izoubooks Rose Chapitre 3.2 - Nine

Chapitre 3.2 - Nine

"Cette pensée tourne en boucle dans mon esprit. Et pourtant, j’ai un mauvais pressentiment."


Charly se redresse. Il enfonce les mains dans les poches de son jean et me fait face. Nous ne sommes séparés que par un mètre mais j’ai l’impression qu’il n’a jamais été aussi loin de moi qu’à cet instant.


— C’est la dernière fois que nous nous voyons. Je quitte Boston ce soir.


Mon coeur loupe un battement. Puis un autre. Et encore un.


— Quoi ?


Il ne répond pas.


J’encaisse la nouvelle sans avoir envie d’y croire. Immobile, je me contente de cligner des yeux en attendant qu’il poursuive, qu’il m’en dise plus ou qu’il m’annonce que ce n’est qu’une mauvaise blague. Les secondes défilent lentement. Bien trop lentement pour que ce ne soit qu’une simple plaisanterie.


Je me sens fiévreuse. La chaleur tambourine contre mes tempes. J’ai l’impression que je suis en train d’étouffer. L’air n’atteint plus mes poumons.


Il me regarde à peine. Il préfère donner un coup de pied dans un caillou qui se trouve devant lui. Impassible à ma détresse, il reste froid et distant, comme si je ne comptais pas pour lui, comme s’il ne me connaissait pas.


J’essaye d’attirer son attention. Sans succès.


— Alors, c’est tout ? Je demande tristement. Tu ne vas pas m’en dire plus ?


Il reste silencieux.


Je me mets à fixer un arbre, planté un peu plus loin. Je suis prête à regarder tout et n’importe quoi tant que ça me permet de ne pas poser les yeux sur lui. Si je suis amenée à croiser les siens, ne serait-ce qu’une fraction de seconde, je sais que je ne pourrais pas résister davantage et que je me mettrais à pleurer. Je coince à nouveau ma lèvre inférieure entre mes dents pour l’empêcher de trembler.

Bien que je ne le connaisse pas depuis longtemps, il ne m’était pas venu à l’esprit que Charly puisse disparaître de mon quotidien.


J’essaye d’imaginer ce que seront mes week-ends maintenant que je ne les passerai plus avec lui. Il ne me déconcentrera plus quand je serai en train d’étudier, assis sous ce grand saule. Il ne glissera plus de fleurs dans mes cheveux après les avoir tressés pendant que je récitais mes théorèmes de maths. Nous ne testerons plus tous les parfums de glaces proposés par les marchands du parc. Nous ne termineront plus nos après-midis devant l’entrée en se promettant de se retrouver à la même heure la semaine suivante. Je ne me réveillerai plus en comptant les jours qui me séparent de son rire chaleureux qui provoque des papillons dans le creux de mon ventre.


Mes promenades n’auront plus jamais la même saveur.


— Ne rends pas ça encore plus compliqué. C’est terminé, Nine.


Je ferme les yeux, ne supportant même plus le son de sa voix. Finalement, je crois que je préférais quand il ne parlait pas. Au moins, je ne recevais pas ses paroles comme des couteaux qu’il plante un peu plus en moi.


Nous n’avons jamais mis de mots sur notre relation ni sur ce que nous ressentons l’un pour l’autre. Nous sommes bien trop proches, complices et fusionnels pour être de simples amis. Mais nos vies sont tellement opposées l’une à l’autre et nous sommes encore bien trop jeunes pour dire que nous sommes plus que ça.


Que nous étions plus que ça.


Je ne sors pas avec Charly Owens et, pourtant, j’ai quand même l’impression qu’il est en train de rompre avec moi.


Mon coeur se serre et les larmes me montent aux yeux mais quand je vois comment il me traite actuellement, je me dis que ce n’est peut-être pas si mal qu’il s’en aille.


