Phoenix B. Asher Pine Lake Resort Nouveau départ

Nouveau départ

La dernière valise casée, je ferme le coffre d’un geste brusque. Voilà. On y est. Tout ce que je possède tient dans ma Camaro. Ma vie, réduite à quelques valises et quelques cartons. Ça pourrait être triste en réfléchissant bien, mais non. De tout ce que j’ai vécu ces dernières années, ce 7 juin 2016 est un des jours les plus exaltants. Le début de ma deuxième vie. Ou peut être même la troisième ou quatrième. J’ai toujours eu un côté félin sur les bords.


Je m’installe derrière le volant. Une bouffée d’émotion intense m’envahie. Un cocktail détonant d’excitation et de nostalgie. Ça fait une éternité que je n’ai pas conduit cette voiture. Depuis que je vis au centre de St Paul, les transports en commun sont devenus plus pratiques. Et puis il a fallu un moment pour que mon ex-mari Liam ne daigne me la rendre. C’est le seul point sur lequel je n’ai pas cédé. Ça paraît superficiel comme ça. J’ai lâché prise sur la maison, notre entreprise. Mais cette voiture, celle que mon père m’a offerte pour fêter mon diplôme et notre future association, pas question. Alors il me l’a rendue. A reculons mais il l’a fait.


En quittant le stationnement sous-terrain, je jette un dernier coup d’œil sur les fenêtres du 6ème étage. L’appartement de Julian. J’espère qu’il me pardonnera de partir avant son retour de l’hôpital. En fait, c’est évident qu’il doit se douter que je n’allais pas l’attendre. Je n’aime pas ça les adieux larmoyants. Je ne suis plus cette Charlie, la larme à l’œil à la moindre contrariété. Liam a tué ça. Et puis, on a passé une dernière soirée idéale avec Julian. Ce soir, il retrouvera les bras de sa femme pour se consoler et il m’oubliera vite. Vraiment ? Non, peut-être pas vite. Mais il m’oubliera.


Rapidement, St Paul se trouve dans mon rétroviseur. Mon cœur se serre mais j’étouffe cette émotion dans l’œuf. Du positivisme. Voilà ce dont j’ai besoin. Et de la Play List spécial road trip que Julian a créée dans mon iPhone. Je ne pensais pas en avoir besoin si vite à vrai dire mais l’image de la ville qui m’a vu naitre, ville que je pense ne jamais revoir me bouleverse. Alors retenant mes larmes, avalant la boule qui coince dans ma gorge, je connecte mon cellulaire au système audio de ma voiture.


Ma tristesse s’évapore sur les premières notes de Dance without you. Je suis comme ça. Certaines chansons me donnent envie de danser et me font oublier mon envie de pleurer. C’est une capacité qui m’a souvent sauvé la vie. Et la santé mentale. Cette chanson me ramène insidieusement à un autre nouveau départ que j’ai pris il y a de cela presque 8 mois.




ST-PAUL, 17 OCTOBRE 2015


L’horloge du micro-onde de l’appartement indique 1 :05. Je devrais être fatiguée mais je suis juste hébétée. Je ne sais pas quoi faire de moi. Mon corps ne m’appartient plus vraiment depuis longtemps et je ne me permets pas de ressentir quelconques sensations. Je suis assise sur le tabouret de la cuisine avec ma veste encore sur le dos. J’aperçois vaguement mon reflet dans la vitre du four. Un fantôme. Le Dr Wilson est en train de monter mes affaires. Tout est allé si vite. Cette journée a été cauchemardesque. Cette nuit est surréaliste. Je ne connais ce médecin que depuis quelques heures et me voilà presque installée chez lui. « En attendant que je me retourne » a-t-il dit… On fait ça comment, se retourner ?


- Voilà, j’ai tout remonté, dit le Dr Wilson en entrant dans l’appartement, me faisant sursauter.

- Ok. Merci Dr Wilson.

- Julian.

- Merci Julian.


Je ne bouge toujours pas. Je ne sais plus comment on se comporte avec les gens. Et je ne veux pas lâcher prise. J’aurais peur de m’effondrer. Devant l’horreur de ma situation. Devoir fuir mon propre foyer à 26 ans. Partir comme une voleuse en emportant que le strict nécessaire. Ma vie est un échec total. Je dois aujourd’hui ma survie à un inconnu en blouse blanche rencontré dans un service d’urgence.


- Charlie ?


Je crois que le Dr Wilson, Julian, me parle depuis un moment déjà. Je suis comme droguée sans avoir pris aucune substance. Anesthésiée par la profondeur des enfers dans lesquels je suis plongée depuis quelques années.


- Oui ? Je suis désolée, est-ce que vous pouvez répéter ?

