Fyctia

Livia.

Juillet 2024, 22h02. Le commencement.

Partie 1.

C’est le jour-j. Enfin, nous partons en vacances. J’attends ce moment depuis… l’année dernière, à la fin des anciennes vacances. On part tous les ans dans le même camping. C’est bien pour ça que j’ai hâte d’y aller. Et qu’à peine la saison finie, je veux déjà être à la prochaine.

Je retrouve mes meilleurs amis, que je ne vois que là-bas puisqu’ils habitent aux quatre coins de la terre. Bien sûr, le reste de l’année, nous avons nos téléphones, alors on s’appelle souvent, mais les revoir reste le meilleur moment de mon année. C’est comme si on ne se quittait jamais. On se retrouve et on s’entend toujours aussi bien.

La petite Livia de dix-neuf ans - moi - a tout de même bien changé depuis ces années. Nous y allons avec ma famille depuis que je suis née. Même depuis que mon père est né, en fait. C’est un endroit devenu très familial, on se connaît tous et on s’éclate durant les deux mois d’été.

— Livia ! j’espère que tes affaires sont prêtes, nous partons dans dix minutes ! m’appelle ma mère du haut des escaliers.

Je ferme ma valise, vérifiant en un coup d'œil que je n’ai rien oublié dans ma chambre. Je dévale les escaliers sous les réflexions de mon père qui pense que je vais tomber. Je n’y peux rien si je suis pressée.

— Ma sœur, faudrait peut-être que tu grandisses un peu.

Je lève la tête vers la brune au yeux bleu perçant qui me fait presque peur, me fixant de sa grande taille. Non pas que je suis petite, mais elle reste bien plus grande que moi.

Je hausse les sourcils, ne faisant pas attention à ma sorcière de sœur.

Nous sommes toutes les deux, même si j’aurais vraiment aimé avoir un petit frère. Roxanne est une vraie sorcière dans son genre. Elle a été toute seule pendant six longues années avant que je débarque dans sa vie. Elle m’a toujours détesté, même si je ne comprendrais jamais pourquoi. Ah, si. Elle voulait que je sois un garçon.

Quand j’étais petite, je me souviens qu’elle m’avait coupé les cheveux très courts. Elle me donnait aussi des petites voitures, des circuits, des dinosaures… Elle voulait me transformer, mais comme c’était ma grande sœur, je l’écoutais.

C’est peut-être pour ça que j’ai toujours été un peu à part. Je n’ai pas beaucoup d'amis et les seuls que j’ai ne sont quasiment que des garçons. Je n’ai jamais connu l’amour non plus. Qui voudrait bien de moi ?

Cependant, cette année… tout a changé. Je suis devenue la femme que je voulais vraiment être. Je fais attention à comment je m’habille, je me maquille aussi un peu… Je suis vraiment moi. Je me suis peut-être trouvé un peu tard, mais me voilà.

C’est donc la nouvelle Livia qui va débarquer au camping cet été. Prête à rencontrer un garçon avec qui passer ces deux mois. J’en ai plus que marre des critiques de ma sœur qui me dit que je resterais seule toute ma vie. Elle a tort et je vais le prouver.

— Vous êtes prêtes les filles ? nous demande notre père.

J'acquiesce simplement de la tête. Mon père finit de charger les derniers bagages et nous voilà parti pour dix bonnes heures de voiture. Assise à côté de ma sœur, je ne vous raconte pas l’enfer.

Je sors mon cahier et un stylo pour gribouiller certaines phrases dedans. Je veux que cet été soit mémorable, alors j’ai décidé de l’écrire. Un peu comme un journal intime.

— On reste chacune de notre côté, cet été.

Je hausse les épaules sans avoir aucune réaction face à ma sœur. Elle dit ça comme si on avait déjà passé des moments ensemble. Alors même l’été, c’est chacun ses amis, chacun ses sorties.

— Roxanne… intervient ma mère.

Ma mère n'intervient jamais dans nos conflits, si bien que Roxanne a toujours été la petite protégée des parents. Je m’en tape un peu, même si c’est embêtant, car ils prennent toujours parti pour elle.

J’en ai parlé à ma mère qui m’a dit que j’étais jalouse, alors que c’est clairement l'inverse. Depuis, elle fait ce genre de petites réflexions : “Roxanne, laisse ta sœur tranquille” ; “Roxanne, soit gentille avec elle.” ou bien d'autres petites phrases ridicules qui n’ont aucun intérêt. J’ai décidé de ne plus prêter attention à ces chamailleries de gamine. On a plus l’âge.

— Si tu te trouves un mec avant moi, je te respecterais, petite sœur. Ce qui m’étonnerait vraiment…

L’ancienne Livia n’aurait même pas réagi à ça, car les mecs, ce n'était pas mon truc. J'en avais assez avec mes amis. Et je n'avais pas confiance en moi pour me trouver quelqu'un. Si on ne s'aime pas soi-même, on ne peut aimer personne. Mais maintenant, je sais que je suis capable d'avoir une personne à mes côté pour ces deux mois. J'ai pris un peu confiance en moi. Dire que je m'aime est par contre encore un peu compliqué. C'est dur de s'aimer.

Je veux juste montrer à mon aînée que je suis capable, maintenant. Que j'ai changé. Que je ne suis plus la petite Livia qui se laisse faire.

— Deal, dis-je en lui tendant ma main.

Elle s'esclaffe comme une gamine avant de me serrer la main que je lui tends.

Je m’endors au bout de quelques minutes bien silencieuses pour ce début de vacances.