Fyctia
Chapitre 11
Ce soir, nous sortons dans un club de jazz qui vient d’ouvrir dans le centre de Lyon. Nous sommes huit employés de chez LogiSolu autour d’une grande table basse, pas très loin de la scène. L’ambiance est vraiment sympa. La pièce circulaire est décorée dans des tons marron, les murs sont en brique apparente, les fauteuils Chesterfield dans lesquels nous sommes assis sont très confortables. Les lumières tamisées rendent le lieu intime.
Ça fait environ une heure que nous sommes là et c’est mon tour d’aller payer ma tournée. Je prends donc les commandes de chacun et me dirige vers le bar où il y a foule. Vu ma taille, je suis presque obligée de sauter en agitant les bras pour attirer l’attention du barman dont le coin de la bouche s’étire quand il remarque mes gesticulations. Lorsque ma commande est réunie sur un plateau, il me regarde et lance :
— Montre-moi ta carte d’identité, jeune fille.
J’écarquille les yeux.
— Quoi ? Mais vous êtes dingue ?! J’ai 28 ans !
— Ouais, c’est ça. Et moi, j’suis le frère illégitime du prince Harry ! Ta carte. Ou bien tu peux repartir, mais sans les verres.
Alors ça ! Quel culot ! Il me tutoie en plus ! Je ne dirai pas que c’est la première fois que ça m’arrive, seulement, plus je vieillis, plus je trouve ça ridicule. Je pousse un soupir bruyant pour lui montrer mon mécontentement, mais le type a les bras croisés et attend.
— J’arrive, marmonné-je en le fusillant du regard. Ma carte est dans mon sac.
— Ton sac à dos Pokémon, tu veux dire ?
Alors là, il va trop loin ! Je rebrousse chemin, énervée, et rejoins la table, sous les regards ahuris de mes collègues.
— Qu’est-ce qui t’arrive, ma jolie ? me demande Dieudonné, mon comparse du service facturation.
— Je dois apporter ma carte d’identité au serveur, bougonné-je en attrapant mon portefeuille.
Je décèle plusieurs rires étouffés autour de moi, ce qui m’énerve encore plus.
— C’est bon, arrêtez de vous moquer, râle Dorothée, la standardiste, qui adore prendre ma défense. Tu veux que j’aille récupérer la commande, ma grande ?
— Ou moi, je peux y aller, reprend Dieudo. Il est plutôt très mignon, ce blondinet.
— Non, merci, je vais aller lui coller ma carte sous le nez et lui fermer son clapet !
Quand j’arrive au niveau du comptoir, le serveur m’a vue, mais il fait comme si de rien n’était. Mon bonhomme, tu rêves pour que je me remette à sauter et à gesticuler dans tous les sens pour attirer ton attention. Furax, je joue des coudes pour pouvoir me placer juste en face de lui. Je claque ma carte d’identité sur le zinc et lance :
— C’est bon ? Je peux l’avoir, ma commande ?!
— Dis donc, elle va se calmer Pikachu ?
Je vois rouge. Mais, à part piquer une colère et me ridiculiser encore plus face aux autres clients, je ne vois pas trop quoi faire. C’est alors que je sens une présence dans mon dos. Une main se pose sur mon épaule.
— Il y a un problème, chérie ? murmure une voix ferme près de mon oreille.
Je me retourne, Fred fixe le barman. Je pivote de nouveau, celui-ci ne fait plus le malin. On dirait qu’il transpire, tout à coup. Il faut dire que mon collègue mesure dans les 1 m 85. Et, en cet instant, il n’a pas l’air de rigoler.
Prends ça dans les dents, blondinet !
— Non, tout va bien, chéri. Eh oui, lancé-je au barman, Sacha n’est jamais très loin de Pikachu.
Il me tend le ticket de caisse sans rien dire, je règle la note et suis Fred qui s’est emparé du plateau.
— Merci. Tu es arrivé à pic.
— J’ai vu son manège de loin. J’ai compris qu’un petit coup de main ne serait pas superflu.
— Comme tu as bien fait !
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elia
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Il y a 2 ans
Margo H
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Il y a 2 ans
Patricia Eckert Eschenbrenner
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Tayssir
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Stella No.
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Il y a 2 ans
RomyMancini
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Il y a 2 ans