Fyctia

Aaron referme violemment sa porte d'entrée. Énervé, il balaye d'un coup de bras la lampe qui se trouvait sur la commode à sa droite en entrant dans son salon. Celle-ci se brise et plusieurs centaines d'éclats de verre s'éparpillent sur le carrelage.

- PUTAIN!!!

Il traverse son salon et entre dans sa chambre en marchant à plusieurs reprises sur des bouts de verre. Ce qui n'a aucune conséquence puisqu'il avait ses chaussures. Il ferme la porte derrière lui et s'appuie contre elle, le dos contre le bois de celle-ci. Il finit par se laisser glisser contre la porte tout en gardant les genoux contractés vers lui. Puis il entrelace ses bras pour y poser sa tête avant de laisser quelques larmes coulées.

- J'ai toujours été un idiot... Je ne voulais pas... Je suis tellement désolé...

La nuit ne sera pas réparatrice pour lui. peut-être qu'elle le sera davantage pour Hugo. De son côté, lorsqu'il rentre chez lui, il passe par la salle de bain pour enlever son haut et le mettre à laver. Pas question qu'une tâche s'incruste! Puis il enlève le reste de ses vêtements pour prendre une douche. Peut-être que l'eau froide réussira à décontracter ses muscles. Hugo est énervé, non déçu, peut-être les deux. Mais énervé contre qui? Déçu de qui? D'Aaron? Ou bien de lui? Peut-être qu'il aurait pu mieux réagir face à ce qui s'est passé chez Aaron. Peut-être bien que c'était à lui de faire un effort pour aller vers Aaron. Toutefois, c'était beaucoup trop rapide pour Hugo, il n'a jamais été à un seul date, à aucun rendez-vous galant, même juste à un dîner en tête-à-tête avec quelqu'un d'autre qu'un ami de longue date. Son corps finit par se détendre, il laisse encore quelques secondes son visage sous le pommeau puis il sort enfin. Il prend une serviette, s'essuie le visage et les cheveux rapidement, et la met ensuite autour de son corps. Il vérifie son portable et remarque qu'il a un nouveau message de Justine, son amie architecte.

• Hey! Merci à toi!J'ai désormais 38 ans, comme toi! Bon sang, qu'est-ce qu'on est vieux! Comment vas-tu? <3
• Je ne suis pas sûr que ça aille réellement... J'avais enfin un rendez-vous et je pense avoir tout gâché...
• À ce point? Tout est rattrapable tu sais? Si tu veux, on a qu'à parler tous les deux demain après-midi, qu'est-ce que t'en penses?
• Ok, j'ai une pause vers 16h, tu me rejoins à l'hôpital sur l'aire de repos, comme d'hab?
• Oki pas de soucis mon beau! Je serai là! PS: Et à l'heure ne t'inquiète pas! Bisous mon canard!

Hugo souffle. Il a peur de la réaction de son amie, peut-être qu'elle le traitera d'idiot car il a vraiment tout foiré, mais ce n'est pas ça le problème le plus urgent. Demain, c'est une nouvelle journée de travail, malheureusement Aaron et lui travaillent exactement au même endroit et ils risquent de se croiser à plusieurs reprises. Comment faire? Hugo finit par aller se coucher et essayer de s'endormir.

Jeudi 12 Décembre, vers 10h00, à l'hôpital.

Hugo a eu beaucoup de chance jusqu'ici, il n'a pas croisé une seule fois Aaron, le beau brun ténébreux. Peut-être qu'Aaron essaie lui aussi de l'éviter. Pourtant sa supposition tombe rapidement à l'eau, car au croisement du couloir, il tombe nez à nez avec lui. Que faire? Que dire? S'excuser? Ou pas? Aaron fuit son regard et passe son chemin. L'a-t-il ignoré car il était trop en colère? Ou est-ce parce qu'il ne se sentait pas capable de le confronter maintenant?

