Sylvie Marchal Marie Chapitre 8

Chapitre 8

Fière de son gros ventre, Marie aime déambuler dans les rues de Bordeaux, à la recherche d’un petit bonnet ou d’une grenouillère qui viendrait parfaire le trousseau de son futur bébé. Cet enfant sera sa réparation ultime, celle qui embellira pleinement son existence.

Son mariage avec Manu a déjà été un magnifique tremplin vers une vie remplie de soleil, mais cet enfant, elle l’attend comme le Messie. La jeune femme a cessé de travailler au restaurant, d'un commun accord avec son époux. Elle sera mère au foyer, pour quelques années au moins. Les enfants à venir seront le centre de son monde, alors elle reprend la couture et le tricot, activités qu'elle avait délaissées depuis la fin de l'école ménagère. Ses mains, son temps libre, son savoir-faire... Tout est dédié à sa future progéniture.


Marie aimerait que ce nourrisson soit une fille et que Marianne en soit la marraine. Elle n’ose pas le dire à haute-voix, mais depuis que son innocence a été broyée, elle s’imagine que, même pour faire la toilette d’un tout-petit, un pénis est un obstacle majeur.


Le quinze octobre 1975, au petit matin, le silence règne encore dans le modeste immeuble de Libourne. Les voisins sont sans doute encore endormis, le froid qui s'est installé de manière précoce sur la région donne davantage envie de se blottir sous la couette que de sortir de chez soi.


C'est d'ailleurs au réveil que les premières contractions se font sentir. Par chance, Manu est de repos ce jour là, alors il peut rassurer sa femme, reculer la voiture devant la porte d’entrée, charger la valise et accompagner Marie à la maternité de l’hôpital Pellegrin, à Bordeaux.


La jeune femme souffre déjà, son ventre se serre violemment par intermittence, des décharges électriques courent jusqu'à ses reins, mais elle irradie de bonheur ! Elle va être mère, enfin !


Avec son humour habituel, Manu ouvre la portière, aide sa femme à s'installer et lui lance:

– Alors, ma petite baleine? Prête pour la grande aventure?

Malgré la douleur, la future maman ne peut retenir un éclat de rire.

– Notre fille arrive, Manu ! Enfin ! Je vais tenir Caroline dans mes bras dans quelques heures ! rayonne Marie.

– Notre fille ou notre fils, je te rappelle ! Si c’est un garçon, j’aimerais qu’il s’appelle Guillaume. J’aime bien ce prénom, on n’en voit pas si souvent d’ailleurs ! tente Manu.

– Ce sera une fille, je le sens ! Il paraît que les mamans ne se trompent jamais !

Marie opine du chef, comme pour se convaincre de ses dires.


La future accouchée est rapidement conduite dans une salle de travail défraichie. Le plafond semble sale, les peintures des murs sont fanées.

Les contractions sont douloureuses, Marie sent son corps se déchirer de part en part, et après une douzaine d'heures d'efforts, de transpiration, de fluides corporels, de rires et de larmes, Guillaume naît. C’est un beau poupon de presque quatre kilos, rose et chevelu, en pleine santé.


– Il est beau notre Guillaume, il est le parfait mélange de nous deux! s'enthousiasme Manu lorsque le nouveau trio est installé dans une chambre de la maternité.

– Et tu ne claironnes pas que tu avais raison? C'est tout toi, finalement. Tu es toujours là, à mes côtés, sans jamais enfoncer le clou. Quand tu me taquines c'est jamais méchant, toujours drôle.

– Ah ben oui, maintenant que tu m'en parles, c'est vrai que j'avais raison! Si j'ai oublié de te le signaler plus tôt, c'est parce que toutes ces heures de travail m'ont épuisé, tu peux pas comprendre, toi! Tu avais un lit, une couverture, alors que moi je suis resté debout à me geler toute la journée! Si j'avais su, j'aurais pris un pull supplémentaire! Personne ne pense à moi!


La bienveillance de son mari arrache un sourire à Marie qui ravale sa déception de ne pas avoir donné naissance à une fille. Manu, lui, est simplement fou de joie. Un fils, une fille, cela lui est égal. Ce qu’il imagine, ce sont des soirées d’été passées à se promener avec sa femme et son enfant, des câlins, des jeux, de l’amour et des rires.


Le jeune papa s’empresse de se diriger vers le téléphone public pour avertir ses parents et ceux de Marie. La famille de la jeune femme ne fait plus vraiment partie du paysage, mais il faut quand même satisfaire aux usages et informer les nouveaux grands-parents de l’arrivée de Guillaume.



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18

18 commentaires

cedemro

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Il y a 2 ans

Moi je n'aurais pas informé les parents de Marie. Seulement les frères et sœurs en âge de se déplacer seuls...

User231777

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Il y a 2 ans

Le moment d'un bonheur simple. Meme avec la déception de Marie. J'ai peur d'avancer dans la lecture, me demandant quand tout cela va déraper

Adrien Lioure

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Il y a 2 ans

C'est bien ce que je disais, on n'y échappe jamais vraiment ! Je sens que ça va finir par déraper toute cette histoire, je me demande bien quand !

sophie loizeau

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Il y a 2 ans

Une belle revanche même si ça ne fait pas tout, c est toujours là...

Duten

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Il y a 2 ans

Enfin une bouffée d'oxygène ! Marie est heureuse ! Pourvu que ça dure!

calou40990

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Il y a 2 ans

😍j’aime ce climat serein et aimant mais ça cache quelque chose…

User230517

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Il y a 2 ans

Le moment de décompression des personnages permet au lecteur de souffler etla dernière phrase donne envie d'aller plus loin dans le récit. Bien amené

Karen Kazcook

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Il y a 2 ans

Ah du bonheur, enfin 💕

Geraldinedewt

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Il y a 2 ans

Enfin un bel évènement pour Marie.

Caroline Verdugo

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Il y a 2 ans

On se demande ce qui va se passer après…. J’en veux encore un peu plus , 1 chapitre/jour c’est trop peu 😜
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