Fyctia

MIA

Ce soir, nous avons un dîner d'affaires au cœur de Londres. Waouh, la classe non ? Filipe nous a demandé à Chloé et à moi de l'accompagner lors d'un diner important avec des partenaires potentiels. « Toute l'équipe doit être présente, soyez-vous-mêmes et faites-vous belles les filles » nous avait lancé Filipe. J'ai senti le regard surexcité de Chloé sur moi après cette lourde, mais drôle, réflexion de notre patron.

Bien que nos relations professionnelles devraient rester formelles, nous avons le même âge et, quand nous ne sommes pas plongés dans nos tâches respectives, nous nous amusons ensemble. Tous les trois, pas avec Gabriel, cet ours mal léché qui préfère se terrer dans son bureau quand il n'est pas ailleurs.

J'ai donc suivi les conseils avisés de Filipe et je me suis faite jolie. Je porte une robe noire courte très chic, des bas noirs et des escarpins assortis à ma robe de soirée. Mon Léo est rentré tôt du travail pour que je n'arrive pas en retard lorsque Chloé passera me prendre ; elle a insisté.

Je dois avouer que je ressens une vive excitation à l'idée de cette soirée. Il est évident que, si celle-ci s'apparente à un diner d'affaires très sérieux, c'est plaisant de se sentir importante pour une entreprise. Un câlin à ma petite Isabela d'amour, un baiser rapide à mon Léo, quand j'entends une voiture se garer dans l'allée. Le « DING » de mon téléphone retentit, m'indiquant que je viens de recevoir un SMS.

• Chloé d'am : Je suis là, bombe sexuelle.

Je vous épargne les emojis représentant une pêche et plusieurs aubergines qui accompagnent le texto.

Je me précipite pour rejoindre ma copine dans la voiture, et elle me raconte ses dernières aventures avec le barman d'une des discothèques qu'elle fréquente régulièrement le week-end. Il semble qu'elle ait développé des sentiments pour lui. En tout cas, il la baise bien, si je reprends ses mots. Et je crois que c'est déjà beaucoup pour ma jolie blonde.

Nous arrivons dans le restaurant et Filipe y est déjà présent. Nous devions y être tous les quatre à 20h précise afin d'être déjà sur place lors de l'arrivée des potentiels partenaires. Évidemment, Gabriel n'est toujours pas présent. La ponctualité et lui ne sont pas de fidèles amis.

Nous échangeons tous ensemble et Chloé allume Filipe, comme d'habitude, tout en sachant qu'elle ne finira pas dans son lit.

Je regarde leur petit jeu ,amusée,  et mon regard est aussitôt attiré par une présence. Sa présence. Il porte un costume bleu marine très foncé et une chemise blanche. Sa chemise contraste avec sa peau hâlée et ses yeux sombres. Bien que je sois éperdument attirée par mon boss, je garde mon calme apparent.

Après tout, je suis mariée et je ne compte pas trahir ma promesse.

Cependant, cela ne m'empêche pas d'apprécier son charme et de jeter un coup d'œil occasionnel, voire même de m'amuser, à la manière de Chloé.

Cela dit, cette idée qui me traverse l'esprit est rapidement balayée par le fait que cet ours mal léché du dimanche est un handicapé du monde social, il ne sait pas s'exprimer, sauf pour parler affaires. Alors, séduire, quelle idée !

Il n'a jamais dû avoir à réfléchir pour séduire une femme, à la faire rire, à se préoccuper d'elle ou s'y intéresser pour conclure, c'est certain. Son physique est déjà une arme de séduction à lui seul. C'est un homme qui claque des doigts, et elles sont toutes à genoux, prêtes à le sucer. Je rejette cette idée, je ne veux pas y penser, j'ai plutôt envie de passer une belle soirée.

Gabriel s'installe à table et il se met face à moi, nous sommes en bout de table. Chloé est à mes côtés et Filipe du sien. À droite de mon amie et de Filipe, il y a deux chaises réservées pour les partenaires invités à notre dîner. Comme Gabriel et moi ne sommes pas très loquaces, nous laisserons Chloé et Filipe gérer la conversation.

Je remarque que le regard de Gabriel s'attarde souvent sur moi. Il le fait moins discrètement qu'il le souhaiterait. Les invités arrivent et les frères commandent une bouteille de champagne qui doit facilement coûter la moitié de mon salaire.

Nous portons tous un toast et commençons à discuter tous ensemble.

Soudain, mon esprit s'égare, et je me désintéresse de ce qui se passe autour de moi. Le nez dans mon assiette, je suis préoccupée et je me sens coupable d'avoir laissé Isabela ce soir. C'est la première fois que je ne passe pas la soirée près d'elle, et que je ne la berce pas avant qu'elle ne s'endorme.

-        Tu t'ennuies ?

Putain, il ne va pas me lâcher, je ne peux pas me défaire de ce diner cinq minutes sans qu'il ne gâche mon moment avec sa question qui va bientôt me valoir un reproche.

-        Non, monsieur le chef, je ne m'ennuie pas, lui réponds-je, une pointe d'insolence dans la voix, en chuchotant sans lever les yeux de mon assiette, agacée. J'ai le droit de prendre ma respiration entre chaque mot ?

-        Je voulais simplement m'assurer que tu ne t'ennuies pas. J'imagine que tu aurai préféré passer la soirée en famille plutôt qu'ici.

Je relève le regard dans sa direction, interloquée par son changement soudain de comportement envers moi. Je remarque bien qu'il me regarde d'une manière moins conventionnelle que ce qu'il ne devrait, mais jamais il n'avait encore eu de mots agréables à mon égard.

-        Non, je.. Non, ça va, Gabriel, merci. Je suis bien ici.

Je lui adresse un léger sourire et celui-ci m'est rendu. J'ai l'impression d'être dans une autre dimension. La seconde suivante, Gabriel s'intéresse à ma vie et me pose une multitude de questions. Nous échangeons ainsi pendant tout le repas, coupés des personnes avec qui nous dinons, coupés du monde.