Fyctia
Chapitre 2 : Lyla (2/2)
— Ensuite, tu dors, poursuite ma meilleure amie. Tu profites de la magnifique suite dans laquelle tu vas passer six jours, et demain matin, quand tu ouvriras les yeux, que tu repenseras à tout ce qui s’est mal passé, tu te lèveras, tu ouvriras ta fenêtre, et tu admireras le paysage enneigé. Tu filmeras et tu me l’enverras pour que je profite de la vue à distance. Ensuite, tu prendras ton petit déjeuner royal servi par le Chef qui va rester à ta disposition.
— Surtout celle de Spritz, je pouffe. Parce qu’il ne mange que du poulet de Bresse je rajoute en imitant le ton presque inquiet de sa maîtresse lorsqu’elle m’a expliqué le régime alimentaire de son toutou.
— Une fois que tu auras fait les trucs que tu dois faire pour ce chanceux de Spritz, tu testeras le jacuzzi, et seulement à ce moment-là, tu auras le droit de repenser à ce que tu as perdu. Ce sera plus doux, parce que tu seras dans une eau chaude, face à un paysage de dingue. Et tu penseras à moi qui suis coincée dans mon studio à Paris, avec mes cours comme seule distraction.
— T’es la meilleure, Pao. Merci.
— Ne l’oublie pas, quand tu seras plus riche que ton caniche.
— Un splitz nain.
— On s’en fout. Prends soin de toi, et pour t’aider à traverser ton deuil, trouve-toi un mec. Ça ne doit pas manquer, là-bas, à c’te période.
— C’est pas encore les vacances, c’est assez mort. Et j’te rappelle que j’ai pas le droit de faire venir qui que ce soit ici, et que je ne dois pas emmener Spritz ailleurs que sur ses chemins de balade habituels parce qu’il est sensible au changement, je récite les mots appris par cœur. Je vais fêter le début de l’Avent en tête à tête avec un clébard. Mais un clébard chic.
L’Avent est une période que je célèbre chaque année depuis sept ans. C’est mon ode à la vie à moi, un rituel que Paola connaît très bien puisque c’est avec elle que j’ai eu la force de l’instaurer et de me choisir pour la première fois.
En principe, l’Avent est une période centrée sur les gens qu’on aime, faire plaisir aux autres, profiter ensemble. Moi, j’ai inventé un nouveau concept : l’Avent du self-love, en mode je ME séduis. Après ce que j’avais vécu, c’était vital, une résurrection, des retrouvailles avec qui j’étais, sans toutes mes peurs et les costumes que j’avais accepté de porter.
Ensuite, les 24 premiers jours de décembre sont devenus mon rendez-vous annuel où je me chouchoute, où je m’autorise à être curieuse, audacieuse, coquine, où je me mets à nu pour mieux m’aimer. Comme une parenthèse, un espace-temps où je suis mes véritables envies, et j’emmerde les jugements. Surtout ceux que j’ai le reste de l’année.
— As-tu déjà célébré un 1er décembre en dégustant des mets délicieux en te prélassant dans un jacuzzi ou en allant faire ta belle dans la neige ? demande Paola en me sortant de mes pensées. Cette année, ce n’est pas un Avent classique que tu vas célébrer, entre Courchevel et ensuite la Thaïlande. Non, ma chérie à la vanille, tu vas scaler le concept même de l’Avent du self-love. Tu es plus que prête pour vivre le truc à un niveau bien plus haut !
Je bombe le torse et fais rouler mes boobs dans les paumes de mes mains.
— Voilààà, elle sourit en se mettant à onduler pour se mettre dans le même mood que moi. On est des meufs magnifiques, personne ne nous marche sur les pieds, on se fait du bien, on se choisit, on est sensuelles et unstoppables !
— Je t’aime, Pao, je réponds en essayant de ressentir aussi pleinement qu’elle cette énergie powerfull qu’elle a toujours dégagée et dont j’ai l’impression de manquer constamment.
— Moi aussi, ma petite rebelle à la cannelle.
Elle mime un bisou avec ses lèvres près de la caméra, et on raccroche. S’il y a une chose que j’ai apprise depuis que je la connais, c’est à prendre ma responsabilité. J’ai choisi ce contrat parce qu’il me permet de ne pas prendre de nouvelle mission avant février. Et ça, c’est plutôt cool parce que j’ai aussi envie de voyager juste pour moi.
Je me plante devant le lit kingsize dans lequel je vais dormir ces prochaines nuits. Je passe la main sur la couette, sur l’oreiller, c’est tellement doux. Il faisait déjà nuit quand nous sommes arrivés mais les décorations de fin d’année ont illuminé les villages enneigés que nous avons traversés. J’ai l’impression d’avoir atterri dans une boule à neige magique. Boule que je quitte dans une semaine pour les plages de Thaïlande. Paola a plus que raison : la vue doit être dingue, le matin, et je vais en profiter avant d’aller me la couler douce au soleil et vivre un Avent comme jamais jusqu’ici.
J’attrape mon livre, me glisse dans mon lit et m’efforce de me concentrer sur les mots qui s’alignent devant moi, pour éloigner les milliers que j’ai écrits dans mes carnets et qui ont disparu à tout jamais.
13 commentaires
loup pourpre
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Il y a 10 jours