Leonie Lonval Ose-moi ! ...Si tu le peux Chapitre 4 bis

Chapitre 4 bis

A la maison, jamais on n’aurait parlé de contraception, de rapports sexuels, de protections. Pour être totalement honnête, ma mère ne m’a jamais accompagné chez le gynéco, j’ai dû m’y rendre de mon propre chef lorsque j’en ai eu l’âge. Quant à la taille de mes soutien-gorges, elle n’en avait qu’une vague idée alors autant dire que l’idée d’être serrée et à l’étroit comme un rôti bien ficelé, je connais. Pour ma mère et je pense surtout la vision de mon père sur tout le rapport à l’intime était clair : « si on lui donne des libertés, elle va devenir une pute ». Un peu radical, n’est-ce pas ? A mon sens, ce n’est pas parce qu’une adolescente a la contraception à quinze ou seize ans pour soulager ses douleurs qu’elle va devenir le nouveau garage à pénis du quartier. Ce n’est pas parce qu’elle est emmenée dans de vraies boutiques de lingerie et ne plus porter les culottes en coton de sa grand-mère qu’elle va devenir une traînée. Toutefois, on ne changera ni mon passé ni mes parents et leur vision étriquée de la féminité en devenir.


Par ailleurs, ils ont été un facteur important de ma source d’inspiration. En effet, dans mes romances, j’ai à cœur de promouvoir la féminité de mes personnages, de peindre des femmes libres et indépendantes qui s’expriment en assumant leurs mots comme leurs actes. A mes yeux, c’est cela une véritable femme forte. Elle dit ce qu’elle pense sans regret, sans gêne face aux codes sociétaux.

Mais, moi, je n’en suis pas encore là.


— Non mais attends, tu sais qu’il va falloir un peu te décoincer dis-moi ?


April semble hésiter à aller au fond de sa pensée et je la pousse d’un geste de la main à continuer.


— Ne le prends pas mal. Je préfère juste être franche. Même s’il s’agit de mon idée, comment envisages-tu d’aborder une totale liberté sexuelle, sans t’y connaître vraiment ? Réussir à être crédible dans les moindres recoins aux yeux de ceux qui s’y connaissent, c’est un gros challenge…


Elle n’a pas tort j’en conviens aisément. Rendre crédible des personnages que l’on crée dans un environnement simple, plutôt anodin et connu de tous n’a pas de grandes complications bien qu’il faille ajouter l’émotion suffisante et les rebondissements assez palpitants pour tenir le lecteur en haleine. En revanche, écrire sur un sujet que l’auteur méconnaît totalement ou presque demande des recherches, du temps studieux et surtout une bonne dose de travail d’écriture.


Je dois trouver ce que cette femme de papier va vivre et comment elle va les vivre mais surtout, je dois doser ses réactions, je dois la faire devenir sincère et sensible. Elle doit avoir cette candeur de l’inconnu et cette adrénaline indicible. Pour cela, je ne vois pas d’autres moyens que me lancer le pari fou de découvrir ma sexualité. Et si le plaisir commençait par l’appropriation de mon corps ? April n’a pas tort quand elle me dit que la masturbation est le premier pas. Pourquoi en faire tout un plat de la masturbation féminine ? Pourquoi taxer la femme d’hystérique, de salope quand elle n’aspire qu’à posséder la même liberté que l’homme ?


La sexualité féminine est décidément un tabou bien trop entériné et j’aime me battre contre l’impossible. C’est motivant, ça me happe. J’ai envie de repousser les murs du séisme masculin qui déferle sur nous depuis si longtemps que la plupart sont convaincus que c’est normal et acté.


Et si pour cela je dois donner un peu de moi… Autant mouiller le maillot ! Enfin, dans mon cas, la culotte !


— Tu crois que j’en suis incapable ?


— Addie, s’il y a bien quelqu’un capable de tout, c’est toi. En revanche, ce ne sera pas simple je pense.


— Il me faut un plan d’action, fais-je décidée.


Je sors mon petit carnet de notes que j’emporte toujours dans mon sac à main même si j’en change chaque jour. Il ne me quitte pas. Ce carnet d’idées est celui qui recueille la plupart de mes départs de manuscrits. Un rien m’inspire. Une conversation glanée dans le métro. Une balade dans Central Park ou à une exposition temporaire. Une soirée entre nanas à boire des cocktails. Une maladresse lors de la pause déjeunée. Un couple qui s’embrasse sur la 5th Avenue. Tout est source de création et d’inspiration. Tout peut se tisser entre mes doigts, c’est là la magie de l’esprit.


— A quoi penses-tu ? Me demande-t-elle tout à coup très curieuse en s’approchant un peu plus de moi appuyée contre le bar.


— Attends, je réfléchis…


— Moi, je te dis, la masturbation c’est hyper important !


— Je suis bien d’accord !


Une voix que l’on n’avait pas soupçonnée, nous parvient. Face à nous, de l’autre côté du comptoir, le barman se tient droit, un sourire aux coins des lèvres, un brin arrogant dans sa chemise blanche cintrée.

Il doit avoir une bonne vingtaine, à peine plus jeune que moi. Il est plutôt grand – du moins c’est l’impression que cela me donne comme je suis assise – et ses cheveux châtains sont retenus par un élastique. Les a-t-il vraiment longs ? Je ne pourrais l’affirmer. Son nez aquilin est plein de grâce et son regard bleu perçant semble se gargariser de son effet de surprise.


J’aimerais lui lancer une réplique acerbe avec un ton de peste à la « de quoi je me mêle, mon gars ? » mais je suis trop mal à l’aise pour tenter quoi que ce soit. Ce qui n’est pas le cas d’April qui s’engouffre dans la brèche.


— Et pourquoi ? On peut avoir un point de vue masculin puisque vous aimez vous mêler avec indiscrétions des conversations des clients ?


— Mais bien sûr, ma belle. Et je le dis sans machisme, je vous trouve réellement belle. Bref, la masturbation féminine doit avoir une place dans votre bouquin, oui j’ai tout entendu, parce que c’est sexy. Un mec est excité de savoir qu’une femme se touche. J’imagine que je ne vous apprends rien mais une femme qui sait ce qu’elle veut et qui se connaît, ça c’est carrément irrésistible.


— Alors c’est simplement ça la solution ? demandé-je avec un petit lot de naïveté.


Le barman plonge alors ses yeux dans les miens. Il s’approche d’un pas lent. Son odeur me parvient, je perçois celle de la plage, comme un léger parfum d’eau salée. Ça me pique un brin les narines mais il n’en fait pas cas si tant est qu’il s’en rendre compte lorsque je fronce le nez.

Il s’approche si près que ses lèvres pourraient presque embrasser mon oreille. Lorsqu’il chuchote dans un souffle chaud :


— Mais qui dit que se connaître est si simple ? dit-il en reprenant mes mots.

Tu as aimé ce chapitre ?

8

8 commentaires

Jensen Mila

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Il y a un an

Petit like d'entraide :) Si tu veux passer également sur mon histoire <3

Carl K. Lawson

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Il y a un an

Petit coup de pouce pour toi débloquer ton prochain chapitre, si tu as le temps, n'hésite pas à venir passer sur mon histoire ;)

Leonie Lonval

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Il y a un an

Je vais aller la découvrir 😊

natha_lit

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Il y a un an

❤️‍🔥❤️‍🔥

Leonie Lonval

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Il y a un an

💕💕

sandrine13

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Il y a un an

Le barmai promet 🤭🤭🤭🤭

Leonie Lonval

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Il y a un an

J'espère bien ahah la suite au prochain épisode!

clara_belle

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Il y a un an

💓
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