Fyctia
Que trame Julien ?
Lucie récupère mon sac de couchage, s’installe contre le muret et ne tarde pas à s’endormir. Elle me facilite vraiment la tâche en voulant faire une sieste. Son visage encadré de longues mèches humides est si serein tout à coup. Seuls ses yeux cernés de brun trahissent la fatigue et le stress qu’elle vient de ressentir. Lucie et les petites bêtes ce n’est pas une histoire d’amour et ça ne le sera jamais. Elle n’a pas pris la peine d’enfiler un sweat à manches. Je déplie la couverture de survie et recouvre ses bras pour qu’elle ne prenne pas froid. Avant de m’éloigner, je repousse une mèche qui s’est glissée sur son nez. Elle bouge. J’attends. Un léger ronflement se fait entendre.
— Tiens, une jolie princesse qui ronfle.
Si l'envie de la taquiner me prend, j'aurai de la matière. Je souris en imaginant la tête qu'elle fera. Pourquoi, je réagis comme ça avec elle ? Pourquoi j'ai toujours cette envie de... ? Je resterais des heures à regarder Lucie dormir mais je n’ai pas de temps à perdre. C’est le moment, avec la complicité de mes deux acolytes, d’organiser la soirée. En espérant que les amoureux ne jouent pas les prolongations dans l’eau.
Alors que je me mets à la recherche du coin idéal, l’image furtive d’une superbe blonde batifolant dans la fontaine du Parlement occupe mon cerveau. Bordeaux me manque, Coralie et nos actes fous me manquent. Elle était si belle dans sa robe bleue mouillée qui laissait entrevoir les rondeurs de sa poitrine et ses petits tétons qui pointaient sous le tissu fin. Je revois aussi son petit ventre rond qui… non, ne plus penser. Je serre les paupières si fort que des petites étoiles clignotent. Coralie fait partie de ma vie d’avant. C’est le passé et je dois le laisser où il est.
— Au boulot !
°°°
Lucie
La nuit est déjà tombée lorsque je me réveille. Combien de temps ai-je dormi ? Tout est si calme. Je commence à paniquer quand j’entends un cri strident provenant de la cime des arbres. Où sont-ils passés ?
— Julien, Matthieu, vous êtes où ?
— J’arrive ! répond la voix de Melissa qui accourt et s’assoit près de moi sur le sol.
— Je me suis endormie comme une souche. Où sont les hommes ?
— Ils… ils sont… ils cherchent de quoi manger. Laissons-les. Pour une fois, on va se faire servir. Ça nous laisse le temps de nous pomponner.
Je soupire en levant le nez vers le ciel sombre. Quelques nuages aux multiples dégradés de gris voilent la lune pendant quelques instants avant de la libérer pour qu’elle nous éclaire de son éclat.
— Je crois qu’on ne viendra pas nous chercher ce soir.
— Je le crains hélas, me confirme Mélissa.
— Pourquoi tu veux qu’on se maquille ? Il fait nuit et, à part les bestioles dans les arbres, personne ne peut nous voir.
— Ne discute pas. Tu veux bien que je regarde dans ta trousse ?
— Bien sûr, sers-toi.
Mélissa est éblouie par le contenu. Un à un, elle sort les produits et hoche la tête avec un air satisfait. Par contre, le tube ne lui plaît.
— Ma peau noire n’a pas besoin de ce fond de teint trop clair, sauf si je veux ressembler à un fantôme ou à un zombie ! Halloween est passé depuis longtemps.
— Tu as une peau sublime, sans aucune imperfection. Le crayon khôl, le mascara noir et puis ce fard à paupières bleu seront parfaits pour toi.
— Très bon choix ! Mes yeux seront assortis à ma tunique.
— Tu as aussi le choix entre ces trois rouges à lèvres. Je pense que le plus foncé te conviendrait mieux.
— Et toi, le plus clair serait parfait.
Après avoir rectifié trait de khôl au ras de mes cils, Mélissa m’aide à attacher mes cheveux au sommet du crâne avec un chouchou et libère une mèche au-dessus de chaque oreille. Elle les enroule sur son index et vaporise un peu de laque. Lorsqu’elle libère son doigt, deux jolies spirales font le yoyo.
