Fyctia
L'étreinte murmure 4
Les fragments du miroir semblaient encore flotter dans l'air, comme si l'énergie qu'ils renfermaient refusait de s'éteindre. Tandis que le groupe avançait dans le nouveau passage, un étrange bourdonnement résonnait autour d’eux. C’était comme si les murs, faits d’une matière indistincte, chuchotaient des secrets oubliés. Camille posa une main sur le bras de Léandre, ses yeux fixant l’obscurité devant eux.
— « Quelque chose nous observe, mais ce n'est pas hostile… Pas encore. »
Carthos Jo fronça les sourcils, ses pensées visiblement troublées.
— « Ce labyrinthe n’est pas un lieu ordinaire. C’est un nexus, un entrelacs d’énergies où les frontières entre le divin et le mortel s’effacent. »
Jenny, les mains serrées autour de son pendentif, murmura une prière. Mais sa voix tremblait, mêlée d’un doute qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant.
— « Et si ce que nous cherchons n’était jamais destiné à être trouvé ? »
Le couloir s’élargit soudain, débouchant sur une vaste salle plongée dans une pénombre irréelle. Au centre, un cercle de lumière vacillait, et dans cette lumière, un socle se tenait. Mais autour de ce socle dansaient des ombres, leurs formes indistinctes ondulant comme de la fumée vivante.
Léandre fit un pas en avant, mais une voix douce et glaciale résonna dans l’air :
— « Approcher, c’est renoncer. Reculer, c’est oublier. Que choisirez-vous ? »
Les ombres semblaient répondre à ces paroles, leur mouvement devenant plus frénétique. Elles se tordaient, formant des visages, des souvenirs, des regrets. Chacun dans le groupe voyait une image différente.
Jenny vit sa mère, morte depuis longtemps, tendant une main vers elle. Camille vit une jeune fille souriante, son propre reflet, celui qu’elle avait abandonné dans sa quête d’immortalité artistique. Christopher se vit lui-même, mais dans une version idéale, où ses doutes s’étaient dissipés.
Léandre, quant à lui, vit son père, une figure lumineuse qui semblait l’appeler.
— « Mon fils, pourquoi continuer ? N’as-tu pas déjà prouvé ta valeur ? Reviens. »
Les membres du groupe hésitèrent. Mais Léandre, les poings serrés, murmura d’une voix ferme :
— « Ce ne sont que des illusions. Rien de tout cela n’est réel. »
Mais les ombres semblaient s’énerver à ces mots, leurs murmures devenant des cris. Une forme plus grande se détacha du cercle, une ombre massive qui semblait aspirer la lumière autour d’elle.
— « Si tu prétends connaître la vérité, alors prouve-le, » gronda la silhouette, sa voix vibrante comme un coup de tonnerre.
Elle s’élança vers Léandre, une vague de ténèbres menaçant de l’engloutir. Camille hurla et tendit la main, mais Léandre leva la sienne, une lumière étrange jaillissant de ses doigts. C’était un éclat qu’il ne comprenait pas, une force qu’il n’avait jamais appelée.
L’ombre recula, sifflant, avant de se dissiper dans le néant.
Sur le socle au centre de la salle, une tablette gravée se matérialisa lentement. Camille s’approcha, les doigts tremblants, et lut à voix haute :
— « La beauté n’est pas dans la perfection, mais dans l’épreuve. La lumière se trouve dans les ombres que l’on dépasse. Si vous cherchez l’éternel, commencez par embrasser ce qui est mortel. »
Carthos Jo hocha lentement la tête.
— « C’est une leçon, un avertissement. Ce que nous cherchons n’est pas un trésor parfait, mais une vérité qui nous dépasse. »
Jenny ajouta, les yeux brillants d’une lueur étrange :
— « Peut-être que l’éternité n’est pas un don, mais une malédiction. Peut-être que ce que nous devons trouver, ce n’est pas un objet… mais une compréhension. »
Alors qu’ils se tournaient vers la sortie nouvellement apparue, Léandre sentit une chaleur étrange dans sa poitrine. Une voix douce, lointaine, semblait murmurer à son esprit, comme un souvenir oublié :
— « Tu as franchi un seuil, mais il reste tant à comprendre. Continue, et les vérités te seront révélées. »
Il posa la main sur le pendentif qu’il portait, un cadeau de son père, et inspira profondément. Ce labyrinthe n’était qu’une étape, mais il savait que la quête ne faisait que commencer. À chaque mystère résolu, d’autres se révélaient, plus profonds, plus troublants, mais peut-être aussi plus proches de ce qu’ils cherchaient réellement : le sacré dans l’imperfection humaine, et la vérité enfouie dans les ombres de l’âme.
Le groupe avançait dans un silence lourd, leurs pas résonnant dans le couloir interminable qui s'étirait devant eux. Chaque mur semblait respirer, comme s’il était fait d’une matière vivante, imprégnée d’une énergie que personne n’osait nommer. Les symboles gravés le long des parois pulsaient faiblement, un langage ancien que même Carthos Jo, pourtant érudit, ne pouvait déchiffrer.
Léandre tenait la tablette récupérée dans la salle précédente, son esprit absorbé par les mots qui y étaient inscrits. Il sentait que ces phrases ne racontaient pas une simple vérité universelle, mais un cheminement, une invitation à franchir les limites de ce qu’il croyait être la réalité.
— « La lumière dans les ombres... » murmura-t-il pour lui-même, cherchant un sens plus profond.
Camille, à ses côtés, lui lança un regard.
— « C’est une épreuve de foi, Léandre. Pas dans le sens religieux, mais dans ce que nous sommes prêts à sacrifier pour atteindre une vérité plus grande. »
— « Mais quelle vérité ? » répondit-il, la voix tendue. « À chaque réponse, une nouvelle énigme apparaît. Le divin n’est-il qu’une série infinie de portes qu’on ouvre sans jamais atteindre le cœur ? »
Carthos Jo s’arrêta soudain, levant une main pour signaler au groupe de s'immobiliser. Devant eux, une lumière crépusculaire émanait d’une arche massive sculptée dans la pierre. Des fresques complexes recouvraient l’entrée, représentant des figures humaines tendant les bras vers une sphère lumineuse, tandis que des ombres grimaçantes les entouraient, tentant de les retenir.
Jenny, les yeux rivés sur la fresque, murmura presque inaudiblement :
— « C’est un reflet de l’âme... Les ombres sont nos doutes, nos peurs. Elles nous retiennent, nous éloignent de la lumière divine. »
Bill Kal, qui s’était tenu en retrait, éclata soudain de rire, mais son ton était nerveux.
— « Alors quoi ? Nous sommes censés abandonner nos doutes et devenir… parfaits ? Parce que si c’est le cas, je n’ai rien à faire ici. L’imperfection est l’essence même de l’art ! »
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