Phoenix B. Asher Pine Lake Resort Plan macabre

Plan macabre

Pine Lake – Mardi 21 juin 2016 – 2h du matin


Je suis assise dans la salle à manger du Resort. La table est mise de la même façon que le jour où j’ai pris possession de l’hôtel. Mais cette fois, pas de poussière. Tout est propre et étincelant. Suis-je en train de rêver ?


Un bruit étrange me fait me lever précipitamment. La lourde chaise tombe à la renverse comme au ralenti. Oui, c’est bien un rêve. De nouveau, le bruit se fait entendre. Des pleurs ?


Je commence à marcher dans la direction de ce que j’ai entendu. Le son se répète. Plus distinct à mesure que je m’en approche. Ce sont bien des pleurs. Des pleurs d’enfants. Ils semblent provenir de l’étage. Je continue d’avancer lentement. J’emprunte l’escalier et laisse le bruit des sanglots guider mes pas.


Je me retrouve devant la chambre 206. Les pleurs se sont transformés en hoquets déchirants. Je n’hésite pas un instant et pousse la porte. Les sons cessent instantanément. La chambre est en travaux comme elle l’est aujourd’hui. Je ressors et ferme le battant. La poignée glisse dans mes mains. Je les examine. Elles sont couvertes de sang. Mais pas seulement mes mains. Mes vêtements aussi.


Puis les pleurs reprennent de plus belle. J’avance de nouveau dans leur direction. Et je me retrouve devant la chambre 206. Encore. C’est impossible puisque j’en viens. Mais dans un rêve rien n’est inconcevable. Je tourne la poignée de la porte. Le sang a disparu. Comme la première fois, les sanglots cessent. Sauf que cette fois, j’ai sous les yeux la chambre de 1974. Celle du 29 août 1974 plus exactement. Je me précipite sur le lit de gauche. Ce lit sensé contenir deux petites filles. Je ne les vois pas mais je me jette à genoux sur la literie. Soulevant les oreillers, le couvre lit blanc, les draps. Je brasse du sang. Beaucoup de sang. Et d’autres choses aussi mais je ne veux pas y penser. Le liquide rouge et épais a imprégné mon jean quand je me rends compte qu’elles ne sont pas là. Elles sont mortes depuis 40 ans.


Cette pensée, à la lisière de mon cauchemar, me réveille. Je me retrouve assise dans mon lit de l’aile familiale. Chris se redresse à côté de moi.


- Ça va Charlie ?


Sa main caresse doucement mon dos.


- Oui. C’est rien. Seulement un cauchemar.

- Tu veux en parler.

- Non. Ça va aller, ne t’inquiète pas.


Je me recouche en l’entrainant avec moi. Je me colle contre lui, ses bras autour de moi. Lovée ainsi, je me rendors assez rapidement. Enfin, je somnole plutôt. Surement par crainte de retourner dans cette chambre 206.


Vers 6h, je suis complétement réveillée. Chris dort toujours profondément à mes côtés. Je me lève sans bruit. J’ai senti qu’il avait du mal à dormir lui aussi cette nuit. Je déjeune rapidement et me prépare pour aller courir. Je n’ai jamais couru aussi intensément mais j’ai besoin d’évacuer les dernières images de mon cauchemar.


En revenant au Resort, je croise Doug qui arrive.


- Salut Charlie !

- Ça va Doug ? Chris dort encore je pense.

- Pas de problème, je vais gérer. Laisse le dormir, il a besoin de repos pour affronter sa journée.


Je ne me rappelle pas que Chris m’ait parlé de quelque chose de particulier pour aujourd’hui.


- Je préfère qu’il t’explique lui même, ajoute Doug devant mon air dubitatif.


Ce qu’il fait effectivement pendant que je suis en train de boire ma deuxième tasse de café de la journée. En le regardant partir pour le chantier, je ne peux pas m’empêcher de me demander ce que son père lui veut. Même si ça ne me regarde pas vraiment…


Harry revient quelques minutes plus tard d’une balade matinale autour du lac.


