Fyctia
Chapitre 1
-Je crois que je vois la lumière...
Je me mis à rire et me laissai tomber à côté de Claire.
-T'exagères pas un peu ? lui dis-je.
-À peine. J'ai mal à des endroits dont je ne connaissais même pas l'existence. Mon cœur est à deux doigts de sortir de ma poitrine et j'ai les poumons tellement en feu que je risque de faire une combustion spontanée à tout moment.
Je levai les yeux au ciel, sans pour autant réussir à m'empêcher de sourire à pleines dents.
-Tu aurais dû être comédienne, lui dis-je. Tu as l'art des répliques théâtrales.
-C'est ça, moque-toi. C'est de ta faute si je suis dans cet état.
-Eh, c'est toi qui es venue me supplier de te concocter un programme sportif personnalisé.
-Et je regrette déjà...
-Voilà ce qui se passe quand on force trop alors qu'on n'a plus l'habitude de faire du sport. Je t'avais dis d'y aller doucement.
Pour un peu elle me ferait de la peine. Mais, comme je le lui avais fait remarquer, c'était elle qui m'avait demandé de la coacher.
Claire devait se marier dans trois mois et, la semaine dernière, elle avait subitement décidé de perdre les cinq kilos qu'elle pensait avoir en trop. Évidemment, elle avait eu cette « prise de conscience » juste après ses essayages de robes.
J'avais beau lui avoir dit qu'elle n'avait pas besoin de ça pour être magnifique – elle l'était déjà –, elle n'avait rien voulu savoir. Même son futur mari, Nick, n'avait pas réussi à lui faire entendre raison.
Remarque, nous avions été bien bêtes de croire que nous pourrions la faire changer d'avis. Claire était du genre têtu. Difficile de la raisonner quand elle avait une idée en tête. Depuis le temps qu'on se connaissait elle et moi, j'avais compris qu'il ne servait à rien d'essayer de lui faire changer d'avis, sinon d'essayer de trouver un compromis.
Du coup, j'avais accepté de l'aider, mais sous certaines conditions. Je lui montais un programme d'entraînement personnalisé, qui l'aiderait à atteindre son objectif perte de poids, mais elle devait manger correctement et sans se priver. Je savais qu'elle aurait été capable de s'affamer si cela pouvait l'aider à maigrir plus rapidement. Et pour m'assurer qu'elle ne se mettait pas à la diète, je l'obligeais à m'envoyer la photo de ses repas tous les jours. Sauf quand on déjeunait ensemble, évidemment. Comme ce devait être le cas aujourd'hui.
Je regardai ma montre. Il était presque onze heures trente.
-Allez, debout ! dis-je en me relevant. C'est l'heure de la douche.
-Laisse-moi mourir en paix, grommela Claire.
-Hors de question que tu laisses traîner ton cadavre ici. Ça ferait mauvais genre auprès des autres clients.
-Tu n'as pas de cœur.
-Et c'est maintenant que tu t'en rends compte ?
Elle ouvrit enfin les yeux pour me lancer un regard noir.
-M'oblige pas à te traîner de force sous la douche et à te savonner moi-même, la menaçai-je.
-Oulà, non merci, dit-elle en se redressant finalement péniblement. Tant qu'à me faire shampooiner par un beau mec musclé, je préférerais que ce soit Chris Hemsworth.
-Hmm...oui. Je m'imagine très bien en train de prendre une douche avec Thor.
Claire me donna un coup de poing dans le bras. Apparemment, il lui restait encore un peu d'énergie.
-Ne fantasme pas sur le même mec que moi ! Trouve-toi un autre super-héros.
-T'es juste jalouse parce que, de nous deux, tu sais que c'est moi qu'il préférerait.
-Pff... Dans tes rêves.
Nous commençâmes à ramasser nos affaires.
-De toute façon, reprit Claire, la question ne se pose pas. Il est déjà marié.
Elle se tourna vers moi.
-Et je te rappelle qu'il est plutôt branché femme. Tu n'as aucune chance.
-Les défis ne m'ont jamais fait peur, rétorquai-je. Et tu as admis toi-même que j'étais un beau mec musclé. J'ai mes chances.
Claire se mit à rire et nous quittâmes la salle pour laisser la place au cours suivant.
Voilà pourquoi je m'entendais si bien avec elle. Elle n'avait pas peur de plaisanter sur mon homosexualité – tout comme je ne me gênais pas pour me moquer de son mètre cinquante-cinq, ou encore de son amour inconditionnel pour les films des années quatre-vingt. La plupart des gens que je connaissais savaient que j'étais gay. Je ne m'en cachais pas, d'ailleurs. Mais rare étaient ceux qui se permettaient de faire des blagues sur le sujet. Seuls mes amis les plus proches le faisaient. Et Claire était sans doute la plus à l'aise avec ça. Pas étonnant qu'elle soit ma meilleure amie depuis dix ans.
-On se change et on se retrouve dans trente minutes à l'accueil, dis-je. C'est bon pour toi ?
-Ça marche. À tout à l'heure.
Elle planta un baiser sur ma joue avant de partir en direction des vestiaires pour femmes.
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