Fyctia

Ses doigts étaient si chauds contre ma peau. Son souffle sur mon visage me faisait tourner la tête. Ses lèvres pincées me narguaient. J’avais envie d’être avec lui. J’en avais tellement envie que j’avais mal partout. Puis, il s’éloigna de moi, me ramenant à la réalité.

— Je… euh… je devrais rentrer, dit-il. Oublie ce que j’ai dit.

Je ne voulais pas qu’il parte. Cette journée avait été infernale. J’avais besoin de lui.

— Non… soufflai-je. Reste.

— Mon père ne va pas aimer ça, insista-t-il.

— Oh… d’accord… on se voit demain ? chuchotai-je.

Il s’avança vers la porte. Je me glissai sous les draps, Patrick contre moi, ma capuche vissée sur mes cheveux mal coiffés. Swann commença à tourner la poignée de ma porte avant de se raviser. Il soupira.

— C’est d’accord, dit-il.

— Quoi ?

— Je vais rester, souffla-t-il.

Il retira ses New Rock et les déposa au pied de mon lit avant de se glisser à côté de moi.

— Est-ce que… tu veux regarder un dessin animé ? balbutiai-je, mal à l’aise.

— Je n’accepterais rien d’autre que le Roi Lion II, déclara-t-il d’un ton solennel.

Mon coeur bondit dans ma poitrine.

— C’est… c’est ton préféré ? demandai-je, choqué.

— Évidemment. Kovu, le sang, ricana-t-il.

— Arrête ! m’écriai-je. Tu te moques, là ?

— Mais non ! C’est mon dessin animé préféré. Je suis un romantique, je n’y peux rien.

Je tâtonnai pour trouver mon ordinateur sur le parquet.

— C’est mon dessin animé préféré aussi, avouai-je avant d’ouvrir Disney+.

Swann cala sa tête sur mon épaule et se colla un peu plus à moi.

— Est-ce que tu accepterais de partager Patrick ?

— Je ne sais pas… tu me l’a volé pendant deux jours, couinai-je.

— C’était de la faute de mon père, dit-il d’une petite voix.

Je soupirai et lui tendis ma peluche. Il la cala entre ses bras, écrasant son visage de panda contre mon torse.

— Prêt ? demandai-je, le doigt au dessus du bouton espace.

— Ça dépend, répondit-il. Si tu ne chantes pas, je préfère rentrer chez moi tout de suite.

J’étouffai un rire gêné.

— Si tu chantes, je chante, le défiai-je.

— Tu l’auras voulu. Il ne faudra pas venir te plaindre après, me nargua-t-il.

Swann s’était endormi au milieu du film, ce qui m’avait permis de verser ma larme aux moments les plus tristes en toute intimité.

Je ne savais pas si je devais le réveiller pour qu’il rentre chez lui. Je ne voulais pas le réveiller, en fait. Je voulais qu’il passe la nuit ici, contre moi.

Mais il avait dit que son père n’allait pas aimer et je ne voulais pas qu’il se fasse engueuler à cause de moi. À contrecoeur, je le secouai doucement.

— Mhh ?

— Tu devrais rentrer chez toi, chuchotai-je. Il va bientôt être vingt-trois heures.

— Oh… souffla-t-il. J’ai raté la fin ?

— Tu as raté la moitié, oui, ris-je.

— Oh merde. J’ai mal dormi les deux dernières nuits, se justifia-t-il avant de se redresser.

— Il faut croire que j’ai un effet soporifique, ricanai-je.

— Ne dis pas ça, s’offusqua-t-il. Je… je suis désolé, je ne voulais pas que tu penses ça. J’adore passer du temps avec toi. Tu ne m’ennuies pas du tout !

Je me mis à rire plus fort. Il me dévisagea.

— Quoi ? demanda-t-il.

— Je rigolais, admis-je. Allez, rentre avant de te faire engueuler, ajoutai-je à contrecoeur.

