Fyctia
Chapitre 16
Tout le monde est installé autour de la table du salon. Milan légèrement surélevé grâce aux cousins sous ses fesses, juste en face de moi. Jules à ses côtés, ne le lâche pas du regard. Il insiste pour tout faire à sa place, le servir, couper sa viande. Aux dernières nouvelles, ses bras fonctionnent. De toute façon, chaque geste, chaque mot qu’il prononce me fait bouillir intérieurement. Je suis déjà sous tension depuis que je les ai découverts tous les deux, j’ai l’impression de pouvoir exploser d’une minute à l’autre.
Andrew pose une main sur ma cuisse et son regard trouve le mien. Il est plus calme que tout à l’heure. En remontant dans la chambre, il m’a pris dans ses bras et m’a murmuré à quel point il m’aimait. Et à quel point il voulait juste être près de moi. Il m’a vu bouleversé, il a pensé que c’était à cause de la situation, que j’étais perdu. Bien entendu, je ne lui ai pas dit que j’avais mal parce que j’avais vu Milan replonger dans les bras de son petit-ami.
De toute façon, c’est bien plus facile de rester près d’Andrew. C’est le bon choix. Tout ce que je commence à ressentir pour Milan, c’est n’importe quoi. Je continuerais d’être à ses côtés, parce que je veux l’aider. Mais c’est tout. Andrew est l’homme que j’aime. Alors je lui souris et pose un baiser sur le coin de ses lèvres avant de me concentrer sur mon assiette encore pleine.
— Nous ne t’avons même pas demandé, mais tu as fait bon voyage Jules ?
Judith comble le silence, ce qui a l’air de ravir le principal concerné.
— Oui, merci. Je suis content de tous vous revoir. Et de faire ta connaissance, Jacob.
Je n’aime pas la façon dont il prononce mon prénom. Il ignore tout ce qui s’est passé avant qu’il ne se pointe comme par magie. Il ne sait pas que Milan a voulu m’embrasser hier avant de tomber dans ses bras ce soir. Je force un sourire, parce que tout le monde me regarde. Évidemment parce que tout le monde est au courant de ma relation avec Milan.
— Moi de même.
Je reste poli. Hors de question que je me donne en spectacle devant toute la famille.
— Milan m’a dit que tu l’avais beaucoup aidé depuis son retour du centre.
Cette fois, je n’arrive pas à sourire. Milan a su lui dire tout ça ? Pourquoi il l’a fait ? Mes doigts se serrent autour de ma fourchette, je suis juste incapable de prononcer quoi que ce soit. Je me contente d’un simple hochement de tête, ce qui n’arrête pas Jules qui continue :
— Merci pour lui. Je vais prendre le relais maintenant.
— Sans vouloir t’offenser Jules, ton arrivée ne signifie pas que je vais arrêter d’être présent pour Milan.
Il m’énerve. Il m’énerve avec ses sourcils légèrement froncés, son air étonné.
— Tu sais, il n’a pas besoin de deux personnes près de lui.
— C’est à Milan de décider.
Hormis notre échange, la pièce est silencieuse. Ils nous observent tous, la main d’Andrew se resserre sur ma cuisse. S’il pouvait, il me hurlerait de laisser tomber. C’est ce qu’il attend tellement fort.
— Stop.
Milan pose ses couverts. J’ose enfin tourner la tête sur lui, et c’est douloureux. Je le revois dans les bras de Jules. Je les revois enchevêtré sur le lit. Ça ne quitte pas mes pensées. Je me force à regarder Andrew, à trouver la paix dans ses yeux bleus. Je dois me calmer. Respirer. Ne pas faire de scandale.
— Merci pour le repas Judith, je finis par murmurer alors que mon assiette est toujours remplie.
Elle me jette un long regard qui me fait froid dans le dos lorsque je me lève. Elle n’approuve pas mon attitude, et je me sens de nouveau mal. Je ne veux pas qu’elle ait une mauvaise image de moi, mais je n’arrive pas à gérer. Je quitte le salon, enfile mes baskets, mon manteau avant de sortir de la maison.
