Fyctia

Il était déjà plus de midi à notre arrivée à l'hôtel. On avait faim. En cherchant, on a trouvé un petit restaurant. Il s'appelait Pascal. On a mangé rapidement puis on est ressortis. Il faisait très froid. Je savais à quoi m'attendre en venant ici, la Norvège n'était pas réputée pour sa chaleur. Mais je ne pensais pas que les températures seraient aussi basses.

- Tu veux faire quoi ? m'interrogea Ethan.

- Je ne sais pas trop, je suis un peu fatiguée.

Il y avait plus de sept heures de décalage horaire entre New York et Oslo.

- J'ai passé la majorité de ma journée dans un avion. continuais-je.

- Tu veux qu'on reste à l'hôtel pour aujourd'hui ?

- Je pense que je vais y retourner, pour lire. Si tu veux faire un tour, tu peux. Ce sont aussi tes vacances.

- Non, ce sont nos vacances Hazel. dit-il en insistant sur le "nos". Je viens avec toi.

On est retournés ensemble jusqu'à notre chambre. Je me suis assise sur la chaise du bureau et j'ai sorti mon livre.

- Tu lis quoi ?

- Misery.

- Oh, j'ai vu le film. C'est de Stephen King non ?

- Exactement. répondis-je.

Un léger silence s'installa.

- Pourquoi tu lis Hazel ?

- Je crois que la réponse est simple Ethan. Je lis parce que j'aime lire.

- Pourquoi tu aimes lire ? renchérit-il.

- Parce que ça me permet de m'évader. Même quand tout dérape dans ma vie, je n'ai qu'à ouvrir un livre et je ne pense à rien d'autre qu'à l'histoire. Tu devrais essayer, c'est plutôt cool.

- Qu'est-ce qui te dit que je ne lis pas ?

Une personne qui lisait ne m'aurait probablement pas posé ces questions. Tous les lecteurs à qui j'ai pu parler avaient à peu près la même explication que moi. D'ailleurs, leur livre préféré était généralement celui qui les avait le plus éloignés de la réalité.

- Tu lis ? demandais-je.

- Non.

- Voilà, j'avais raison.

Depuis le début de notre conversation, Ethan semblait contrarié. Son regard était beaucoup plus vide que d'habitude. Je posai mon livre pour le rejoindre. Il était assis sur le lit. Perdu dans ses pensées. Tellement perdu qu'il ne remarqua même pas ma présence à côté de lui. Ou du moins, il n'y réagissait pas.

- Ethan ?

Au son de ma voix, il réagit. Il leva brusquement la tête vers moi. Nos regards se croisèrent, mais ce n'était pas comme d'habitude. Cette fois, ce n'était pas de l'électricité qui me traversait. J'avais l'impression de ressentir sa douleur. La détresse hurlait à travers son regard. Ses yeux brillaient, mais ce n'était pas de la joie. On aurait dit qu'il se retenait de pleurer. Je n'avais qu'une envie, le serrer dans mes bras.

- Je vais me laver. cracha-t-il.

Le ton de sa voix était sec mais faiblissait sur la fin. Il se leva, prit ses affaires et entra dans la salle de bains. Moi, je restai là, assise sur le lit, réfléchissant à ce que je pouvais faire pour qu'il me parle de ce qui le rongeait. Je ne pouvais pas le forcer à me dire quoi que ce soit. Ça ne servait à rien. Il fallait qu'il se sente assez en confiance pour qu'il puisse faire le premier pas.

Je ne savais pas combien de temps il était resté là-dedans. J'avais perdu la notion du temps en pensant à lui.

Quand il est sorti, il n'a pas prononcé un mot. Il portait un pull gris foncé et un jogging noir. Il me semblait que c'était son pyjama.

J'ai décidé d'aller me laver. J'ai donc pris mes affaires et je suis entrée dans la pièce dont Ethan venait de sortir. Je pouvais affirmer qu'il s'était lavé à l'eau très chaude, je dirais même brulante au vu de la chaleur pesante qui régnait. En posant mes affaires à côté du lavabo, quelque chose attira mon attention dans la poubelle. Il y avait beaucoup de papier toilette, comme pour cacher ce qu'il y avait dessous. Mais c'était mal fait. Je pouvais voir ce qu'Ethan avait essayé de dissimuler, du sang. Des mouchoirs remplis de sang.