Fyctia

Dans le hall de l’hôpital, je courus tellement vite que je manquai de renverser Maude et mon frère qui m’avaient vu foncer droit sur eux et pensaient probablement que j’allais m’arrêter. Mais je ne les avais même pas remarqués, trop occupé que j’étais à essayer de me rappeler dans quelle direction se trouvait la pièce où j’avais laissé Audrey.

— Hé ! Où tu vas comme ça ? s’exclama Jérémy en m’interceptant.

Hébété et haletant, je ne répondis pas tout de suite.

Maude baissa les yeux comme si elle avait déjà compris.

— …Il faut que je retrouve Audrey…J’imagine que tu sais pourquoi…

Je venais de me rendre compte que mon frère était forcément au courant que c’était Audrey qui avait été à mon chevet tous ces longs mois avant mon réveil.

Il parut presque soulagé en comprenant que je savais mais ses angoisses ne disparaissaient pas toutes pour autant.

— Et comment tu le prends ? Tu gères ?...Tu sais, Audrey m’avait fait promettre de ne rien dire…et on avait peur, tous les deux, que tu replonges dans le coma…

J’acquiesçai. Je ne lui en voulais pas. Ou peut-être que si. Mais pour l’instant, tout ce qui comptait, c’était retrouver Audrey, la remercier et lui avouer tout ce que je ressentais.

Je jetai un coup d’œil à Maude qui était restée muette. Elle soutint intensément mon regard avant de capituler. Elle ôta la bague que je venais de lui offrir un peu plus tôt et la mit dans la paume de ma main.

Je ne savais pas trop quoi dire. Après tout, Maude avait été à mes côtés tout au long de ma convalescence et elle avait compté pour moi aussi mais je me rendais compte à présent que je voulais me marier avec elle pour les mauvaises raisons. J’avais l’impression de lui devoir la vie. Je savais maintenant que ce n’était pas le cas.

En fait, il n’y avait rien à dire. Je refermai ma main sur la bague et la rangeai dans ma poche. Puis je hochai la tête solennellement à l’attention de Maude avant de la prendre une dernière fois dans mes bras.

— Prends bien soin de toi, me chuchota-t-elle à l’oreille avant de tourner les talons.

— Bon. Et maintenant on fait quoi ? demanda mon grand frère.

— On retrouve Audrey !

J’allais m’élancer droit devant lorsque la voix de Jérémy me retint.

— Je crois que ça ne va pas être nécessaire. J’ai l’impression que c’est elle qui t’a retrouvée.

Je pivotai sur moi-même pour suivre son regard et découvris Audrey derrière moi, penaude. Elle semblait complètement perdue et fragile, appuyée sur ses béquilles. Jérémy me donna une tape dans le dos et disparut.

Je m’avançai vers elle en me raclant la gorge. Je n’étais plus du tout sûr de ce que je devais dire. Et si Monica s’était trompée ? Et si Audrey n’avait fait tout ce qu’elle avait fait pour moi que par pure amitié ? Je pris mon courage à deux mains.

— Tu te sens mieux ?

Elle hocha la tête. Elle semblait avoir perdu l’usage de la parole, elle aussi.

— J’ai encore une dernière question si tu veux bien…

Elle acquiesça, visiblement fébrile.

— Pourquoi tu t’es occupée de moi comme ça pendant que j’étais dans le coma ?

— Parce que je voulais que tu te réveilles, que tu reviennes…

Ce n’était pas exactement la réponse que j’attendais.

— Mais pourquoi tu voulais que je me réveille ?

— Parce que tu me manquais trop…

— Mais pourquoi je te manquais trop ?

Elle sourit comme si elle venait de comprendre où je voulais en venir. Je souris moi aussi. Je ne pouvais faire autrement quand elle me regardait de cette manière.

Elle prit une profonde inspiration.

— Parce que je t’aimais…Parce que je t’aime.

Une bouffée de bonheur me submergea. Mon air réjoui était une preuve suffisante mais je le lui avouai également :

— Je t’aime, moi aussi.

Je l’embrassai en essayant de ne pas la déséquilibrer. Rose passa près de nous et nous lança :

— Ahhh, je préfère ça ! Maude, j’espère être invitée au mariage !

Un échange de regards plus tard, nous éclations de rire de concert.