— Euh… d’accord, dit-il avant de se débattre avec ma couette. Euh… je t’ai ramené un petit cadeau, ajouta-t-il en fouillant dans son sac posé au pied de mon lit.

Il en sortit un petit pin’s panda qui buvait un bubbletea. Je lui arrachai presque des mains.

— Mon dieu, je l’adore, merci ! m’écriai-je. Il est adorable.

Malgré l’obscurité, je le surpris à rougir. Il s’avança jusqu’à la porte après avoir enfilé ses chaussures.

— Comme toi, souffla-t-il avant de refermer la porte derrière lui.

***

@Eryntrans

Il y a 7 heures - 701 j’aime - 92 commentaires

Il y a une question que vous me posez régulièrement. Je n’ai jamais écrit dessus, parce qu’en réalité je ne connais pas la réponse. Alors j’aimerais qu’on y réfléchisse tous ensemble, si vous le voulez bien. Comment être en couple quand on est une personne transgenre ? Comment trouver la bonne personne ? À quel moment, dans une relation, doit-on dire que l’on est trans ? C’est un grand mystère pour moi, parce que je n’ai jamais eu personne. Je n’ai jamais laissé personne entrer, par peur d’être rejeté. C’est tellement difficile de s’aimer soi-même, alors laisser une autre personne nous aimer, c’est terrorisant. J’ai récemment fait la rencontre d’un garçon cisgenre, et il me plait vraiment, vraiment beaucoup. Mais je suis incapable de me jeter à l’eau, parce que je suis terrifié à l’idée qu’il puisse ne pas m’accepter tel que je suis. Il se revendique homosexuel, mais biologiquement je ne suis pas un homme. Je n’ai encore fait aucune opération. J’ai donc un corps dit de femme, aux yeux de la société. Et à ses yeux à lui ? S’il devait se passer quelque chose entre nous, me verra-t-il comme l’homme que je suis ? Ou verra-t-il une femme « déguisée » en homme ? Pour la première fois, je vais vous demander votre aide. Parce que je me sens bloqué. Lâchez-vous en commentaires, n’hésitez pas à laisser vos témoignages, et surtout soyez bienveillants les uns avec les autres !

@Griminal - 6h57

Je viens de voir ton post. Il est troublant et magnifique, comme toujours. Si tu as besoin de parler, je suis là. Je suis désolé, j’ai été égoïste. Je n’ai pensé qu’à moi et je t’ai harcelé sans penser au fait que tu pouvais avoir ton lot de problèmes et que tu pouvais avoir besoin de temps.

@Eryntrans - 7h02

Hey. Et moi je suis vraiment désolé de t’avoir ignoré. J’avais besoin de prendre du recul et de me focaliser sur moi. J’espère que tu t’en sortiras avec ce garçon, mais n’oublie pas de penser à toi. Préserve-toi au maximum, je ne veux pas que tu souffres.

@Griminal - 7h34

Ne t’en fais pas pour moi, je crois que tout va bien se passer. J’y vais doucement, et je verrai bien comment ça évolue. Je veux qu’il se sente à l’aise avec moi, alors je ne veux pas presser les choses. Et si rien ne se passe, alors c’est que ça devait se dérouler ainsi.

J’avais fini par répondre à Griminal, parce que je ne pouvais pas l’ignorer et continuer à poster sur Instagram, ça aurait été trop atroce de faire ça. Mais j’essayais de garder une certaine distance entre nous, même si ça me brisait le coeur pour lui. Mais comment faire autrement ? Je ne pouvais pas le laisser parler de moi comme si de rien n’était, même si c’était flatteur.

J’accrochai mon pin’s panda sur mon sweat bleu avant de dévaler les marches. Je pris une grande inspiration tout en ouvrant la porte d’entrée. J’avais prévu de proposer à Swann de passer après les cours, pour travailler sur notre projet de littérature.