Fyctia

J’enchaîne les coups ignorant le sang qui commence à apparaître sur les jointures de mes doigts. Je ne comprends pas ce qui m’énerve autant, mais je sais que j’ai besoin d’expulser cette colère qui me ronge. Quand j’ai vu Seth arriver vers Lana avec son putain de bouquet, j’ai cru devenir fou ! Je ne sais pas ce qu’il lui a pris, mais il a l’air prêt à tout pour parvenir à ses fins avec Lana au point de changer totalement de méthode et de s’afficher en public. Et on ne peut pas dire que ça m’enchante. Si je veux avoir une chance, il va falloir que je redouble d’efforts et ça m’énerve rien que d’y penser !  Moi qui croyais que la partie était quasiment jouée d’avance, voilà que Seth me sort en sacré coup de poker ! Les coups pleuvent de plus en plus sur le sac de frappe et je suis tellement plongé dans mes pensées que la voix de mon père me fait sursauter :  

— Ça va fiston ?   

Je me retourne vers lui, en sueur, du sang coulant le long de mes doigts abîmés d’avoir frappé sans gant.  

— Merde Devon, regarde-moi ce carnage !  fait mon père en s’approchant de moi.  

Je recule avant qu’il ne saisisse mes mains.  

—  C'est bon c’est rien.   

— Pourquoi tu n’as pas mis tes gants ?   

Je hausse les épaules et me dirige vers l’escalier qui mène à l’étage. Ma belle-mère pousse un petit cri étouffé en apercevant l’état de mes mains.  

— Va rincer tes mains sous l’eau, me dit-elle d’un ton qui ne laisse pas de place à la contradiction. Je vais chercher la trousse à pharmacie.   

Quand elle revient quelques minutes après, je suis installé à la table de la cuisine un torchon propre entourant mes mains. Elle l'enlève délicatement, observe un instant en soupirant l’étendue des dégâts, puis commence à désinfecter les plaies. Je grimace quand elle applique le coton imbibé d’alcool sur mes coupures, avant d’entourer délicatement mes doigts dans un bandage.  

— Qu’est-ce qui s’est passé ?   

— Rien, j’avais juste besoin de me défouler.   

— Pourquoi ne pas avoir mis tes gants ?   

— J’y ai pas pensé, dis-je en me levant pour d’aller chercher de quoi manger.

  Quand je suis rentré, j’ai posé mes affaires dans l’entrée et je suis tout de suite descendu au garage. J’ai vu le sac et je n’ai pas cherché à prendre le temps de mettre mes gants. Il fallait que je frappe, maintenant, sans attendre. Deux semaines ! Deux putains de semaines que Lana occupe sans cesse mes pensées sans que je ne sache pourquoi. Car oui en plus du fait d’essayer de me rapprocher d’elle pour la séduire, ses yeux verts ne cessent de me poursuivre. Oui elle est belle, c’est un fait, mais ce n’est pas la première nana canon que je croise ! Et si on la compare à Meghan et aux autres filles que j’ai l’habitude de mettre dans mon lit, elle n’a clairement rien à voir avec elles. Alors non, je ne comprends pas pourquoi je n’arrive pas à la chasser de mes pensées, ni à ne la voir que comme une fille de plus à mettre dans mon lit ! Rajouté à ça le coup de Seth et de ses stupides fleurs, quand j’ai aperçu le sac de frappe devant moi, je n’ai pas réfléchi et j’ai tapé direct dedans.   

— Tu sais que ton père et moi sommes là si tu as besoin Devon ?   

— Ça va je t’ai dit !  je rétorque d’un ton brusque.  

—  Devon, je t’interdis de lui parler sur ce ton ! gronde mon père en arrivant.  

Je m’excuse auprès de Linda et monte m’enfermer dans ma chambre. Je balance mon sac près de mon bureau, allume la chaîne hifi et m’affale sur mon lit, bras croisés derrière ma tête, fixant le plafond.   

Je ne sais pas combien de temps je suis resté là, allongé, perdu dans mes pensées. J’ai essayé de ne pas penser à elle, mais peine perdue, ses yeux émeraude sont encore venus me hanter. Mon téléphone émet un bip, signe que j’ai reçu un message :  

"Seth 1 Devon 0. Admets que le coup des fleurs c’était bien joué." 

Je me redresse et serre les poings en voyant son SMS et grimace de douleur. J’ai oublié mes jointures abîmées ! Je tape une réponse rapide et balance mon portable sur mon lit en me levant. Je m’affale à mon bureau, une clope à la bouche et envoie un message à Meghan bien décidé à m’occuper l’esprit et ma soirée.  

 *** 

J'ai passé le reste de la semaine à essayer de me rapprocher en douceur de Lana, sans la brusquer. À chaque cours de math j'allais m'assoir près d'elle et devant mon air bougon à la vue des exercices plus incompréhensibles les uns que les autres, elle passait le reste du cours à m'aider. J'ai même tenté plusieurs fois d'aborder d'autres sujets que les maths, mais elle se braque à chaque fois et le reste du cours se termine dans un silence pesant. Déjà qu'elle n'est pas très loquace avec moi, là elle se referme complètement. Je pousse un soupire de frustration tout en écrasant ma clope du bout du pied. 

— Humm, j'en connais un qui aurait bien besoin de se détendre, fait Meghan en entourant ma taille de ses bras.  

Je sursaute au moment où elle m'enlace, ne l'ayant pas entendu arriver. Elle se place face à moi et attrape mes lèvres entre les siennes pour un baiser langoureux auquel je réponds plus par habitude qu'autre chose.  

— Si tu passes chez moi ce soir, je me ferai à nouveau un plaisir de t'aider à te détendre, susurre-t-elle à mon oreille tout en pressant légèrement mon entrejambe.  

Je grogne contre son cou, et attrape ses fesses à pleine main pour la rapprocher davantage de moi ce qui l'a fait rire.  

— Je serai là pour 21h. 

Sur un dernier baiser et après m'avoir donné quelque détail affriolant sur la dernière lingerie qu'elle vient de s'offrir, et compte porter pour moi ce soir, c'est d'une démarche aguicheuse et sous mon regard appréciateur qu'elle rejoint les bâtiments pour notre dernier cours. Je secoue la tête pour chasser les images indécentes que j'ai en tête, quand mes yeux se posent sur Lana qui se dirige vers la salle de sports en compagnie de Molly et Vicky. Elle détourne rapidement la tête quand mon regard croise le sien et je me sens soudain mal à l'aise, comme prit en faute. Le fait qu'elle est pu me surprendre avec Meghan, me tracasse sans vraiment savoir pourquoi.