Fyctia

LÉO

Avachi sur notre lit, je ressasse les derniers évènements en boucle dans mon esprit. J'ai passé les dernières heures à me lamenter comme un enfant et à pleurer.

Je me suis repassé en boucle les images de cet enfoiré avec ma femme.

Je l'entendais : ses gémissements.

Je la voyais : ses clignements d'yeux.

Je les voyais : s'aimer.

Le sentiment de choc et d'incompréhension s'est estompé pour laisser place aux incertitudes. Tout ce que je croyais être vrai, toutes mes convictions ont été balayées.

Maintenant que je me retrouve seul dans cette maison qui a longtemps été le foyer de notre amour, je repense aux souvenirs heureux, et autrefois réconfortants.

Le film de notre vie tourne en boucle dans ma tête. Notre rencontre avec Mia, notre mariage, la naissance d'Isabela ; tous ces souvenirs devenus des coups de poignard. Chaque image me rappelant ses mensonges et sa déloyauté.

La douleur est imprégnée dans tout mon être, cependant, elle laisse place à ma vulnérabilité et à ma vérité la plus nue. J'ai besoin d'elle.

Je ne peux pas vivre sans elle, je ne peux pas avancer si elle n'est pas à mes côtés. Cette trahison, aussi profonde et douloureuse soit-elle, ne pourra jamais faire disparaitre l'amour que j'éprouve pour elle.

La solitude m'envahit. La pièce est sombre et calme, quand son murmure m’envahit.

- Je l'ai quitté.

Un sentiment de réconfort s'empare de moi au son de sa voix.

Je lève le regard en sa direction. Elle est debout, adossée au rebord de la porte de notre chambre, les cheveux en bataille, les yeux rougis et gonflés par ses pleurs.

Avant de partir, elle s'était changée et avait remis ses cheveux en ordre afin que la blessure que je lui ai infligée ne se voie pas, ainsi que le sang sur ses vêtements.

Je sais donc qu'elle a pleuré de nouveau et que le moment qu'elle a vécu devait être intense.

Je savais qu'elle était certainement partie le retrouver, ce que je ne savais pas c'était pour quelle raison. Ma mère avait-elle réussi à la convaincre ? Apparemment oui.

Elle est triste. Et me rendre compte qu'elle ressent ce sentiment me prend au dépourvu.

- Tu étais amoureuse de lui ?

Elle s'avance lentement, les yeux balayant notre chambre, et s'assoit sur le bord du lit.

- Ne me demande pas ça Léo... Ne nous fais pas plus de mal que ce que nous ressentons déjà.

Une vague de colère m'envahit. Putain ! Elle était vraiment amoureuse de lui ? Je tente de masquer mon irritabilité.

- Je ne sais pas si je vais pouvoir te refaire confiance, lui dis-je.

- Je sais.

- Je ne sais même pas si je le veux, mens-je.

- Je sais, dit-elle les yeux rivés sur ses doigts qui se triturent entre eux.

C'est ce qu'elle fait quand elle est désemparée, elle triture ses doigts entre eux. Et je dois avouer que je me délecte de la voir aussi malheureuse que moi à cet instant.

- Je ne sais pas comment on va faire pour surmonter cette merde, Mia...

- Je ne sais pas non plus, répond-elle avec une voix à peine audible.

Puis je m'approche d'elle, et je me serre contre elle. Parce que j'en ai besoin. Parce qu'elle me vole ma fierté, mais que je lui pardonnerai tout.

Je l'attire contre moi, puis je l'aide à s'allonger près de moi et je l'enveloppe de mes bras autour d'elle.

J'entends ses sanglots, et je la presse un peu plus fort. Puis je remarque son crâne rougi par le sang de la blessure que je lui ai infligé tout à l'heure. Un frisson me parcourt à l'idée de lui avoir fait du mal.

Elle aurait dû faire un peu plus attention pour ne pas tomber.

***

Deux jours plus tard

- Je suis content que tu aies quitté ce travail.

- Pardon ? Je n'ai rien quitté du tout, j'ai pris une semaine de congés, le temps que tout se calme.

- Mia, si tu penses que tu vas retourner bosser pour cet enfoiré, tu te trompes !

- Et si tu penses que je vais devenir une marionnette qui obéit à tes ordres, tu te trompes également !

Après cette horrible journée qui a fait voler notre vie bien tranquille et paisible en éclats, nous avons eu une longue et intense discussion sur notre avenir.

J'ai expliqué à Mia que j'allais avoir besoin qu'elle me prouve chaque jour sa loyauté envers notre famille. J'ai beaucoup insisté sur la douleur qu'elle m'a infligée et qu'elle inflige à Isabela, justifiant cela par le fait que les enfants ressentent tout.

Je l'ai beaucoup fait culpabiliser et c'est ce que je souhaitais, je ne m'en cache pas. Après tout le mal qu'elle m'a fait, elle méritait au moins ça.

Elle préservait déjà tout ce que ma famille a à nous offrir : argent, réputation, famille.

Alors, la faire culpabiliser pour être certain qu'elle ne recommence jamais, ce n'était pas très grave, n'est-ce pas ?

Je m'assurais simplement de la fidélité de ma femme. En tout cas pour les prochaines années.

- Mia, tu imagines la douleur que tu m'infliges en voulant continuer à travailler pour cet abruti ?

- Léo ... je t'en prie. Ne m'oblige pas à quitter cet emploi, je ne le ferai pas. J'accepte de te rendre des comptes sur mes allées et venues, pour l'instant, mais je ne suis pas ta prisonnière. Si je sens que Gabriel...

- NE PRONONCE PAS SON PRÉNOM DEVANT MOI, hurlé-je de toute mon âme, la faisant sursauter sur son siège.

- Si je sens qu'il y a quoi que ce soit d'inapproprié, reprend-elle, je te promets de partir. Je ne laisserai rien passer.

Je m'apprête à répliquer quand elle me coupe.

- Et je te promets de trouver un nouveau travail d'ici la fin de l'année. Mais je veux retourner là-bas le temps de me trouver quelque chose. Je vais exploser sinon Léo, je t'en prie... me supplie-t-elle.

J'acquiesce de la tête et l'attire contre moi. Je l'embrasse sur le front. J'ai une grosse journée, je dois partir au travail.

Cette idée qu'elle continue à travailler dans ce cabinet de dévergondé ne me plaît pas, tant pour mon couple que pour cette histoire de maitre chanteur.

Je vais devoir trouver une solution pour l'éloigner, et vite.