— Tu es splendide !
— Merci, mais je ne sais pas pourquoi tu te donnes tout ce mal pour…
— Patience ma belle.
— Tu veux que je fasse quoi pour ta coiffure ? Je ne sais pas comment…
— Si tu me prêtes ce catogan, je vais me faire un bun sur la tête.
Mélissa fixe l’accessoire après avoir rassemblé toutes ses petites nattes en un gros chignon. Je rectifie quelques détails et insère mes doigts pour écarter un peu les mèches.
— C’est très joli. Si tu aères un peu, tu auras encore plus de volume. Tu es superbe. Regarde-toi dans le petit miroir. Qu'en penses-tu ?
— Tu aurais dû être maquilleuse ou esthéticienne, je n’ai jamais été aussi jolie. Mathieu ne va pas me reconnaître.
— Une touche de parfum et…
— Vous êtes prêtes les filles ? demande Mathieu au loin.
Je ne le vois pas, pas plus que je ne distingue Julien. Mélissa lisse sa tenue avec un petit sourire espiègle à mon intention. Je subodore une embuscade ou un truc du même acabit.
— Que se passe-t-il ? Mélissa, je ne veux pas que...
— Viens ! dit-elle en empoignant mon coude pour m’obliger à marcher à ses côtés.
— Que de mystères. Dans quelle galère vas-tu m'entraîner ? Tu vas m’expliquer à la fin ?
Nous traversons le petit parking et bifurquons sur le côté du bâtiment. J’ai la surprise de ma vie. Je suis téléportée en Corrèze en l’espace de quelques secondes ! Je n'ose pas bouger car j'ai peur que ce mirage disparaisse. Une couche de neige recouvre le sol. Sur une couverture posée au centre, sont disposés plusieurs petits récipients remplis de nourritures diverses et variées. Une carafe et des gobelets sont sur un plateau décoré de fleurs fraîches dont je ne connais pas le nom. Julien sourit et se frotte les mains.
— Alors ? demande-t-il avec une petite voix.
Je ne saurais dire s'il est intimidé ou inquiet.
— Alors je ne trouve pas mes mots devant tant de splendeurs. C’est un vrai chef-d’œuvre d’ingéniosité. C’est donc ça que vous tramiez dans mon dos ?
— Oui. On voulait que tu aies ton réveillon de Noël, même si c’est un peu en avance. Bien sûr, ta famille n’est pas là et il faudra que tu te contentes de nous trois. Piètre consolation je l’avoue mais…
— Vous êtes adorables tous les trois. Vous vous êtes donné tant de mal pour me faire plaisir.
— Tu n’as pas tout vu ! intervient Mathieu. Regarde ce festin. Julien a tout préparé.
— Comment tu as pu cuisiner ?
— J’ai forcé la porte du réfectoire des employés du barrage. J’ai écrit un petit mot pour leur dire que je remplacerai très vite tout ce que j’ai pris. On pourrait réveillonner à l’intérieur mais je tenais à ce que tu vives LE Noël blanc de tes rêves.
— Tu es adorable, vous êtes adorables. Je… suis sans voix.
Mes yeux se mouillent de quelques petites larmes que j’ai beaucoup de mal à contenir. Julien s’en aperçoit car il change de sujet.
— Au final, tu as bien fait de prendre les deux petits extincteurs. Je les ai vidés sur le sol et sur les branches du filao.
En suivant le regard de Julien, je découvre un arbre qui ressemble à un conifère mais son allure est différente. Un arbre de Noël est décoré avec des guirlandes de tissu, des fleurs rouges, des fruits et quelques petites boites en carton.
— Vous avez même décoré un arbre ! On dirait un vrai sapin de Noël !
8 commentaires
Gottesmann Pascal
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Il y a 4 ans
Gaïane MILLER
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Il y a 4 ans
Rose Lb
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Il y a 4 ans
Sissy Batzy
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Il y a 4 ans
AngieWings97
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Il y a 4 ans
Gaïane MILLER
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Il y a 4 ans