Fyctia

Le plat arrive sur la table, Hugo ne sait pas comment expliquer à Peter qu'il aimerait se retirer. Même si ce dernier a bien posé les formes dès le début du dîner, Hugo ne peut s'empêcher de remarquer ses regards insistant sur son torse et sur ses lèvres. L'ambiance devient rapidement gênante pour lui. Comment s'échapper de ce dîner sans blesser Peter? De plus, cela lui semble assez impoli de quitter un restaurant sans avoir mangé ce qu'il a commandé, mais d'une autre part, il ne peut pas continuer ce repas avec cet homme qui le regarde de plus en plus intensément. Il prend alors son courage à deux mains et interrompt le récit de Peter.

— Pardonnez-moi, mais je pense qu'il est préférable... que nous nous arrêtions là.

— Q-Quoi? Comment cela? Vous n'aimez pas ce restaurant?

— Non, ce n'est pas ça.

— Vous n'aimez pas ma compagnie?

— Ce n'est pas vraiment ça non plus.

— Alors quoi? Dites-moi! Que puis-je faire pour que vous soyez plus à l'aise?

— C'est juste que je suis amoureux de quelqu'un et en venant ici avec vous... et bien, j'ai l'impression de le tromper. Voyez-vous?

— Oh... je vois. Je comprends désormais votre air si vague, vous n'étiez pas vraiment avec moi lorsque je vous parlais. Je vous ai même complimenté à plusieurs reprises sur votre cou et vous n'avez pas réagi. Je suis désolé de vous avoir fait perdre votre temps.

— Ce n'est pas le cas. Je suis moi aussi désolé de peut-être vous avoir fait espérer qu'il se passe quelque chose entre nous.

— N'ayez aucune crainte, je vais bien.

— Bien... Dans ce cas, si cela ne vous dérange pas, je vais m'éclipser... J'espère que vous trouverez chaussure à votre pied. Merci encore pour l'invitation.

Hugo se lève et quitte la salle sans un regard derrière lui. Jamais, il n'eut le besoin de faire une telle chose dans sa vie. Même si ce dîner était voué au fiasco total, il lui a permis de prendre conscience que le seul amour dans sa vie est cloué dans un lit d'hôpital. S'il reste auprès de lui tous les jours, ce n'est pas par culpabilité, mais réellement par amour. Même si cela n'empêche pas Hugo de culpabiliser pour ce qui lui est arrivé. Il se rend compte alors qu'Aaron lui manque terriblement et qu'il a manqué à sa tâche quotidienne: il n'est pas allé voir Aaron de la semaine. Il espère au plus profond de lui, qu'il ne lui en voudra pas, encore moins lorsqu'il lui avouera cette soirée. Hugo ne veut plus cacher quoi que ce soit à Aaron. Il avait déjà pris conscience que dans la vie de couple, la clef du bonheur était la communication, mais avec ce cauchemar, ce Peter et les questions de son amie, il a complètement oublié cette règle d'or.

Plus une minute à perdre. Il passe rapidement aux toilettes des hommes du restaurant pour vérifier s'il n'est pas décoiffé, puis sort ensuite de l'établissement pour retrouver sa voiture et quitter les lieux. Il se rend ensuite à l'hôpital pour aller rendre visite à son petit-ami. Lorsqu'il est arrivé, il peine à bouger la main pour prendre la poignée, bloqué devant la porte. Lui en voudra-t-il pour son comportement? Pour l'avoir oublié durant une semaine? Il se décide enfin à entrer, il pousse la porte et le regarde, entouré de machines aux sons abrutissants. Il marche doucement vers le lit comme s'il craignait le réveiller.

— Salut... c'est moi... Hugo.

Il s'approche encore et s'assoit sur le matelas avant de prendre sa gauche entre ses deux mains.

— Je suis venu m'excuser auprès de toi. Je sais que tu peux m'entendre et même si tu as sûrement perdu la notion du temps, tu t'es peut-être rendu compte que je ne suis pas venu te voir depuis quelques jours. Je suis désolé... J'ai rencontré quelqu'un... mais ce n'était rien de concret, nous avions rendez-vous ce soir dans un joli restaurant. Ce qui est drôle, c'est qu'il m'a fallu ce dîner raté pour comprendre à quel point je tenais vraiment à toi. Depuis plusieurs mois, je venais te voir par habitude, parce que je le faisais tous les jours, je me sentais toujours aussi triste, mais peut-être que c'était aussi par habitude. J'ai eu un déclic ce soir, je t'aime toujours autant. Je me demande même si ce n'est pas plus... Enfin... j'ai compris à quel point je t'aimais. Et tu sais quoi? Je t'aime au point de vouloir vivre avec toi, de faire ma vie avec toi et de passer le restant de mes jours avec toi. C'est pourquoi, dès que tu te réveilleras, j'aimerais que tu viennes habiter avec moi. C'est une demande officielle que je te fais, car je t'aime plus que tout au monde, plus que mon propre boulot qui jusqu'ici a été ma seule raison de vivre. Aujourd'hui, c'est toi, ma raison de vivre. N'oublie pas que tu es ma petite guimauve... Sans guimauve, un chocolat chaud de Noël serait beaucoup plus fade. Alors sans toi, ma vie serait beaucoup plus monotone.