cedemro Miracle au soleil Acheter le bonheur

Acheter le bonheur

Voyant le découragement partagé par les trois femmes se trouvant avec lui, Lucas comprend qu’il n’a pas tout saisi de leur situation. Le visage long, Manuella essuie les larmes qui ont recommencées à couler le long de ses joues et reprend la parole.


— Vous me voyez obligé de dire que mon renvoi est tout à fait valable à leurs yeux. Ils ont l’argent et ils achètent tous les droits dont ils ont besoin. Personne ici ne peut rien contre ça. Le mieux pour moi est de partir le plus loin possible.


Outré par la situation, Lucas se sent terriblement impuissant. Pour la première fois de sa vie, il ne trouve aucun sens à l’adage de sa mère. Dans la situation actuelle, il semble que l’argent fait bel et bien le bonheur et cela le dégoûte. Une idée prend alors naissance dans son esprit.


— Si vous devez quitter cet hôtel, alors je ne vois pas pourquoi moi j’y resterais ! Il doit bien y avoir d’autres complexes dans les environs qui accepteraient de vous prendre ?


Sans surprise, Lucas se retrouve devant trois visages étirés par l’incompréhension. Près de lui, Manuella s’abandonne une fois de plus aux larmes.


— La famille Santos ne tardera pas à répandre la nouvelle parmi leurs connaissances. Personne n’acceptera de s’opposer à eux.


— Dans ce cas, c’est moi qui vous invite ! Cela vous permettra au moins d’avoir un toit au-dessus de la tête le temps de retrouver un emploi. Ne vous inquiétez pas, je n’attends rien en retour.


Étonnée par l’offre de cet homme dont elle ne connaît même pas le nom, Manuella s’empresse de répondre.


— Merci, mais je ne peux pas accepter. Je ne veux pas gâcher vos vacances.


— Je ne vois pas en quoi votre présence gâcherait quoique ce soit. Au contraire, votre compagnie me serait très agréable. Vous aurez bien sûr votre propre chambre.


— Pourquoi feriez-vous ça ? Vous ne savez rien de moi.


— Considérez cela comme un simple service. Vous me semblez être une bonne personne et vous ne méritez pas d’être jetée à la rue pour avoir refusé les avances de cet homme, aussi riche soit-il. Vous n’êtes pas un objet que l’argent peut acheter.


Visiblement émue par l’offre désintéressée de Lucas, l’hôtesse décide d’intervenir.


— Tu devrais accepter, Manuella. Tu mérites mieux qu’une vie au service des frères Santos. À ta place, je n’hésiterais pas une seconde.


Après un long silence, la jeune femme prend sa décision. Sa valise fermement tenue dans sa main, elle prend une grande inspiration avant d’ancrer son regard dans celui de Lucas.


— Puis-je vous suggérer un hôtel ? lance-t-elle avec hésitation.


— Vous les connaissez sûrement mieux que moi. Tout mon voyage a été planifié par une agence. Je ne connais rien de ce pays…


— J’ai une ancienne amie qui travaille au Sanctuary Cap. Je sais que ce complexe n’appartient pas à la famille Santos, mais il est très dispendieux.


— Cela me convient, dans la mesure où vous faites la réservation. Je me débrouille assez mal en espagnol…


— D’accord.


Dès qu’elle monte dans la limousine, Manuella laisse échapper un long soupir. Assise devant Lucas, elle peine à calmer ses tremblements de nervosité et ferme les yeux pour essayer de retrouver le calme.


— Je comprends que vous soyez nerveuse après ce qui vient de vous arriver, commence Lucas. L’hôtesse m’a informé de la situation de votre père.


— Et cela ne vous fait pas peur ? Je pourrais très bien suivre le même chemin…


— Même si cela me fait passer pour un cinglé, c’est un risque que je suis prêt à prendre. Je suis du genre à penser que tout le monde a droit à une seconde chance dans la vie.


— J’aimerais que les gens ici pensent comme vous. J’ai tout perdu lorsque mon père s’est fait prendre. Mes amis se sont éloignés, j’ai été renvoyée de l’université et aucun employeur sérieux ne considère ma candidature lorsqu’ils apprennent le passé de ma famille.


— Et votre mère ?


— Elle est morte quelques mois après l’emprisonnement de mon père, il y a deux ans de cela.


— Je suis sincèrement désolé. Je sais que cela ne vaut probablement pas grand-chose dans le contexte actuel, mais je n’ai aucune intention de vous repousser suite à ce que je viens d’apprendre à votre sujet.


— Cela vaut beaucoup à mes yeux. Vous n’avez pas idée combien je suis heureuse d’avoir osé m’approcher de vous à la piscine plus tôt aujourd’hui.


— Puisque vous en parlez, puis-je vous demander pourquoi êtes-vous venue vers moi ?


— Vous allez me trouver ridicule si je vous donne la véritable raison…


— Je vous promets que non.


— Je voulais savoir quel livre vous étiez en train de lire. Dès que j’ai vu qu’il s’agissait du premier tome du Seigneur des anneaux, j’ai pensé que nous avions au moins ce point en commun.


— Vous appréciez Tolkien ?


— J’adore les univers fantastiques. Cela m’a toujours fait rêver. J’aime parfois m’imaginer dans la peau de Galadriel, à la tête du peuple elfique. Avouez que c’est ridicule.


— Au contraire, je trouve cela fascinant ! J’ai lu la trilogie entière de nombreuses fois et je travaille actuellement sur un projet de jeu vidéo centré sur l’univers des elfes imaginé par Tolkien. Mes collègues trouvent l’idée absurde, comme à peu près tout mon entourage. Malheureusement pour eux, c’est moi le patron !


— Moi je trouve votre idée merveilleuse. S’il est disponible ici, j’achèterai votre jeu sans la moindre hésitation !


Ravi de pouvoir partager sa passion avec Manuella, Lucas sent son cœur s’emballer. Jusqu’ici, jamais il n’a rencontré une femme montrant un intérêt pour les mondes imaginaires. Posant un regard nouveau sur la jeune femme, il a soudainement une idée folle.


— Êtes-vous prête à voyager ? demande-t-il, rempli de confiance.


— Quoi !?


— Vous savez que l’animation des personnages utilisent des modèles humains pour augmenter le réalisme des mouvements ?


— J’ai vu quelques vidéos sur le sujet.


— Vous m’avez dit vous être souvent imaginée dans la peau de Galadriel. Cela serait une occasion rêvée pour vous de réellement entrer dans la peau du personnage.


— C’est absurde ! Vous avez certainement tous les modèles nécessaires. Je n’ai aucune expérience dans ce domaine.


— Je me fiche de l’expérience. Vous avez le physique idéal pour le rôle. En plus, le teint magnifique de votre peau colle parfaitement au personnage !


Rougissant suite au compliment reçu, Manuella peine à assimiler la situation. Il y a quelques minutes, elle a presque tout perdu, pour ensuite se faire offrir un rêve sur un plateau doré. Réalisant qu’elle ne connaît toujours pas le nom l’homme assis devant-elle, elle se permet une question.


— Si j’accepte, me donnerez-vous au moins votre nom, monsieur l’inconnu ?


— Je m’appelle Lucas. Et, par pitié, surtout pas de monsieur avec moi. Je refuse d’être vouvoyé par mes employés, encore moins par mes amis.


— N’est-ce pas un peu tôt pour parler d’amitié ?


— Tout ce que je sais, c'est que j'ai vraiment envie de passer du temps avec toi. Bien sûr, je ne t'oblige à rien si ce n'est pas ce que tu veux.


— J'accepte avec plaisir.






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