Fyctia
2. (1) Bar.
Dawn
Chambre 269, University Sterling
J'empoigne ma sacoche Carhartt, qui m’a coûté une fortune par la même occasion, que je balance sur une épaule et se répercute sur ma hanche. Je sors mon téléphone pour m’installe l’adresse précise en sachant que je vais divaguer.
Je me chausse de ma meilleure paire, c'est-à-dire mes Air Jordan One couleur grisâtre avec le logo Nike entièrement noir. Je prends mes clés pour ouvrir la porte qu'Ilona avait fermé avant de partir. Je borde le couloir en frôlant le mur avec le bout de mes doigts. J’essaie aussi de commencer à me repérer pour pouvoir me retrouver dans les semaines à venir. Vu le bon sens de l'orientation que j’ai.
En arrivant à l'extérieur du campus, je m'active dès lors où je passe le grand portail par peur du monde externe. Des gens malveillants ou d'autres personnes bizarres me font flipper aux moindres mouvements. Une peur irrationnelle d’être suivie, être kidnappée ou bien être interpellée fait écho. Que l’on se moque de moi fait partie d’une de mes plus grandes frayeurs, j’essaie de passer outre pour aller me balader.
Je prends mon casque Bluetooth pour le connecter directement à mon téléphone. Je clique sur le bouton PLAY de ma playlist et elle commence par « Let 'Em Cry » des Red Hot Chili Peppers. Je baisse la tête pour pouvoir mettre ma capuche jusqu'à mon front pour me cacher du monde environnant qui m’effraie plus que la normale. J’ai peut-être fait une thérapie sur ma phobie qui se dit sociale, mais ça ne veut pas dire que je suis complètement guérie. À ma plus grande déception.
L’air frais du soir me frappe au visage. Le coucher de soleil me fait de l’œil en plein milieu de la rue. C’est apaisant. L’oranger du soleil se répercute sur les appartements fades. Je me décide à prendre une photo de ce cliché. Je souris lorsque je vois un enfant tirer le bras de sa mère pour le lui montrer ce que je prends en photo.
Une pureté inexplicable signale une absence de peur. L’éblouissement du reflet d’une des fenêtres me vient en pleine face. Le déclin s’espace en pleine rue. Seulement deux, trois personnes sont présentes dans l’Avenue, cela me tente d’enlever mon casque. Une petite voix, pourtant, me prie de ne pas le faire.
Ne l’écoute pas.
Normalement, je ne devrais pas faire de crise d’angoisse. Entendre les bruits extérieurs n’est pas mon fort, c’est pour cela que je m’isole toujours. Pendant un marché, par exemple, je serais obligée d’écouter de la musique, pour reposer mon cerveau qui serait en ébullition. Mes neurones sont une vraie machine. Toujours en action, même lors d’événement calme. Mes sens sont à l’affut de chaque bruit, chaque mouvement qui peut être dangereux pour moi.
À peine après mon casque rangé dans ma sacoche, un homme m’aborde. Il a l’air réellement sympathique. Il dégage de la bienveillance d’ici. Son allure se manifeste avec son genou replié sur la bordure de la façade d’un bar. Je le reluque pendant un instant. Cheveux rasés et une belle gueule.
— Excuse-moi de te déranger, tu aurais du feu pour mon pote ? me désigne-t-il un garçon plus renfermé sur soi.
En sachant que je ne fume pas, oui, j'en ai un. Ce n’est que pour de la self-défense. On ne sait jamais. J’essaye de le retrouver dans le bordel de ma sacoche. Peu après, je lui passe en lui signalant que j’aimerais qu’il me le redonne.
— Oh Dawn !
Je pivote mon regard derrière l’homme à la cigarette pour voir ma colocataire, Ilona, si je ne me trompe pas.
— Attend, j’arrive, me prévient-elle.
Je mime un pouce de ma main, avant remettre mon casque sans musique. Je veux simplement rester dans ma bulle. Les bruits extérieurs sont diminués.
En regardant la devanture du magasin, je la vois en train de parler avec quelqu’un de masculin, reconnaissable avec ses muscles et sa mâchoire carré que je vois de profil. Je ne la dérange pas et attends uniquement en observant le devant qui est très artisanal avec des fleurs de part et d'autre du magasin.
Des cordes beiges se déplacent comme une sorte de serpent avec des motifs tous originaux dessinés probablement à la bombe de peinture, en tout cas très bien réalisées. Ilona tapote l’épaule de l’homme avec laquelle elle parlait et vient dans ma direction dans une démarche très déterminée. Elle m'accueille avec exagération ce qui me fait pouffer de rire.
— Et bien que fais-tu là ?
Ça ne se voit pas, je fais un bowling ?
Je ricane à ma blague médiocre avant de me concentrer sur cette dernière qui pose son bras sur l’épaule de l’inconnu au crâne rasé.
— Je voulais prendre un peu l’air et toi ?
— Je suis au bar avec des potes ! me présente-t-elle, son dit ami.
L’homme se penche sur ma coloc avant de lui chuchoter un secret. Elle ne perd pas de temps pour me demander après :
— Eh, tu ne voudrais pas les rencontrer par tout hasard ?
1 commentaire
Samantha Beltrami
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Il y a 4 mois