Fyctia
Divaguation
Je ressens cette phrase comme un coup de poing dans l'estomac. Mon souffle se bloque, mais j'essaye de ne rien laisser paraitre. De garder mon masque. De faire comme si tous allaient bien. Comme si je n'avais pas peur. C'est ce qu'ils veulent de moi. Une réaction de ma part. Je ne leur ferais pas ce plaisir. À la place, j'écarquille les yeux et pose ma main devant ma bouche. Je prends quelques secondes avant de répondre :
— Vous... vous pensez que ça peut être grave ? balbutié-je. Ambre peut être n'importe où, pas vraie ? C'est sans doute une blague, une mise en scène. Elle a le sens du spectacle après tout ! Si ça se trouve, demain elle reviendra en cours !
Je les regarde l'un et l'autre avec espoir, les mains tremblotantes et les yeux larmoyants. Tous deux se regardent l'air gêné.
— Peut-être... répond l'homme sans y croire.
Il rejoint sa collègue à l'entrée du salon et marque un temps d'arrêt, son regard se portant vers la cuisine. Ses sourcils se froncent et son nez se plisse. De la où je suis, j'entends qu'il inspire deux fois de suite. J'ai une mauvaise intuition. Se doute-t-il de quelque chose ? Son regard se tourne ensuite vers moi, d'un air curieux. De son pouce, il pointe la pièce en question et demande :
— Cette odeur que je sens, c'est de la javel ?
Si un coeur pouvait exploser, le mien le ferait. Il se répandrait tout autour de moi en un millier de petits morceaux. Comment ai-je pu croire que l'odeur caractéristique de la javel passe inaperçue ?
Je prends le temps de répondre en feignant que je ne comprends pas sa question et je lui dis :
— Heu... oui, ce matin j'ai fait tomber du jus d'Orange sur le sol. Pour éviter qu'il ne colle, j'ai dû passer un coup de serpillière. Pourquoi ?
— Pour rien.
Il jette un nouveau coup d'oeil suspicieux dans la pièce ou Ambre est morte et la détaille pendant quelques secondes qui semblent durer une éternité. Il regarde ensuite sa collègue comme s’il communiquait avec elle par la pensée. Ils se doutent de quelques choses.
— Et maintenant, qu'est-ce qu'il va se passer ? demandé-je pour les interrompre dans leurs échanges muets. Si elle ne rentre pas.
— Nous allons continuer à interroger les proches de votre amie. Des gendarmes sont en train de faire une battue en ce moment même dans les environs pour retrouver Ambre ou déceler des indices.
— Et si ce n'est pas concluant ?
— Si ça ne l'est pas, elle sera portée disparue ce qui implique un avis de recherche et des appels à témoins, dit l'homme d'un air grave. Et une enquête sera ouverte pour disparition inquiétante.
Je fais en sorte de ne pas prendre un air paniqué et de rester calme. Détendue. Je prends toute foi un air peiné et n'empêche pas mes yeux de s'embuer de larmes. Les deux policiers me regardent toujours avec attention.
Il faut qu'ils s'en aillent. Et vite.
Je déraille.
Mon pouls s'affole. J'ai peur de craquer devant eux.
— Bon. Nous en avons terminé pour aujourd'hui. Si jamais vous avez des informations qui pourrait nous être pertinentes, si vous vous souvenez de quoi que ce soit, téléphonez ce numéro, me dit-il en tendant une carte. On reste en contact.
Et ils partent. Enfin.
J'ai l'impression de pouvoir respirer à nouveau. Mais pendant combien de temps ?
Ma mère qui était partie dans sa chambre revient dans le salon avec un grand sac dans les mains et jette un coup d'oeil autour d'elle. Son visage est apathique. Rien ne transparaît sur son visage. Aucune émotion. Elle montre une indifférence totale. Elle est loin la mère aimante que j'avais avant. Lorsque ses yeux se fixent sur moi, son regard va de haut en bas. Elle me détaille. Me juge. Sa tête remue de droite à gauche d'un air exaspéré.
— Mais qu'est-ce que tu as encore fait ? crache-t-elle avec haine.
Ma bouche s'ouvre de surprise. Je ne dis rien parce qu'il n'y a rien à dire. Elle n'attend pas de réponse. Elle veut juste exhaler sa haine qu'elle a depuis que mon père n'est plus là. Elle m'accuse en être la cause, car, si je n'étais pas née, il serait encore là.
— Je vais passer mon week-end chez Richard, dit-elle d'une voix blanche. Ne te fais pas coffrer en mon absence.
Après qu'elle est ouverte la porte d'entrée, elle se retourne vers moi et déclare avant de sortir :
— J'ai toujours su qu'un jour, tu deviendrais comme ton père.
Et elle part, laissant derrière elle des questions sans réponses.
* Que veut-elle dire par là ? Qu'est-ce qu'est devenu mon père ? Elle a des nouvelles de lui ? *
Mon corps tremble. Ma tête me lance. Je ferme les yeux quelques instants et les ouvres. Tous me semblent différents tout en étant pareils.
* Mais qu'est-ce qu'il m'arrive ? *
Les murs se rapprochent de moi. Lentement et de plus en plus vite. Je me lève et cours me réfugier dans ma chambre. Mes jambes se lâchent lorsque je rentre dans la pièce.
* Calme-toi Leslie. Tu es en sécurité. Tout va bien se passer. *
Je m'allonge sur le sol, la main sur le coeur et compte dans ma tête.
1
2
3
Il y a du bruit. Des sortes de grattements, de couinements, de grincements, de bourdonnements ...
Je ferme les yeux et continue de compter, mais à voix haute.
4
5
6
Je sens des choses me frôler, me toucher.
Mes cheveux me grattent, mes jambes me piquent.
Je poursuis en criant presque et j'ouvre les yeux, peu à peu.
7
8
9
Et je cesse.
Tout autour de moi, il y a des insectes.
Partout.
De toutes sortes.
Des rampants, des volants...
J'ai peur.
Ils sortent des murs, du sol et de ma peau.
Je me lève et hurle. Je secoue mes vêtements, ôte ceux qui restent sur moi. Je tape des pieds, écrasent ce que je peux, mais plus je le fais, plus ils apparaissent et plus ils grossissent.
— Partez ! gémis-je.
Ils sont maintenant aussi grands que ma main. Ils ont des yeux sur tous leurs corps. Leurs bouches possèdent des dents acérées. Les insectes aériens ont cessé de voler. Ils rampent dorénavant comme tous les autres, les ailes baissées avec l'air peiné.
Et puis je les entends. Des chuchotements simultanés. Ceux d'Ambre.
— Tu ne sers à rien Leslie. Tu es une erreur de la nature. Tu ne mérites pas de vivre.
— Stop, arrête. Stop, pleuré-je.
— Personne n'est là pour toi. Tu ne comprends rien. Tu es inutile. Espèce d'idiote.
Je pose mes poings contre mes tempes et les frappes pour que cela cesse. Je regarde autour de moi, cherche d'où ça provient. Mais rien.
Je crie.
C'est vide dans ma tête. Je n'ai plus de repère. Je me noie dans ses paroles.
Je m'étouffe.
Je ne contrôle plus rien.
____
* En italique dans le texte. *
Je vais essayer de publier plus régulièrement donc, restez à l’affût! :*
5 commentaires
BbyBarbie
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Il y a 7 ans
Morganou
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Il y a 7 ans
St. Clare
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Il y a 7 ans
x-zanita
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Il y a 7 ans
frenchwriteuz
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Il y a 7 ans