Kassandra Pasquier Skyline Emrys Chapitre 3.2

Chapitre 3.2

Elle me sourit.


— Je m’appelle Aramise.


Sans comprendre pourquoi, son sourire me fit beaucoup de bien. Était-ce parce que c’était le début de ma nouvelle vie et que j’étais décidé à oublier ma vie réelle ? Il y avait de fortes chances que ce soit lié.


Je lui souris en retour.


— Je m’appelle Ch… Lyall. Ravi de faire ta connaissance IG, Aramise.


Elle me fixa sans comprendre.


— IG… Quoi ?


Je me frottai la nuque, embarrassé. C’était le terme employé par Clément un peu plus tôt, non ? M’étais-je trompé ?


— Euh… c’est… IG. In Game. Un mot de jargon qu’un ami m’a appris il y a tout juste une heure. Ce n’est pas le bon mot ?


Elle secoua la tête.


— Non, non ! Tu as certainement raison. C’est ma toute première fois. Je ne connais rien au jargon des jeux vidéo.


— Moi non plus.


Elle se tourna vers le ciel qui se teintait déjà d’orange et d’ocre, annonçant le coucher du soleil dans le monde réel.


— Allons ensemble jusqu’à la ville, proposa-t-elle.


Aramise eut tout juste le temps de finir sa phrase qu’un double bip ! résonna et qu’un bouton rouge se mit à clignoter en face de chacun de nous. C’était un bouton avec une enveloppe. Un message.


Ne sachant pas comment cela fonctionnait, je réagis par instinct et appuyai tout simplement sur le bouton qui venait d’apparaître. Aramise fit de même de son côté, et le même message s’afficha devant nous.


« Salut à vous, Lyall, valeureux guerrier de Midgard. Votre quête est sur le point de commencer. Rendez-vous auprès de l’instructeur Tulis pour recevoir vos recommandations. Il se trouve au centre de la ville de Bellal, au pied de la fontaine.


Bonne route. »


L’expéditeur était inconnu. C’était certainement le système du jeu, tout simplement.


Je fermai la fenêtre grâce à la petite croix en haut à droite et inspectai les environs.


— Bellal, d’accord, mais c’est où ?


— On doit bien avoir une carte dans notre inventaire ou dans le menu, suggéra Aramise.


Mais elle se figea et se tourna lentement vers moi en prenant un air embarrassé et rougit comme une pivoine. Même ça ils l’avaient parfaitement reproduit !


— Je ne sais pas comment ouvrir le menu. J’ai démarré avant d’avoir lu la notice, avoua-t-elle, cramoisie.


J’éclatai de rire, ce qui eut le don de l’énerver.


— J’en étais sûre ; je savais que tu te moquerais !


Je secouai la tête.


— Détrompe-toi ! Je ris parce que j’ai fait strictement la même chose !


Cela la tranquillisa et elle se calma un peu.


— Ah… Reste plus qu’à se débrouiller tous seuls alors.


— Ça ne doit pas être bien loin, la rassurais-je. Nous trouverons bien quelque part un joueur plus expérimenté pour nous montrer.


Elle soupira allègrement en se mettant en marche. Je la suivis. Était-ce seulement pour le jeu ou avait-elle réellement des couettes et des cheveux si châtain clair dans la vraie vie ? En vérité, je n’étais pas certain de vouloir le savoir.


— Et dire que mon frère est là, quelque part, se lamenta-t-elle. Il aurait pu nous montrer.


— Ton frère joue aussi ? demandai-je en songeant à Lucas.


J’imaginais le jeu si nous le faisions ensemble. Cela aurait un côté sympathique, mais paradoxalement, si un élément de ma vie réelle intervenait dans ma vie virtuelle, alors que je cherchais tant à la fuir, tout cela n’aurait plus vraiment de sens. Néanmoins, j’avais fait une promesse à mon frère et j’étais décidé à la tenir. Lucas aurait ce jeu.


— Oui, répondit Aramise tandis que nous traversions la clairière herbeuse.


Devant nous, d’autres joueurs cherchaient certainement à gagner la ville de Bellal, la fameuse ville de départ.


— Je ne lui ai pas dit que je me connectais. Il me l'a offert pour mon anniversaire, mais il m'a interdit de jouer parce qu'il n'a pas aimé la façon dont je lui ai parlé. Je me suis connectée en douce quand j'ai été sûre qu'il était déjà dedans. Je n'ai même pas pensé à lui demander son nom In Game.


Elle rit et nous suivîmes simplement le mouvement de joueurs. Et tout était réel : nous marchions. Respirer, penser, bouger était aussi simple qu’avant, au détail près que rien de ceci n’était réel au sens strict du terme.


Il ne fallut pas trois minutes pour que les lumières de la petite ville attirent notre regard tandis que le soleil disparaissait à l’horizon. En fait, elle n’était vraiment pas loin. Elle était seulement masquée par des arbres et nous ne pouvions pas la voir de notre point de départ.


Aramise me la désigna du doigt.


— Bellal !


Pour ma part, je fixais le ciel. Il semblait que le temps virtuel était connecté au temps réel. Il devait y avoir des serveurs différents par fuseaux horaires. Si je me connectais le soir, je ne verrais ce jeu jamais que de nuit, excepté durant les week-ends…


Nous passâmes la porte à double battant qui marquait l’entrée de la ville et découvrîmes l’étendue et la puissance pharaonique et colossale de ce jeu. La réalité virtuelle était d’une exactitude acérée et renversante. Tout ce que nous touchions avait une consistance sous nos doigts. Tentant de bouger un mur, j’y pris appui et poussai de toutes mes forces pour en appréhender la consistance. Autant essayer de bouger un mur dans le monde réel, c’était strictement pareil. Il en allait de même pour la vue. Nos yeux reconnaissaient l’existence et la dimension de chaque chose. Nos oreilles captaient tous les bruits de l’agitation urbaine et la douce musique de fond du jeu, rien de comparable avec le silence feutré de nos chambres respectives où notre corps physique se trouvait.


Je voulus acheter une pomme pour voir quel goût elle avait, mais je n’avais pas encore d’argent.


— C’est incroyable, murmura Aramise en faisant un tour sur elle-même. On dirait la réalité. Tout a l’air tout à fait réel ! Enfin, aussi réel qu’un décor médiéval l’était à l’époque, je supposais.


J’acquiesçai, tout aussi impressionné qu’elle. De plus, les effluves des étals marchands alimentaires de la rue me mettaient l’eau à la bouche et faisaient grogner mon ventre. On ressentait donc même la faim, dans ce jeu ! L’Infinity Drive se connectait vraiment à tout le cerveau…


— Trouvons l’instructeur Tulis, suggérai-je en prenant la direction du centre-ville.


Elle m’emboîta le pas.


C’était, somme toute, une petite ville agréable avec un charme à l’ancienne. Les rues étaient pavées, les maisons colorées et pas plus hautes que deux étages et elles étaient fleuries. On n’y trouvait bien sûr pas de voitures ou d’engins motorisés ; tout le monde se déplaçait à pied, mis à part quelques animaux qui tractaient les charrettes des personnages du jeu.

Il ne fut pas difficile de trouver l’instructeur et la fontaine au pied de laquelle il se trouvait. Une multitude de joueurs de niveau 1 étaient agglutinés tout autour.


— Tu sais, c’est un jeu international. Des joueurs du monde entier se retrouvent sur un même serveur, souffla Aramise.

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1 commentaire

Lexa Reverse

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Il y a 3 ans

chapitre sympa à lire, merci ! Lexa
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