vertèbres cervicales.
Dans un combat à mort, personne ne gagnait. Il y avait juste un survivant à la fin, et un cadavre.
Angad se redressa, haletant, dans un état second.
Une petite voix étouffée l’avertit depuis le dessous de sa manche.
« Votre rythme cardiaque est trop élevé. Vous avez dépassé votre seuil d’effort. Je vous conseille de faire une pause. »
Plus qu’un.
Le nuage du fumigène s’était désormais totalement dissipé. Angad entendit une exclamation gémissante en russe derrière lui. Il pivota et fit face au dernier survivant de l’équipe.
Il avait les deux bras levés, comme si Angad pointait une arme vers lui, alors qu’il n’avait pourtant rien dans les mains. Mais il n’en avait même plus besoin.
« Votre rythme cardiaque est trop élevé, répéta Rashnu.
- Ok, pause. »
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WildFlower
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Mira Perry
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Janicelesmaux
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LouiseLysambre
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