Durant le reste de la matinée, le midi à la cafète et le début d'après-midi, Hugo n'a pas recroisé me Dr. Brassard. Et ce, quasiment pour son plus gros malheur, au fond, il aimerait pouvoir le recroiser et s'excuser en bonne et due forme. Il sait qu'il n'aurait pas dû réagir ainsi la veille, mais en même temps, il est si difficile pour lui de penser qu'une personne pourrait [peut-être] s'intéresser à lui. Toutefois, ce n'est pas son seul problème, en effet, Hugo a toujours été très professionnel et s'est dévoué du mieux qu'il pouvait dans son travail et son hôpital. Il ne peut pas tout arrêter maintenant et encore moins se relâcher, surtout avec la période de Noël qui arrive. Il y a toujours divers accidents, entre les pneus qui lâchent sur les routes enneigées, les disputes familiales qui se finissent avec des batailles de couteaux ou encore les accidents à la montagne ou sur une patinoire.

À 16h00, à l'aire de repos, à l'extérieur de l'hôpital.

Justine attend déjà son ami, elle est assise sur un tabouret de bar et prend un chocolat chaud pour se réchauffer. Hugo arrive et s'assoit en face d'elle, toujours avec sa blouse blanche de médecin.

- Salut! Je suis content que tu aies pu venir, surtout aussi vite. Je sais que tu es assez débordée par ton travail.

- Salut! Surtout depuis que j'ai imaginé les plans de ton hôpital. Cela m'a clairement fait un nom dans le milieu de l'architecture.

- Je sais, tu ne pourras jamais me remercier.

- Je ne te permets pas de me copier.

- Je voulais juste te faire rire, et ça a l'air d'avoir fonctionné.

- En effet. Mais c'est moi qui devrait essayer de te faire rire d'après ce que j'ai pu comprendre.

- Et bien, un homme m'a invité chez lui pour le dîner hier et ça s'est assez mal terminé.

- L'homme au sapin?

- Exactement! Il a renversé son verre de vin sur moi et il a essayé de réparer sa bêtise, mais j'ai eu un mouvement de recul car bah... c'était la première fois qu'un homme me touchait le torse et j'ai paniqué.

- Ce n'est pas si grave Hugo. Cela se rattrape très facilement. Je suis sûre qu'il ne t'en voudra pas.

- Il est plutôt du genre direct, et moi, je suis totalement l'opposé.

- Enfin, simplement sur ce sujet, car habituellement, tu ne mâches pas autant tes mots. Je pense que tu dois juste aller le voir et essayer de m'être tout au clair pour éviter de rester là-dessus. S'il a été aussi rapide avec toi, c'est que tu dois vraiment lui plaire, alors ne t'inquiète pas, il ne refusera pas de te voir juste pour ça.

- On s'est croisé toute à l'heure et il m'a totalement esquivé.

- En même temps, vous vous trouvez sur votre lieu de travail, pas terrible pour remettre les pendules à l'heure.

- Je sais bien, c'est aussi ce qui m'inquiète avec cette relation. Je suis quand même quelqu'un de très respecté pour mon professionnalisme.

- Beaucoup de médecins ou d'infirmiers sont ensemble, ce n'est pas interdit. Je te conseille d'aller discuter avec lui.

- D'accord, je ferai ça, merci. Et toi? Comment ça va avec ton millionnaire?

- Disons qu'il essaie toujours autant de m'avoir par tous les moyens. Tu sais quoi? Il a essayé de me soudoyer avec vingt kilogrammes de chocolat! T'imagines? Vingt kilos de putain de chocolat!

On rit ensemble. Cet homme doit vraiment la vouloir comme architecte pour aller jusqu'ici.

- Ce n'est pas possible! Bon sang! Hahaha!

- Je suis sûre que ça va aller avec ton Aaron.

Elle pose sa main sur celle de Hugo et lui sourit. Malheureusement, ils n'étaient pas seuls, Aaron les a observé juste avant qu'ils rient ensemble et que Justine essaie de le rassurer.