Fyctia
Chapitre 15 : Menace
Le tumulte des journalistes s’efface dans mon dos, étouffé par le vent froid qui balaie la rue.
Mes pas sont légers.
Les sien, calculés.
L’homme marche d’un pas régulier, ni pressé ni trop lent. Comme s’il savait exactement où il allait. Comme s’il savait que quelqu’un le suivait. Comme s’il m’attendait.
Chaque fibre de mon corps hurle que c’est un piège. Mais je continue et tourne dans cette ruelle déserte. Il prend le chemin sur la droite glissant dans l’ombre entre deux immeubles de briques. Mon pouls s'accélère, j'attends quelques secondes au coin de la petite rue hésitante.
Je pourrais faire demi-tour. Rejoindre les autres, me fondre dans la masse.
Je pourrais ne pas jouer avec ma propre survie.
Mais mon pied avance tout seul. Ma curiosité me tuera un jour, peut-être aujourd'hui. Je serre le badge de presse, baisse la tête et le suis.
Erreur.
À peine ai-je mis un pied dans la ruelle qu’une main surgit de l’ombre.
Rapide.
Je n’ai même pas le temps de réagir avant que mon dos claque violemment contre le mur en briques me coupant la respiration. Un petit gémissement de douleur et de surprise sors de mes lèvres puis je sens une poigne ferme sur mon cou et un souffle chaud contre mon oreille, m'empêchant de crier. Enfaite c'est faux, je pourrais sûrement crier mais je suis paralyser par la peur.
"C’était une très mauvaise idée, me dit une voix rauque."
Ma gorge se serre et je lève les yeux.
L’homme en costume est grand. Plus grand que moi, plus imposant, une présence qui écrase tout autour de lui.
Un costume impeccable, ajusté à la perfection. Noir, sobre, neutre. Un uniforme d’ombre. Sa chemise est légèrement ouverte au col, un détail maîtrisé. Pas négligé, pas trop parfait non plus. Juste ce qu’il faut pour inspirer quelque chose d’indéfinissable, entre le danger et je ne sais quoi d'autre.
Un visage avec des traits anguleux et une mâchoire carrée assez prononcée. Une beauté glaciale, méthodique, sans la moindre faille. Pas une once de fatigue, pas un signe de faiblesse.
Et pourtant…
Ses yeux.
Durs.
Froids.
D’un gris métallique, presque trop clair. Un regard qui transperce, analyse, juge. Il n’a pas besoin de froncer les sourcils pour avoir l’air sévère. Il est sévère. Quand il parle, sa voix est basse, contrôlée. Aucune intonation superflue, juste ce qu’il faut pour qu’on l’écoute.
Mais c’est sa main.
Sa main sur mon col.
Ses doigts longs, fermes.
La pression maîtrisée.
Pas assez forte pour m’étrangler. Juste assez pour que je sente chaque battement de mon propre cœur cogner contre mes côtes.
Il pourrait serrer.
Il ne le fait pas.
Mais il veut que je sache qu’il pourrait. Et c’est encore pire.
Son regard est tranchant et froid, il a un sourire d’homme qui sait qu’il a déjà gagné.
Il n’est pas un journaliste.
Il n’est pas un flic.
Il est l’autre catégorie. Celle qui opère dans l’ombre.
Mon cœur bat trop vite, trop fort.
Je tente de bouger, mais sa prise se resserre.
"Je ne fais que mon travail, dis-je d'une voix tremblante."
Il ne sourit pas.
"Non."
Ne pas paniquer.
Son regard scanne mon visage, puis glisse jusqu’à mon badge.
Un silence.
Il sait.
Il sait que je n’ai rien à faire ici.
Je sens mon souffle devenir court. L’air est trop lourd.
"Je suis journaliste, insistais-je
— Non, Eli."
Mon sang se glace.
Il connaît mon nom.
Un frisson glacé me traverse l’échine.
Je suis foutue.
Je tente de me dégager, mon genou prêt à frapper mais il anticipe et me plaque à nouveau contre le mur avec plus de force m'arrachant un petit cri, rapidement étouffé par sa main se pressant un peu plus sur ma gorge.
"Écoute-moi bien."
Son ton est étrangement calme comparé à moi qui suis au bord de la crise d'angoisse.
"Si tu tiens à ta vie, tu vas arrêter."
Je retiens mon souffle.
"Arrêter quoi ?"
Ses doigts se crispent sur mon col.
"Tout."
Il relâche légèrement sa prise et l'air passe un peu plus facilement.
"Ce que tu cherches, ce que tu crois savoir…"
Il s’arrête. Pèse ses mots.
"Ce n’est pas ton combat."
Ma mâchoire se contracte.
"Ça l’est devenu."
Un éclat passe dans ses yeux. De l’irritation ? De l’amusement ?
Il secoue lentement la tête.
"Tu penses être prête pour ça ?"
Il se rapproche plus menaçant, ses lèvres presque contre mon oreille.
"Tu ne l’es pas."
J'arrive à distinguer un bruit à travers tout ce chaos dans ma tête.
Des voix au loin.
Je tourne mon regard vers la source et comprends que c'est surement un journaliste qui s’approche de la ruelle.
En une fraction de seconde, l'homme qui menaçait ma vie, recule et me relâche. Ses pas sont silencieux lorsqu'il s’efface dans l’ombre et disparaît comme s’il n’avait jamais été là.
Je reste figée.
La respiration hachée.
Le cœur battant contre mes côtes comme un avertissement. Je reçois un message sur mon téléphone prépayé, et je le regarde d'une main tremblante au bord de la crise.
Le numéro de Noa.
Soudain mon cœur devient plus léger et j'ai envie de pleurer de nerfs.
J'avais raison sur le code couleur, ils ne tuent que les rouges.
Et les couleurs dépendent de la menace que doivent représenter les figurant sur la liste.
Noa est hors de danger.
Pour l'instant.
3 commentaires
lea.morel
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Il y a 2 mois
La_petite_plume
-
Il y a 2 mois