Vanille Lemoro People are strange 3 - La rentrée (1/2)

3 - La rentrée (1/2)

Direction le premier étage du bâtiment B. Cette année, notre prof principal, c’est Merquez. Je ne comprends vraiment pas le petit charme que Julie peut lui trouver. Comme quoi, comme le dit souvent ma grand-mère, tous les goûts sont dans la nature. Mais je suis d’accord par contre sur le fait que ce soit un gros con. Je savais bien que l’année commencerait mal, je le pressentais. Toujours débout, je soupire en regardant déjà l’heure sur l’horloge derrière le bureau de Merquez.


Tiens donc !


Assis contre la fenêtre tout devant, je reconnais alors le grand blond qui m’a bousculée tout à l’heure sous le préau.

—Paméla, vous comptez prendre racine ou quoi ? dit soudain Monsieur Merquez, ce qui me fait sursauter et ce qui, bien sûr, fait rire l’ensemble des élèves dont ce connard d’Antoine.

Je déteste ça. Tous ces regards qui sont maintenant rivés sur moi.

—Planche à pain n’est pas réveillée ce matin, s’esclaffe Antoine depuis le fond de la classe.

Un frisson désagréable me traverse.

Dans mon imagination – et j’en ai beaucoup –, je m’avance vers Antoine d’un pas assuré pour aller lui filer un gros coup dans sa tronche ensanglantée, lui vociférant dessus :

—Et ce pain là, tu l’as vu venir ?


Puis j’imagine que je m’évanouis à la vue de son nez qui pisse le sang sur mes Vans déjà en mauvais état.

Sauf que dans la vraie vie, ma lâcheté prend le dessus sur mon courage et ma verve, fictifs. Mes lèvres se mettent à vibrer. C'est mauvais signe. Je serre la mâchoire pour le cacher. Ne pas fuir dans les toilettes dès le premier jour de cours, ce sera déjà une grande victoire pour moi. Je me dépêche donc simplement de m’asseoir à la première table libre venue et de me taire en baissant la tête, comme d’habitude.


—Allez, on va pouvoir commencer, tant pis pour les retardataires, prononce le prof en nous distribuant tout un tas de feuilles, sans doute celles à faire signer à nos parents ce soir.


Je roule des yeux. C’est typiquement le genre de paperasse administrative qui rend dingue ma mère. Alors, tous les ans, quand je lui tends lesdits documents à lire, elle pète littéralement un plomb.


—Non mais c’est une blague, ENCORE !? Ils ne peuvent pas enregistrer les informations une bonne fois pour toute ? Non mais comme si tu avais subitement changé de parents cette année ou de groupe sanguin ou de sexe ! Comme si je n’avais que ça à faire, le soir en rentrant du boulot.

—Tu sais maman, y’en a qui change de sexe justement, ceux qui ne naissent pas dans le bon corps, j’en connais un au lycée en transition, enfin une maintenant, je trouve ça tellement courageux. (Tellement plus courageux que moi face à Antoine et sa bande.)


C’était une conversation qu’on a eue, ma mère et moi, l’an dernier. Elle m’avait alors fixée, bouche bée, un bout du dîner coincé dans sa joue gonflée.


—Ou juste d’adresse hein, il y en a qui changent juste d’adresse, qui déménagent quoi, avais-je ajouté avant de débarrasser mon assiette.


Tandis que Merquez nous explique un peu comment va se dérouler notre dernière année de lycée, notre emploi du temps, les exams blancs, les retards et les insubordinations, je me demande bien quelle phrase rebelle ma mère va-t-elle encore me sortir ce soir. Elle est givrée ma mère, c’est une crème hein, mais givrée. Du style crème glacée. Douce, très gentille, jusqu’à ce qu’on lui impose une tâche qu’elle estime débile ou injuste, là elle se fige et sombre dans la folie, on n’entend plus qu’elle d’un bout à l’autre de la maison. Puis, elle finit toujours par réaliser qu’elle a surréagi, se calmant aussi vite qu’elle ne s’est emportée en changeant de sujet, l’air de rien, du genre : Et sinon, ma chérie, ta journée s’est bien passée ?


—Bon, voilà, tout est dit, vous avez des questions ? nous demande soudain le prof, ce qui me sort de mes pensées.

—Ouais, y’a quoi à la cantine ce midi ? prononce Antoine avant de pouffer avec deux de ses acolytes.

—Antoine, je te préviens, parce que je me sens d’humeur clémente aujourd’hui, c’était ton seul joker de l’année. Prochaine fois, je ne cherche pas à comprendre, c’est direct le bureau de la CPE !


Tiens, quand on parle du loup…


Tu as aimé ce chapitre ?

2

2 commentaires

Zatiak

-

Il y a 3 mois

Bienvenue dans le concours et bonne chance ! 🥰

Vanille Lemoro

-

Il y a 3 mois

Merci Zatiak, bonne chance également. :-)
Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.