C’est tellement le bordel dans ma tête, alors que c’est pourtant si simple. Continuer à aider Milan. Aimer Andrew.
Surtout pas être jaloux de Jules. Avoir envie de lui casser le bras dès qu’il ose toucher Milan.
Ce n’est pas possible.
— Jacob.
Andrew sort précipitamment de la maison, il me retient quand je glisse la clé dans la serrure de ma portière.
— Arrête de faire ça. Arrête de réagir comme ça quand ça concerne Milan.
— Tout le monde veut m’empêcher de l’aider et ça commence à me saouler Andrew. Je ne demande rien de particulier. Il m’a touché. Il a besoin de moi.
— Moi aussi j’ai besoin de toi ! Je t’aime putain et depuis des semaines j’ai l’impression que tu m’échappes. Que tu oublies notre couple.
Sa voix tremble. Il s’effondre.
— Je ne veux pas te perdre. Je refuse que ça arrive.
Il m’attire contre lui, ses mains emprisonnent mon visage. Nous sommes front contre front et sa douleur me transperce en plein cœur. Il a raison. Je dois me ressaisir. J’aime Andrew. Je l’aime tellement fort.
— Je suis désolé. Je vais faire des efforts, je te promets.
Je me suis perdu en chemin, c’est tout. Je le regarde dans les yeux avant de les fermer, et d’embrasser doucement ses lèvres. C’est comme s’il attendait ça depuis des jours. Il s’accroche à moi, prends possession de ma bouche, mord ma peau, enfonce ses doigts dans mes hanches. Il fait encore plus froid que d’habitude, mais sa simple présence me réchauffe. Je me raccroche à lui. Andrew est mon pilier depuis des mois. Il a toujours été là pour moi. Je dois me reprendre.
Peut-être que la solution au final, c’est que j’arrête de m’acharner. Ils passent leur temps à me mettre des bâtons dans les roues. Jules est là, maintenant. Et même si tout au fond de moi, ça me fait un mal de chien, peut-être que je dois lui laisser la place. Laisser Milan retrouver ce garçon qu’il a aimé pendant de nombreuses années. J’avais raison. Je ne fais pas le poids face à lui. Je crois que je commence à l’accepter.
Le bout de mon nez gelé frotte contre celui d’Andrew. De la buée sort d’entre ses lèvres lorsqu’il se détache de moi.
— On devrait rentrer, je suis crevée.
Il acquiesce d’un mouvement de tête, embrasse longuement mon front et je le laisse me guider à l’intérieur. Après nous être débarrassés de nos affaires, il m’entraîne dans notre chambre, sans que je ne lance un seul regard vers le salon. Je ne veux plus me battre ce soir.
— J’ai été cherché ton cadeau de Noël, pendant que j’étais à Bordeaux, m’avoue Andrew quand nous sommes enfin enlacés dans son lit.
Noël. J’ai complètement oublié, obnubilé par Milan. Le cadeau d’Andrew. Je suis loin de l’avoir. Pareil pour le reste de la famille. Demain, je dois aller faire du shopping.
— Un petit indice ? je murmure en venant embrasser ma nuque.
Andrew rigole, sa prise se resserre autour de moi. J’avais oublié à quel point j’adorais son rire.
— Non. Tu as moins d’une semaine à attendre, je pense que tu devrais tenir.
— Tu es cruel.
— Non, j’aime les surprises, corrige-t-il en plongeant son regard dans le mien.
J’esquisse un faible sourire. Voilà mon objectif pour les jours à venir. Noël. Andrew. Après, je repartirais chez moi. Je ne verrais plus Milan. Et tout rentrera dans l’ordre.
5 commentaires
Mary Cerize
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Il y a 4 ans
StoryOfMathLife
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Il y a 4 ans
leaspreux
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Il y a 4 ans
MarionBtk
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Il y a 4 ans
leaspreux
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Il y a 4 ans