- Prête à y retourner ? me demande-t-il.


J’acquiesce silencieusement mais en même temps comment peut-on être vraiment prête à replonger le nez dans ces photos. Hier, je n’arrivais même plus à voir autre chose que des amas ensanglanté. D’où mon cauchemar cette nuit. Je veux connaître la vérité mais j’ai eu mon quota d’horreur hier pour le reste de la décennie. Et je n’ai examiné que la moitié de ma pile.


- Je ne sais pas pour toi, mais je n’ai pas l’impression qu’on trouvera quelque chose en passant les photos en revue comme ça. Je pense que ça serait idéal si on pouvait faire un plan de scène de crime. Bon, ça ne sera pas très détaillé mais ça donnera une vue d’ensemble.

- Oui, c’est une bonne idée, lui dis-je, reconnaissante. J’ai plusieurs copies du plan du Resort.


De mon bureau, je sors le plan du rez-de-chaussée, celui du premier étage et deux grands plans des bungalows. Nous passons les deux heures suivantes, à compléter notre plan macabre. Nous nous concentrons sur les photos d’ensemble plutôt que sur les gros plans. C’est moins glauque que de scruter les clichés à la loupe mais au fur et à mesure de notre travail, l’ampleur du massacre nous apparaît. Connaître le nombre de victimes est une chose. Le voir de nos propres yeux en est une autre.


Les silhouettes schématisées à l’encre rouge nous sautent au yeux sur le plan tracé en noir. Cinq d’entre elles ne se trouvaient dans aucune chambre quand elles ont été tuées. John, le fiancé de ma tante, gisait derrière le comptoir d’accueil. Susan, la femme de Leslie, dans les cuisines. Un couple, les Thompson, a été retrouvé sur la terrasse de son bungalow. Quand à la dépouille de Mlle Davis, elle se situait à la lisière des pins non loin du ponton.


D’un commun accord, nous décidons avec Harry de nous rendre aux endroits précis où ces personnes ont été tuées. À part les parents de Joseph Simons, ce sont les seuls qui étaient apparemment éveillés quand le tueur les a attaqués. Il faut redoubler d’ingéniosité quand la victime est consciente.


L’accueil est une des seules scènes de crime à avoir été nettoyées avec les cuisines. Il est difficile d’imaginer surprendre, avec une hache qui plus est, une personne qui se trouverait derrière le comptoir. Harry est aussi perplexe que moi.


- Il y a une porte qui mène des cuisines au couloir des suites, expliqué-je à Harry.

- Elle sert à quoi cette porte ?

- Room service. Sans passer par la salle à manger.

- Logique.


Il réfléchit une minute.


- Earl Walters tue Susan Lockridge. En passant par cette porte, il arrive juste derrière John Dugan.

- Oui, c’est une possibilité, acquiescé-je.


Je regarde la photo du corps de John. Il est face contre terre. En effet, cette théorie se tient.


- Allons dans la cuisine, proposé-je.


Une fois sur place, je regarde l’image de la scène d’ensemble. De façon évidente, Walters a dû arriver dans les cuisines par la porte arrière. Quelque chose me chiffonne sur cette photo.


- Est ce que tu as le cliché en gros plan de Susan ? demandé-je à Harry qui tenait toutes les photos dans ses mains.


Il me tend le papier épais et légèrement jaunis par le temps que je n’ai pas encore vu. Mes doutes se confirment.


- Regarde Harry.

- Une corde ? Elle a été étranglée ? Et ensuite achevée à coup de hache ? Pourquoi ?

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6 commentaires

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Haha lentement mais surement, elle arrive ;-)

QUINQUIN

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Il y a 8 ans

J'adore, finalement c'est un bon rythme pour moi... mais quand même vite, vite la suite !

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Oui carrément glauque même.

LikeAMartian

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Il y a 8 ans

La nuit de 1974 a vraiment du être glauque !! J'ai hâte d'en savoir encore et encore !! :)

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Petit à petit ;-)

black_foxx

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Il y a 8 ans

Le puzzle commence à s'assembler
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