- Est-ce que ça va Charlie ?

- Oui. Non. Je ne sais plus vraiment. Je suis un peu… abasourdie. Merci de m’héberger. C’est temporaire.

- Ce n’est pas un problème. J’ai deux chambres et je suis rarement là de toutes façons. Comme je disais, j’ai posé vos affaires dans la première chambre juste là, reprend-il en pointant une pièce. Vous faites comme chez vous. Le réfrigérateur est plein.


Il prend une télécommande et allume le téléviseur qui est fixé au mur.


- Je repasserai vous voir demain matin, poursuit-il. Vos anti-douleurs sont à la cuisine.


Mais je ne l’écoute à nouveau plus. Une voix de femme s’échappe en sourdine d’une chaine de clips musicaux. Je lis la légende « Dance without you – Skylar Grey ». Et en un quart de seconde, les sensations reviennent. La musique a toujours eu cet effet chez moi. Ça fait deux ans que Liam ne me laisse que rarement en écouter. Les paroles pénètrent mon âme endormie. Je suis hypnotisée.


Oui Liam, je veux danser sans toi…


Les émotions ne reviennent pas seules. La douleur les accompagne. Je sens chacune des contusions de mon corps. La pommette éclatée. La côte cassée. Et mon ventre vide. Les larmes se mettent à couler. Pour la première fois depuis longtemps.

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19 commentaires

Joël RECASENS

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Il y a 4 mois

Belle écriture. J'ai toujours du mal à entrer dans un univers, mais là c'est parfaitement amené.

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Haaaaan la honte. Jamais j'aurais pensé que ça ferait deux mois déjà. Encore toutes mes excuses. Merci d'avoir accepté de me lire alors que ce n'était pas trop ton truc :D

CaroWritings

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Il y a 8 ans

Hello ! Je viens par rapport au Book Date :). Alors je te préviens juste qu'à la base, le thriller ne fait pas partie de mes lectures privilégiées, donc je serai peut être moins enthousiaste au fil des chapitres qu'une personne qui est fan de thriller. Concernant ton premier chapitre, je suis agréablement surprise par la qualité de ton écriture. J'ai l'impression que tu privilégies les phrases courtes et j'aime beaucoup le style que ça donne à ton récit. Je trouve ça plus percutant. Le chapitre pose bien les bases et est intrigant, j'adhère ! Pour le moment, pas de point négatif à relever. Je poursuis ! :)

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Merci! Pour l'édition papier j'aimerais bien ;) l'avenir nous le dira!

Madame Split

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Il y a 8 ans

Wow ! Que dire ! Je vais suivre avidement ton histoire ! Cependant... Je la veux en papier aussi et que ça saute :)

Chantal Lepage

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Il y a 8 ans

J'adore cette histoire il me tarde de lire la suite,,,, comment fair pour avoir le livre au complet merci

DUMONT

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Il y a 8 ans

Bonjour Phoenix B J'avoue que je ne suis pas une grande lectrice de livre en général mais j'avoue que ton 1er chapitre donne envie de connaître la suite. Bonne continuation à toi.

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Merci pour tes remarques ;-)

Kevin Maury

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Il y a 8 ans

Hello, Voici mes quelques remarques : Le début d'un livre est le plus difficile car tout est nouveau pour un lecteur. Les personnages. Le contexte. Qui ont suit ? Quand ? Bref, c'est un moment important pour que le lecteur soit rapidement mit à la page sur l'histoire. Sur ce point-là, on peut constater que nous avons l'arrivé de deux persos (en + de l'héroine). Le premier perso est introduit directement en ex-mari. Mais, le second, est un peu trop "mystérieux". Ce n'est qu'en relisant pour faire ce commentaire, que j'ai compris que le fait qu'elle n'attende pas son "retour à l'hopital", était dû au fait qu'il soit médecin et non malade (une autre explication possible). Si sa profession était mentionné dès le début, ça pourrait éviter cette possible confusion. Donc, voilà, la situation est posée. On commence à prendre nos marques dans ton histoire. Les persos, la situation. Ok, cool... et là tu décides de nous introduire un flash-back. Du coup, on est de nouveau perdu, on doit recomprendre la situation, les persos... Compliqué. Faire un retour dans le passé, au bout de 15 lignes... C'est risqué. Surtout qu'on apprend directement la finalité de la relation avec le médecin du flash-back. Perso, tu aurais pu garder l'appellation "Dr Wilson" un peu plus longtemps ! Honnêtement, tu aurais commencé par le flash-back... ton histoire aurait été beaucoup plus mystérieuse :)

Phoenix B. Asher

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Il y a 8 ans

Merci :D Trop contente que tu puisses me lire!
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