Après tout, lorsqu’il sera parti, Charly ne pourra plus me distraire. Mes copines seront contentes que je ne sacrifie plus mes rares sorties pour lui. Maman sera ravie que je puisse accorder toute mon attention au programme de révision qu’elle m’a dégoté pour occuper mon été. Avec un peu de chance, je rattraperais le retard que j’ai accumulé pendant ces dernières semaines et elle sera fière de moi. Je retrouverai le sérieux dont j’ai toujours fait preuve et, peut-être sera-t-elle moins exigeante.


Une larme rouge sur ma joue sans que je ne puisse l’arrêter. Je l’essuie rapidement, espérant que Charly n’ait pas le temps de l’apercevoir.


— Tu as raison.


Le son de ma voix attire son attention. Il hausse un sourcil, visiblement surpris que je parle après être restée silencieuse aussi longtemps. Je me racle la gorge avant de poursuivre.


— Il n’y a pas de quoi en faire toute une histoire. Dès le départ nous savions que nous ne venions pas du même monde. J’imagine que ces adieux étaient inévitables. Ce n’est peut-être pas si mal que ça arrive maintenant.


Je ne suis pas hésitante. Je ne tremble pas et n’ai pas de mal à trouver mes mots. J’essaye d’être la plus détachée possible. Je ne sais pas lequel de nous deux j’essaye de convaincre mais j’espère réussir à croire mes propres paroles.


J’ai besoin de me dire qu’il ne va pas me manquer et que son départ ne me causera pas la moindre peine. J’ai besoin de me faire violence pour ne pas lui suggérer que nous restions en contact même s’il se retrouve à l’autre bout du monde. J’ai besoin de croire que je ne suis pas autant attachée à lui que je le pense.


J’ai besoin d’être persuadée que ma vie pourra reprendre son court comme s’il ne l’avait jamais traversé.


— Je pense que nous n’avons plus rien d’autre à nous dire. Il vaut mieux qu’on quitte le parc chacun de notre côté. Au revoir Charly.


Avant qu’il ne puisse me répondre, je lui lance un dernier regard et tourne les talons. Dans mon élan, je lâche le cadavre de la marguerite que je tenais fermement. Je sens quelques uns des pétales coller à ma peau mais je ne prends pas le temps de m’en débarrasser.


A chaque pas qui m’éloigne un peu plus de Charly, je sens ma respiration reprendre son rythme habituel et entends à nouveau les battements réguliers de ce qui reste de mon coeur. J’atteins l’entrée du parc bien plus rapidement qu’en temps normal.


Le souvenir de l’étreinte qu’il m’offrait pour me dire au revoir est le coup de grâce qui m’achève. Un sanglot bruyant m’échappe avant que je ne puisse porter une main tremblante à ma bouche pour l’étouffer.


Je traverse la rue et ma vision se brouille lorsque je pose un pied sur le trottoir d’en face.



A suivre ...


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13

13 commentaires

multimma

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Il y a un an

🥀🖤

Emma Chapon

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Il y a un an

Je n'ai pas beaucoup annoté mais j'étais complètement dedans, c'est extraordinairement bien écrit, la douleur de Nine, ses émotions, les sensations physiques lors de l'annonce. On ressent complètement ce que tu as voulu transmettre, ce choc face à une nouvelle trop douloureuse pour être appréhendée, le déni, la tristesse, la réalisation... Vraiment,ce chapitre est magistral ! ❤

Emmy Jolly

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Il y a un an

C'est traumatisant cette rupture et ce départ parce qu'il ne donne aucune explication. Et d'ailleurs on ne sait pas non plus comment ils se sont rencontrés.

izoubooks

-

Il y a un an

j'aime éparpiller les informations pour qu'on découvre les indices petit à petit :)

Donà Alys

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Il y a un an

Oh pauvre Nine... 😢

izoubooks

-

Il y a un an

c'est vraiment le mot ...

Pauline Priuli

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Il y a un an

🥲

marielovesreading

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Il y a un an

Pourquoi tu brises mon cœur comme ça?

izoubooks

-

Il y a un an

je crois que j'aime faire pleurer dans les chaumières
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